Julien Clerc à l’heure anglaise

Julien Clerc à l’heure anglaise
Julien Clerc © DR

Avec Partout la musique vient, son 23e album enregistré à Londres, Julien Clerc, s’oriente vers des sonorités plus pop, teintées de groove anglo-saxon. Le chanteur hexagonal n’en omet pas pour autant, de porter, à la grâce de sa voix, des textes ciselés par des paroliers émérites : Carla Bruni, Gérard Duguet-Grasser, Maxime Le Forestier et surtout Alex Beaupain. À 67 ans, Julien Clerc se déclare heureux, serein, et toujours enthousiaste à l’idée de créer ses petits bijoux du quotidien : ses chansons.

Comme une envie d’autres couleurs musicales, de booster ses tempos, de relever les chœurs façon pop, de claquer des doigts façon "yeah" : pour son 23e album, Partout la musique vient, l’intarissable Julien Clerc, 67 ans, toujours en quête de nouveaux défis, loin de toute réminiscence, a exporté la production de son disque, sous les cieux londoniens. "Tous les jours, pour me rendre à pied au studio, je traversais Abbey Road, raconte-t-il. J’en ai même fait un projet familial : vivre trois mois à l’heure de Big Ben…".

À l’origine de ce voyage, il y avait ce besoin du savoir-faire anglo-saxon, ces talents "sonores", ces aspirations à la pop, au groove. L’aventure aurait pu se dérouler aux États-Unis, trois producteurs étaient en lice… Mais un homme, en particulier, séduit Julien : le Londonien Jimmy Hogarth, qui a entre autres, collaboré avec Amy Winehouse, James Blunt, ou Suzanne Vega.
 
Sa voix, son fil rouge.
 
"Le point commun entre ces artistes et moi ? L’importance d’une voix particulière, dit-il. J’adore la façon d’Hogarth de mettre en lumière cet instrument, d’honorer le chant, mais aussi de reléguer, un peu en arrière-plan, le piano... " Sa voix, justement ? Le chanteur de Femmes, je vous aime, en parle sans prétention, comme d’un outil précieux : son fil rouge. "J’ai remarqué, très jeune, son pouvoir sur l’auditoire, dit-il. Au début, j’utilisais à l’instinct ce cadeau de la nature, jouais de mon vibrato, sombrais dans la facilité. Ma professeure de chant m’a appris à la domestiquer, à la maîtriser avec plus de justesse".

Une signature vocale, donc, que les Anglais surent aborder sous un autre angle, tout en conservant son grain, et sa chair. Pour auréoler le chant, l’orchestration, pertinente, tient d’abord au choix de l’équipe : des instrumentistes libres et "hyper créatifs". Elle tient aussi au talent d’arrangeur – cuivres et cordes, enregistrés depuis les Air Studios de Sir George Martin – de Wil Malone (Black Sabbath, Iron Maiden, Massive Attack, etc.).

 
Dans un savant équilibre entre voix, texte et beat, Jimmy Hogarth éclaire d’une autre teinte, ce héros de la chanson française. Dans le même temps, si le disque sonne peut-être plus "musclé" qu’à l’accoutumée, la "french touch" reste un art du glamour, du contrepoint, des envolées des violons… La part de Julien ? "Jamais je ne me suis autant investi dans les arrangements", confie-t-il.
Les mots d’amour de Beaupain

Et puis, au cœur de cet écrin musical, se nichent les textes, finement écrits par ses paroliers. Souvent, Julien Clerc écrit d’abord la musique, qu’il adresse aux auteurs. Parfois, d’autres lui envoient des paroles, sans notes ni accords. C’est le cas, sur cet album, de Carla Bruni qui signe deux beaux textes, Les Amoureux, et Le Chemin des rivières. Le cas aussi de Gérard Duguet-Grasser, qui offre l’histoire du duo Violette et Pierrot ou le mélancolique Long Distance Call, aux accents éthérés. Avec Maxime Le Forestier, la création de l’optimiste On va, on vient, on rêve se fit en aller-retour.

Sur ce disque, Julien Clerc entame surtout une nouvelle collaboration : celle avec Alex Beaupain, qui lui écrit un bouquet de chansons d’amour, sensibles, subtiles, en clair-obscur. "Nous sommes très complices. Peut-être en raison de notre signe astrologique commun : balance ! Proches dans les ressentis, nous bossons sans chichi, avec une attitude libre, un respect de nos codes mutuels. Parmi les grands paroliers, avec lesquels j’ai collaboré, tels Roda Gil, Alex ne dépare pas. Il apporte un souffle de jeunesse, de fraîcheur…" Julien à la composition, aux harmonies parfois barrées, aux mélodies et à la voix, Alex aux mots, et aux histoires : deux hommes peignent ici les multiples facettes de l’amour.

 
Une source créatrice intarissable.
 
D’amour, ici, il est toujours question. Du haut de ses 45 ans de carrière, Julien Clerc ne saurait être blasé. Plutôt serein, confiant, enthousiaste : "La composition m’évoque l’escalade d’une montagne… Loin d’être fastidieuse, l’ascension se révèle ludique, gorgée de plaisir ! La longévité de ma source m’étonne : elle ne tarit pas !" Boulimique de musiques, le chanteur trouve l’inspiration dans les sons qui flottent dans l’air, dans les artistes qu’il côtoie, les "sincères", ceux qui parlent au cœur, chantent, jouent ou se produisent sur scène, non par posture, par intérêt politique ni économique, mais par amour.
 
Enfin, l’artiste croit en ce miracle : celui d’une chanson réussie, qui conjugue, alchimie parfaite, les mots, la musique et la grâce d’une voix. Inlassablement, il traque la formule. Et, bien souvent, il fait mouche…
 
Julien Clerc Partout la musique vient (Parlophone) 2014.
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Site officiel de Julien Clerc

A écouter : Julien Clerc en live dans La Bande Passante (06/11/2014)
                       Rencontre avec Julien Clerc dans VMDN (18/11/2014)