Francofolies de La Rochelle 2011
La 27e édition des Francofolies de La Rochelle, qui se tient jusqu’au samedi 16 juillet, a débuté mardi. La première soirée sur la grande scène du festival a réuni Bernard Lavilliers, Nolwenn Leroy, Zaz et Christophe Maé pour une affiche voyageuse, qui a fait le grand écart entre les générations.
Sur la grande scène des Francofolies de La Rochelle, Bernard Lavilliers est comme en voyage. Alors, pour tenir la foule en haleine, il raconte ses histoires et ses rencontres : "En 1979, j’ai connu Bob Marley. Deux ans plus tard, il est mort. Le 11 mai 1981, j’ai compris ce qu’était le reggae et j’ai écrit ça." La chanson, Stand the Ghetto, est un standard du chanteur mais il est probable que mardi soir, une bonne partie des moins de 20 ans présents dans le public, ne la connaissait pas. Seulement, quand Stand the Ghetto s’est muée, par la grâce d’un bassiste facétieux en dance-hall rageur, on a vu des bras recouverts de mots d’amour destinés à Christophe Maé s’élever vers le ciel. Aux premiers rangs, les adolescentes qui attendaient jusqu’ici "Nolwenn" et avaient patienté avec Zaz, oubliaient un temps "Christophe" ; elles dansaient.
C’est peut-être un détail mais il semble que toute la soirée de mardi soir, qui ouvrait les Francofolies de La Rochelle, repose sur une image comme celle-ci. Rarement en effet dans un festival –même familial, comme les Francos-, on aura vu un tel écart entre deux, voire trois générations qui se retrouvent autour d’une même affiche variété, faite de musiques aux antipodes les unes des autres et d’univers hétéroclites. A Ours, le soin d’ouvrir avec des chansons et un rock soft, à Zaz, le swing et par moment, le rock, à Lavilliers, "les musiques tropicales" comme il dit et les causes à défendre, enfin, à Nolwenn Leroy, la Bretagne, et à Christophe Maé, le cœur. Faut-il y voir le signe que dans leurs 27 années, les Francofolies de La Rochelle ont encore changé et évolué ?
La Fête à Nolwenn
Alors que quelques années auparavant, c’est Lavilliers qu’on fêtait ici, cette année, c’est Nolwenn Leroy qui a eu sa Fête à... La chanteuse, dont l’album Bretonne est l’un des succès commerciaux de l’année en France, a interprété les classiques du répertoire breton (La jument de Michao, Dans les prisons de Nantes), des chansons sur sa terre (Brest de Miossec, Le bagad de Lann-Bihoué d’Alain Souchon), et puis Sunday Bloody Sunday du groupe irlandais U2. Alan Stivell est venu entonner –comme il se doit- Tri Martolod, mais impossible de ne pas voir encore en Nolwenn Leroy, l’une des gagnantes du télé crochet Star Academy.
A côté, l’autre fille de cette soirée, Zaz, passée elle par les Chantiers des Francofolies –l'anti Star Ac’ du festival, en quelque sorte- apparaissait autrement plus nature. Même quand elle se pique "de faire l’Aristochat" (dixit une spectatrice), son grain de voix remporte la mise. "Vous voulez… quoi ? Quoi ?", lance-t-elle au public. "Bonsoir" Après avoir mimé un faux départ, elle interprète son succès Je veux, c’est tout Saint-Jean d’Acre qui chante de…4 à 77 ans.
Christophe Maé
La musique bretonne, la salsa, le choro comme les musiques caribéennes… La musique noire aussi aura eu droit elle aussi à ses petits hommages. Avec "sa famille" de deux choristes et cinq musiciens, Christophe Maé s’est réapproprié dans un medley le Everyday People par Arrested Development, a laissé aller les rythmiques à la Stevie Wonder de sa chanson On trace la route. Il porte des gros chapeaux et ressemble un peu à J-Kay, le chanteur de Jamiroquaï, il joue de la guitare acoustique comme Jack Johnson, laisse sa voix traîner comme dans la soul, les adolescentes connaissent ses paroles par cœur mais ici, toute ressemblance avec des choses ayant existé n’est pas fortuite.
Quant aux autres soirées sur la grande scène ? Cette année, les Francofolies, dont on annonce déjà en coulisses qu’elles devraient "battre des records de fréquentation", ont resserré la programmation autour de soirées plus thématiques. Après deux soirs éclectiques et grand public mardi soir, 12 juillet, et mercredi 13 juillet, ce sera vendredi 15 juillet la soirée musiques du monde avec Asa et Tiken Jah Fakoly puis, la soirée électro, samedi soir, où Yelle et Katerine joueront avant David Guetta. Ceux qui voient là-dedans le signe que les Francos ont cédé aux sirènes du DJ à la mode peuvent se consoler. Mardi, ils ont pu entendre une fois de plus ce refrain fédérateur : "La musique a parfois des accords majeurs /Qui font rire les enfants mais pas les dictateurs / De n'importe quel pays, de n'importe quelle couleur/La musique est un cri qui vient de l'intérieur."*
*Noir et blanc de Bernard Lavilliers