Cœur de Pirate, l’âme bleue, le cœur yéyé

Cœur de Pirate, l’âme bleue, le cœur yéyé
© clara palardy

Depuis le succès de Cœur de Pirate son premier album en 2009, Béatrice Martin n’a pas chômé. Après Armistice, son projet en anglais en collaboration avec Jay Malinowski, du groupe canadien Bedouin Soundclash, et sa récente participation à Noël ! Noël ! Noël !, dirigé par Michel Legrand, on la retrouve aujourd’hui dans Blonde, un deuxième opus très personnel.

Cœur de Pirate a appelé son disque Blonde, de l’expression québécoise qui signifie "la copine", car les titres qui le composent décrivent "les différentes phases d’une relation amoureuse". "Pendant les trois dernières années, j’ai été la Blonde de mon public, et de quelqu’un. Il fallait que je fasse le point."

C’est qu’il s’en est passé des choses depuis la sortie du premier album ! Vendu à plus de 600.000 exemplaires, celui-ci a propulsé la chanteuse sur le devant de la scène, au Canada comme en France. Puis il y a eu les tournées, les duos partagés, les rencontres aussi. De quoi perdre pied ou se perdre tout court, sans compter le tourbillon médiatique.

Alors que son premier opus tirait un trait sur sa vie de teenager, Blonde raconte les débuts de sa vie de femme, des débuts "un peu bizarres, un peu brouillés. Ce sont mes expériences d’il n’y a pas très longtemps, alors que j’étais déjà loin de mon adolescence quand j’ai sorti Cœur de Pirate."

Pourtant, le doute s’estompe dès lors que la musique le canalise. "Je ne sais pas si le deuxième album est une étape, il faut le faire de toutes façons, même s’il est vraiment différent du précédent. C’est une pression qu’on se met nous-mêmes, on veut répondre aux attentes que les gens ont. Je ne sais pas comment je l’ai traduit, je crois que ces attentes, je les avais juste toute seule. Je ne suis pas de nature inquiète, mais plutôt perfectionniste !"

Le goût de l’intemporel

C’est en douze morceaux (plus deux bonus en édition limitée) que le point est fait comme on tourne une page. Si l’on retrouve Cœur de Pirate au piano, la sobriété des orchestrations de ses débuts a laissé place à des arrangements étoffés de cordes, de percussions et de guitares rock. Une progression "qui s’est faite naturellement, sans rien de prémédité. Il y avait des chansons qui m’inspiraient. Je suis allée de The Platters, The Ventures, ou The Zombies aussi, à Carol King et Phil Spector."

L’occasion également de laisser place à ses envies, comme celle d’écrire Lève les voiles, une pièce brève entonnée par Les Petits Chanteurs de Laval et Les Voix Boréales en ouverture, qui ressemblerait presque à un cantique. "Je voulais une fausse chanson traditionnelle chantée par un chœur d’enfants, parce que c’est dans les chorales que j’ai appris à chanter. Pour moi, c’était important de le faire. C’est une image de l’enfance aussi."

A l’époque du premier album, Béatrice Martin avait invité Julien Doré à chanter avec elle sur la chanson Pour un infidèle. Aujourd’hui, c’est Sam Roberts, un chanteur canadien dont elle est "hyper fan", qui partage avec elle Loin d’ici, une chanson qui évoque une relation longue distance sur un air de country "à la Dolly Parton".

Autres invités sur l’album, les Rémois de The Shoes signent discrètement la réalisation du disco Golden Baby. Mais Blonde n’en demeure pas moins emprunt de la couleur des yéyés. "La musique des années 1960 est celle que j’ai écouté en grandissant. J’avais envie de faire cet exercice de style là, de reprendre cet aspect intemporel, je pense qu’il n’y a pas d’âge pour aimer ça. Il y a des gens qui écoutent du métal, d’autres du country, moi j’écoute du yéyé !"

A travers Paris

Blonde se réclame donc à la fois d’influences nord-américaines et francophones. Pourtant, si, dans Saint-Laurent, la chanteuse nous fait visiter Montréal la nuit au milieu des gens qui sortent tard le soir, c’est surtout Paris qu’on parcourt avec elle. Le trajet se fait de Pigalle (Ava) au Baron (Danse et danse), en passant par le IXe arrondissement (Hôtel Amour, en bonus). "L’Hôtel Amour, que je surnomme le néon rose, est comme un endroit formé de rêves, c’est un peu l’Hôtel Chelsea de Paris."

Mais c’est sur les bords de la Seine que l’on retrouve Cœur de Pirate courant dans Place de la République, qu’elle considère comme "la plus belle chanson" qu’elle a probablement écrite. "C’est mon Hallelujah. Je ne me compare pas à Léonard Cohen du tout, mais lui a Hallelujah, et moi j’ai Place de la République. C’est la seule chanson qui m’a fait cet effet quand je l’ai composée, et aussi quand je l’interprète."

Autant de titres comme une façon de revisiter sa vie ou ses peines en chansons. "J’ai grandi à travers Cœur de Pirate. C’était une expérience géniale, mais qui donne deux personnalités. Cœur de Pirate, sur scène, c’est comme si rien ne pouvait m’arrêter. Alors que finalement, je suis juste une fille, comme plein d’autres filles, qui fait des biscuits, de la photo, et qui aime les licornes."

Site de Cœur de Pirate

Cœur de Pirate Blonde (Barclay) 2011
En tournée et en concert au Bataclan à Paris le 8 décembre 2011 et au Casino de Paris le 19 mars 2012.