Laurent Voulzy, troubadour électro-pop
Laurent Voulzy crée la surprise avec Lys & Love, un nouvel album pop-électro médiévale, qui chante l’amour courtois, la France et l’Angleterre, et enchante. Revue de détail.
Depuis le début de sa carrière, on s’est habitué à ce que Laurent Voulzy sorte un disque de chansons originales en moyenne tous les dix ans. Pas mal d’attente en somme, et peu d’albums dans une carrière pourtant bien assise… Lys & Love était donc attendu comme Avril en son temps (2001), avec une certaine impatience, et beaucoup de curiosité.
Mais au-delà de la pop mélodique sucrée qu’on augurait, on y découvre avec stupéfaction des sonorités électro, presque expérimentales. Portées par un orchestre de cordes et des chœurs (enregistrés dans le donjon du Château de Vincennes) qui nourrissent les morceaux d’une solennité intemporelle, les nouvelles chansons de Laurent Voulzy gomment non seulement les frontières des styles musicaux, mais aussi celles du temps et de la géographie.
Lys & Love s’ouvre comme le livret d’un conte, plantant dans Le Tableau un décor en aparté. Il était une fois, au cœur du Moyen Age, les terres de France et d’Angleterre… Et, pour réconcilier ces deux vieilles sœurs ennemies, un Laurent Voulzy que sa rêverie fait "partir en 1400" sur fond musical tour à tour aquatique ou aérien.
Expatrié à mi-temps en Angleterre où il vit désormais avec sa femme et son plus jeune fils, il chante son éloignement en empruntant à Charles d’Orléans le premier vers de l’un de ses poèmes, En regardant vers le pays de France. Le chanteur s’y décrit "prisonnier volontaire" par amour, comme le poète en son temps, prisonnier de guerre, écrivait du fond de son cachot anglais.
On retrouve d’ailleurs la plume de ce dernier dans Ma seule amour, véritable bijou de l’album, avec ses chœurs liturgiques et la très jolie participation de Roger Daltrey, le chanteur des Who.
Un mélange des genres (d)étonnant et qui cartonne.
Si la plupart des autres textes ont été écrits par Laurent Voulzy lui-même, Alain Souchon n’est pas resté loin de son complice de toujours, puisqu’il signe quatre des textes de l’album, dont Jeanne, une histoire d’amour improbable distancée par les siècles.
On passe sans sourciller du français à l’anglais dans d’autres morceaux, comme dans le trip hop feutré de Our song, en duo avec l’américaine Dawn Landes. Voulzy fait également un crochet par le berceau de la musique pop : une partie du disque a été enregistrée dans le mythique studio 2 d’Abbey Road. Les guitares claires de La Nuit rappellent d’ailleurs celles des Beatles dans Blackbird.
La 9e croisade, composée sur un texte d’Abu Firas, prince poète et chevalier arabe du Xe siècle, nous fait, elle, voyager pendant pas moins de quatorze minutes entre prière et électro-trans arabisante !
Mais c’est véritablement un parfum médiéval qui se dégage de ce disque, avec ses notes celtes. On y retrouve d’ailleurs Nolwenn Leroy, pour qui Laurent Voulzy a déjà écrit plusieurs chansons et réalisé un album. On entend ici le galop d’un cheval, là un air de cornemuse, on retrouve ailleurs des évocations de la légende arthurienne et de l’île d’Avalon, où fut forgée Excalibur (Glastonbury, C’était déjà toi).
Un sacré mélange des genres qui n’empêche pas une belle réussite, pour cet album qui visiblement séduit, puisque Lys & Love s’est vendu à plus de 180.000 exemplaires en à peine quelques semaines. Et ce n’est qu’un début.
Laurent Voulzy Lys & Love (Columbia) 2011