Le raz-de-marée Kendji Girac

Le raz-de-marée Kendji Girac
Kendji Girac sur scène © Mrs Custom-Pause Guitare 2016

Il fédère, caracole dans le cœur des adolescentes, explose les records de vente. Depuis sa consécration dans le télé-crochet The Voice, la déferlante Kendji Girac ne flanche pas. Nous avons assisté à son concert au festival Pause Guitare à Albi afin de prendre le pouls de sa popularité.

Elles sont là. Elles le guettent. Des mômes, des adolescentes. Disciplinées, respectueuses et énamourées. Pourquoi lui ? "Parce que !", entend-on répondre spontanément et sans trop d'explication. Quand elles daignent compléter la phrase, c'est souvent succinct : "Parce qu'il est beau", "Parce qu'il chante bien", "Parce qu'il vend du rêve". Génération Kendji donc, qui vient surtout de la cour de récréation et des collèges, qui instaure le culte de l'instant, qui a la séduction cathodique facile.

"Dès que je l'ai vu dans les auditions à l'aveugle de The Voice, j'ai été subjuguée par lui. Je regarde l'émission depuis sa création et je n'avais jamais eu un tel coup de cœur. Il avait un truc en plus". Quel est ce "plus" ? On n'en saura pas davantage. C'est Tiphaine, 15 ans, qui parle, et ses trois copines du même âge approuvent. 

Arrivées largement avant l'ouverture de l'accès au site, les voilà en première ligne. Elles ont la mémoire précise pour lui, glissent au débotté le jour exact où s'est tenu le concert au Zénith de Toulouse. C'était il y a un mois. Aucune lassitude éprouvée. "On sait que dans les festivals, ce sont des spectacles plus courts. On va profiter de chaque minute". Elles confient aussi un rituel sacré. Celui de passer quotidiennement en boucle les chansons de leur idole. La mère de Tiphaine, caution adulte et conductrice désignée d'office : "Cela lui permet de tenir le coup, de surmonter tous ces tracas d'adolescentes. Honnêtement, je préfère qu'elle écoute cette musique-là plutôt que des choses agressives".
 
Succès public
 
A 20 ans, Kendji Girac reste l'élu du moment. Une ordonnance pour l'adolescence. 1,7 million de fans ont "liké" sa page Facebook. Engouement pubertaire et surexposition médiatique, la presse jeune le met en couverture avec une régularité métronomique. Depuis son avènement, le garçon poursuit sa chance et la pousse en avant. Les chiffres de vente de ses deux albums culminent chacun à six zéros.
 
 
Son agenda de juillet est massivement rempli. Le programmer relève presque du passage obligatoire. "Il y a de la demande et un vrai enthousiasme populaire pour cet artiste. On ne peut pas faire l'impasse. Il n'est pas question de mépriser le public par rapport à ce qu'il aime. Dans ma tête, je ne fonctionne pas avec ces clichés-là", affirme Alain Navarro, l'attachant directeur de Pause Guitare, festival attractif qui jongle savamment entre découvertes et grosses têtes d'affiche.

Les 13.000 billets de cette soirée ont tous trouvé preneurs deux mois avant ladite date. Une première dans l'histoire de la manifestation. Kendji partage ici le plateau avec Mika (son coach dans The Voice), Boulevard des airs, Bigflo & Oli. Ces derniers, rappeurs en vogue, sont de la région. Ils ont aussi leurs fans, pas les mêmes que Kendji. D'où quelques réserves à son égard. "Je vais aller le voir parce que je ne veux pas mourir con. Mais à la base, ce n'est pas trop ma came. Les paroles, ce n'est vraiment pas terrible", souffle Florian, frais bachelier.

 
La bonne étoile

Le terrain musical à explorer a tout effectivement du bac à sable. Formaté, peu profond et sans grand relief. Sa recette ? De la gipsy pop qui débite de l'inoffensif et du répétitif. "On a quand même l'impression d'entendre la même chanson", tacle un festivalier, resté au bar pour l'occasion. Difficile aussi de ne pas réprimer un rire nerveux quand l'écran géant dévoile, en introduction, des images enregistrées du chanteur traversant les coulisses d'une salle de concert. Dès son apparition sur scène, une marée de téléphones et des drapeaux à son effigie – facturés dix euros au stand de merchandising - se dressent. Le refrain de Conmigo est scandé avec ferveur. Ne pas s'attendre à de quelconques trous de mémoire. La leçon est apprise par chœur, surtout au sein des premiers rangs.

 
Kendji arbore un Teddy avec un imprimé "palmiers". Il a la voix un tantinet fatiguée, mais ne faiblit jamais. On sent chez lui un sens du devoir. Il lance des "jump" à destination d'une foule extatique, danse de manière un peu pataude. Lorsqu'arrive le tube Les yeux de la mama, Tiphaine enlace sa mère. "Cette chanson me traverse le corps. J'ai envie de pleurer", scande-t-elle sans réel sens de la mesure. Elle vit un rêve éveillé. Saute comme un kangourou avec ses copines sur Gitano. Capture quelques moments sur son smartphone. En fin de concert, Kendji s'en remet à son destin : "Je remercie la vie et ma bonne étoile si elle est là". En retour, elles lui ont donné leur amour, leur âme, leur voix et leurs bras.
 
Kendji Girac Ensemble (Mercury/Universal Music) 2015
Site officiel de Kendji Girac
Page Facebook de Kendji Girac