Piers Faccini et Vincent Segal à deux voix

Il parle déjà depuis une vingtaine de minutes quand, au détour de la conversation, Piers Faccini donne la clé de ses chansons d'un temps perdu : "C'est un peu cliché de le dire mais c'est avant tout un disque à deux voix. C'est la voix de Vincent (Segal) avec son violoncelle, ma voix, et puis le dialogue qui naît de cela." Songs of Time Lost en version originale est donc une conversation entre le plus français des songwriters anglais et le violoncelliste de Bumcello, Vincent Segal ; c'est plus exactement le résumé d'une amitié de 25 ans.

Les deux musiciens se sont rencontrés à Paris à la fin des années 80 "dans une fête où ils s'ennuyaient" et, dès ce jour, ils n'ont pas cessé de jouer ensemble. Réalisateur du premier disque de Piers Faccini, Leave No Trace, Vincent Segal a été en vérité bien plus qu'un compagnon de route. "J'avais une carrière de peintre, rappelle Faccini. Pour moi, la musique a longtemps été quelque chose d'assez secret, une passion : j'écrivais des chansons mais je n'enregistrais pas. Vincent était l'une des seules personnes auxquelles je faisais écouter ma musique."

Du blues au maloya

Suite logique de leurs correspondances, Songs of Time Lost aurait pu venir plus tôt mais sans doute n'aurait-il pas eu les mêmes contours. Le disque, qui associe des reprises blues, du maloya ou des chansons traditionnelles napolitaines aux compositions folk du duo Faccini/Segal est une traversée de ce qui façonne un musicien. "On avait envie montrer que ce n'est pas juste une question d'interprétation, que ces musiques font partie de la façon dont on écrit la musique et nos paroles, c'est pour cela qu'on a insisté pour mettre quatre de nos chansons."

Si les fantômes de l'obscur Townes Van Zandt, du bluesman Mississippi John Hurt ou du réunionnais Alain Péters rodent, ces chansons "sont à la couleur de cette rencontre". Suivant le fil d'une conversation imaginaire, elles passent du Mississippi au sud de l'Italie, de l'Angleterre à la Réunion sans mettre de côté l'influence fondatrice de la musique africaine.

Performance mise à nue

Centré sur le duo acoustique guitare/voix – violoncelle, l'album a été gravé au cœur des Cévennes. Cette terre où Piers Faccini a posé ses pinceaux voici quelques années a été le cadre d'un enregistrement live dans "un mas perché sur les montagnes", une cave à vins et une chapelle romane. "Comme dans un concert, c'est la performance mise à nue, il n'y a aucune décoration, aucune ornementation", dit Piers Faccini.

Prenant les chansons au corps, Songs of Time Lost repose sur une alchimie singulière : "Vincent a une palette tellement riche qu'il y a des moments où je pose ma guitare et où je me retrouve juste avec ma voix, ce qui m'a donné envie d'expérimenter plus que d'habitude, constate le songwriter. De plus, quand on chante dans une nouvelle langue comme c'est le cas ici avec le créole, il y a des portes qui s'ouvrent, de nouvelles sonorités qui viennent."

S'il est bien question de voix, il est aussi question de trouver sa voie et, grâce à ce "songbook" à la beauté crépusculaire, c'est ce trajet que nous content Piers Faccini et Vincent Segal.

Piers Faccini & Vincent Segal, Songs of Time Lost (No Format) 2014
A écouter : dans La Bande Passante, Piers Faccini et Vincent Ségal en live
Site officiel de Piers Faccini
Page Facebook de Piers Facini et Vincent Segal

En concert le 30 septembre au Théâtre des Bouffes du Nord à Paris