Les quatre saisons de David McNeil
Plus de 20 ans d’absence, c’est long. Les aînés se souviendront d’Hollywood, repris par Montand, les plus jeunes de ses chansons écrites pour les autres : Julien Clerc (Mélissa) ou Alain Souchon (J’veux du cuir), entre autres, qui ont traversé le temps. Avec Un lézard en septembre, son premier album studio depuis 1991, et dont la réalisation est signée Dominique Blanc-Francard, David McNeil effectue un retour discographique plus qu’attendu : magnifique.
Certains jonglent avec la plume avec la même adresse que d’autres avec leurs pinceaux. A un point tel qu’on en vient parfois à se demander si le talent n’a pas quelque chose d’héréditaire ; on pensera à se rappeler que David McNeil n’est autre que le fils de Marc Chagall.
A chacun néanmoins ses impressions et sa symbolique autour de la vie intime. Son retour en douze chansons, David McNeil l’a brodé de façon personnelle, mais pas en solitaire. Il y a convié des complices de longue date : Alain Souchon et Robert Charlebois y prêtent leur voix, le temps d’un duo chacun. Un temps qui s’étire, dans Trente ans CFA, où Souchon et McNeil lancent les cailloux sur une "marelle" d’apprentissage de l’existence très imagée, comme autant d’étapes où l’on se range des bagnoles à mesure que les années défilent, et dont Françoise Hardy relance dans un murmure le tempo de la valse.
Auprès de Robert Charlebois, ce sera Jim et Jules, sur un picking folk ou s’immisce le chœur féminin de Carla Bruni. Puis, ici et là, on retrouvera pêle-mêle en filigrane les voix ou les guitares de Michel Jonasz, des frères Ours et Pierre Souchon, de Julien Voulzy et Matthieu Chedid.
D’une précision d’orfèvre, McNeil évoque ses souvenirs sur un air de blues (Les amours impossibles), de bossa (Washington Square) ou de jazz (Vous souvenez-vous de Louisa), avec toujours cette pointe d’Americana qui lui est propre. Les saisons – et les femmes – s’y suivent mais ne s’évaporent pas, s’efforçant de déjouer les tours des escroqueries du parcours à effectuer (Imbroglios, Tapis volant) pour se rejoindre sur Les douze mesures du blues aux allures de Martin’s band.
Avec sa poésie tendre et lettrée d’une finesse rarement égalée, David McNeil livre avec Un lézard en septembre un songwriting qui chante certes l’automne mais s’impose comme le plus joli disque de chanson du printemps.
David McNeil Un lézard en septembre (Warner) 2014