Bertrand Belin, la pudeur créative
Parcs, le quatrième album de Bertrand Belin nous promène dans des allées où la musique foisonne et le texte se dénude, où l'ombre de Jack London et de Herman Melville se croise au détour d'une ou deux chansons. Enregistré à Sheffield sous la houlette de Mark Sheridan, ce disque est une jolie réussite qui devrait confirmer un succès grandissant.
RFI Musique : Parcs est très produit avec des arrangements qui voient même l'apparition de synthétiseurs. C'est une première ?
Bertrand Belin : Oui, c'est assez neuf. Il y a toujours eu des claviers dans mes disques, mais en effet, pas des synthés ou des sons qui appartiennent à ce qu'on pense être une autre famille musicale. Cela fait longtemps que j'ai envie d'investir ces territoires pour aller où on ne m'attend pas, pour rompre. J'ai le souci de ne pas me répéter. C'est assez difficile de ne pas le faire complètement d'ailleurs, puisque d'un disque à l'autre, on retrouve quelque chose qui se dépose, que l'on n'avait pas invité, mais qui est là parce que c'est le même artiste.
Pas encore assez à mon goût mais ça viendra. C'est une histoire de réconciliation des opposés. Et puis, il faut pouvoir travailler une langue dans sa nature particulière avec d'autres registres sonores, poursuivre un récit sans perde le fil. C'est assez délicat. Chanter aigu me demande des efforts physiques que je ne peux pas trop reproduire sur scène. Sur mon premier disque, j'en étais capable sans me faire une entorse, maintenant c'est devenu un peu plus compliqué.
C'est tout le contraire, mes chansons sont mine de rien, fondées sur des éléments autobiographiques. Mais pour la pudeur, c'est assez vrai. Je garde pas mal à l'esprit que le prisme de l'art fait que je ne suis pas là pour raconter ma vie. C'est une bonne chose d'ailleurs parce que ce ne serait pas très intéressant. La littérature, la poésie, tout ce qui m'intéresse par ailleurs, fait appui, mais pas plus que chez n'importe qui. D'ailleurs, c'est souvent à postériori que je me fais la réflexion : "Tiens cette chanson répond à ce livre que j'ai lu il y a six mois". Cela avait fait son chemin en moi sans que je m'en rende compte.
Oui, je me sens légitime à prendre en charge un certain genre de récit. Ça me convient de chanter à la place d'un autre qui n'a pas de voix ou de micro. Les personnages des chansons sont un peu comme des silhouettes. Ils ne sont pas décrits, leur sexe n'est pas défini, ce sont comme des masques blancs de théâtre auxquels il arrive des choses avec quelqu'un qui en prend note. C'est vrai que ça m'est assez difficile d'imaginer quelqu'un vraiment, qui s'appellerait untel, qui aurait telles habitudes... ça ne me vient pas du tout.
En concert le 29 mai à la Gaîté Lyrique (Paris) et en tournée dans toute la France
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