Marie-Flore, mélancolie des nuées

Marie-Flore, mélancolie des nuées
Marie-Flore © R. Cambuzat

Pour son premier album, By The Dozen, la jeune Parisienne Marie-Flore se révèle en digne héritière d’une pop au charme vénéneux, dans la tradition de Leonard Cohen ou du Velvet Underground. Portrait.
 

Un soir de Maroquinerie en 2007 à Paris, une grande jeune fille mince d’à peu près 18 ans se lance, seule et assise au milieu de la scène, une guitare électrique rouge presque trop imposante entre ses mains. D’une timidité évidente, elle dégage pourtant une aura diffuse, un magnétisme qu’approfondit sa voix blanche, ses chansons dépouillées et assumées.

Son nom, Marie-Flore, restera en mémoire des années durant jusqu’à cette rencontre, en 2014, et notre souvenir remonte inévitablement : "C’était mon tout premier concert, assure-t-elle, à notre étonnement. Je ne me souviens plus très bien de ce soir-là. Comme souvent, je joue, et quand je sors de scène, j’ai tout oublié !"
 
Un premier concert, donc, et "une démo enregistrée dans ma chambre" pour seuls faits d’armes. Mais, en pleine vague folk, la jeune Parisienne trouve ses marques et entre très vite dans le circuit indépendant, grâce à l’aide précieuse d’un manageur, David Barat : "Sans lui, je n’aurais probablement pas poursuivi dans cette voie".
 
Pour Marie-Flore, en effet, la vocation musicale se construit lentement : une formation classique en alto, d’abord, puis une obsession pour l’écriture découverte au contact de la musique de Leonard Cohen et du Velvet Underground, avant des études de droit qui l’éloignent un temps de la musique. "J’étais à cette époque très engagée politiquement, se remémore-t-elle. Je consacrais l’essentiel de mon temps à la fac et à mes réunions. Puis progressivement, le virus m’a repris."
 
Comme à son habitude, la jeune femme mène sa carrière en solitaire, à son rythme, enchaînant en solo les tournées en première partie d’artistes plus côtés comme Émilie Simon ou Pete Doherty, une rencontre importante. "Le voir susciter autant d’engouement, accompagné de sa seule guitare, et cette voix rêche, sincère, quelque part cela m’a conforté dans mes certitudes."
 
Son premier disque, un mini album réussi paru en 2010, Marie-Flore n’en parle pourtant que comme une transition vers l’âge adulte. "J’ai beaucoup de mal à le réécouter, ma voix est encore trop frêle, trop ‘jeune fille’". Trois années seront nécessaires à concevoir la suite, et grandir : une collaboration étonnante, d’abord, avec les rockeurs parisiens de Stuck in the Sound (elle signe les textes de Pursuit), et enfin un premier album intitulé By The Dozen, écrit au gré d’histoires personnelles, de rencontres fantasmées, et de "mots d’anglais bizarres et beaux, que je trouve dans mes lectures ou sur Internet".
 
À l’image de l’entêtant Feathered with daggers ou de la chanson-titre, sublime, sa voix vaporeuse et détachée, à la diction pointue proche de Nico (feu l’égérie du Velvet Underground), promène l’auditeur à travers un léger rideau de fumée, confortable ou piquant, c’est selon.
 
La production, chaleureuse et ouverte, est signée de l’excellent Robin Leduc. "Un véritable révélateur pour moi. On se retrouvait sur notre passion commune pour le Velvet, Brian Jonestown Massacre, et lui m’a ouvert à Al Green, aux musiques africaines, aux claviers vintage" Une largeur d’esprit incarnée par les guitares funky d’Empty Walls, contrepoint parfait à la mélancolie d’une jeune artiste à porter aux nues.
 
 
Marie-Flore By The Dozen (Naïve) 2014
Page Facebook de Marie-Flore