Le groove acoustique de Gérald Toto

Le groove acoustique de Gérald Toto
© franck soury

Après avoir participé à plusieurs projets collectifs dont le fameux disque Toto Bona Lokua, suivi d'une tournée internationale, le Martiniquais Gérald Toto nous livre un album personnel emprunt de jazz et de folk, chanté en anglais, Spring Fruits.

"Le jazz fait définitivement partie de ma culture musicale. Ce titre, c’est une évocation en négatif, c’est l’écho de Strange Fruits mais pour dire qu’il y a toujours une renaissance. Cela veut dire aussi que le printemps, c’est à soi-même que l’on se l’accorde. On peut s’autoriser ce genre de printemps et de renaissance".
Joli printemps, joli renaissance donc pour Gérald Toto qui s’autorise avec Spring Fruits un album autrement plus gai et festif que le sombre et macabre Strange Fruits de la vénérée Billie Holiday. Les douze fruits à cueillir sur l’arbre inspiré de Gérald Toto sont bien plus festifs et juteux que le tube de la diva du jazz. Profitons-en ! Tant la production de ce chanteur antillais est éparse : quatre albums en treize ans dont un cosigné avec Richard Bona et Lokua Kanza, il n’y a rien d’excessif !Le musicien fait partie d’une génération (Ruan Rozoff, Sinclair, Bruno Maman) qui - à l’exception de M - pétrie de groove et d’inspiration anglo-saxonne n’a jamais véritablement percée auprès du grand public français.

Ici, avec cet album tout en anglais produit à la maison, Gérald Toto mixe allégrement les genres : de la simili-berceuse tendre et médiévale My Child au groove quasi-sahélien de Freedom qui aurait pu parfaitement voir le jour sur les rives de Ségou. "Shame on me !" s’exclame le chanteur "je ne connais pas l’Afrique. J’ai eu beau tourner avec Lokua Kanza et Richard Bona, je ne suis jamais allé en Afrique. Mais en revanche, j’ai toujours et très tôt écouté de la musique africaine à la maison, … du makossa, de la rumba zaïroise".
Des références que l’on retrouve en filigranes sur Spring Fruits au milieu de teintes reggae à la Stanley Beckford, Easily Get Lost ou hendrixienne Black Mary (à l’occasion, allez donc jeter une oreille sur sa reprise de If 6 was 9 sur l’album Les jours meilleurs qui date de 1998 !). Mention spéciale aussi pour Dive où l’on se noie dans l’onirisme des nappes vocales mêlées à sa guitare acoustique.
L’acoustique qui prédomine dans cet album où Gérald  Toto est superbement épaulé par le violoniste et pianiste franco-américain Alice Orpheus. "Je l’ai découvert sur MySpace. Et je me suis aussitôt dit qu’il fallait que je rencontre ce mec-là ! C’est l’enfant d’un couple qui a vécu dans une île grecque en communauté, puis à Fontainebleau… Il a eu mille vies entre Etats-Unis, Japon et Nouvelle- Zélande. Notre rencontre à tout de suite été très prolifique. On a travaillé jusqu’à pas d’heure, s’envoyant textes et notes à quatre heure du matin …"

Une débauche de notes et de rimes qui, de ces nuits de labeur, débouche sur un quatrième opus frais et savoureux comme un fruit mur de printemps.
 
Gérald Toto Spring Fruits (Mercoeur Music) 2011

Gérald Toto sur MySpace