L’afro-électro à la conquête du monde
L’afro-électro, la musique électronique africaine est en pleine effervescence. Les DJs et les créateurs pullulent et inspirent de plus en plus les Européens. État des lieux sur un phénomène en plein essor.
Lors de son passage à Paris fin mai pour la promotion de l'album Musica da terra, Batuk n’est pas passé inaperçu. Le combo emmené par le producteur et DJ sud-africain Spoek Mathambo a enflammé les esprits avec son afro-house subtile et sophistiquée. A ses côtés, Aero Manyelo a apposé ses rythmes envoûtants sur les voix de Nandi Ndlovu et de la Mozambico-Sud-Africaine, Carla Fonseca. Le combo revenait de Maputo où il a enregistré ce premier disque déjà culte en Europe chez les amateurs de transe africaine. Au-delà de la démarche artistique, Batuk c’est aussi une affirmation politique. "En Afrique du Sud, il y a des gens du monde entier, de l’Afrique entière, mais il y a aussi beaucoup de haine", explique Spoek Mathambo, "Et je serais heureux si notre musique pouvait rassembler ces gens".
Une musique d’un genre nouveau
Les DJs et producteurs européens d’électro et de house découvrent la puissance des rythmiques africaines qu’ils retravaillent inlassablement. L’Allemand Henrik Schwarz remixe les rois de la high life ghanéenne Pat Thomas et Ebo Taylor avec une certaine jubilation. Mais en matière d’exploration, le précurseur est anglais. Il se nomme Brian D’Souza, plus connu sous le nom de DJ Auntie Flo.
La musique de Brian D’Souza n’est pas une musique traditionnelle retravaillée par des DJs mais une véritable fusion où les instruments traditionnels, les boîtes à rythmes et les ordinateurs interviennent tour à tour. Le succès des High life world series est tel qu’il a inspiré des démarches similaires en France, avec le collectif Mawimbi, mais aussi aux Pays-Bas et au Canada.
Dans l'Afrique ultra moderne, une tendance psychédélique se dessine : l’afro-futurisme. Mouvement culturel venu d’Amérique dans les années 70, il propose une esthétique proche de la science-fiction soutenue par un discours mystico-religieux. Dans le champ musical actuel, il s’agit surtout d’une formidable énergie portée par les beats hip hop. Le Sénégalais Ibaaku et ses compositions psychédéliques font un tabac sur les dancefloors.
Le Tchadien Caleb Rimtobaye, surnommé le Daft Punk tchadien en raison du casque blanc qu’il porte sur scène a mis entre parenthèses sa carrière folk au sein du groupe H'sao pour créer AfrotroniX. Un concept qui mélange à la fois l’afro-électro, les chorégraphies et la vidéo créant ainsi des performances scéniques hors du commun.
L’afro-électro est devenue une valeur marchande mondiale, portée par le progrès technique et la circulation des sons sur les réseaux sociaux. Le développement d’internet a multiplié les possibilités de rencontres musicales tandis que la démocratisation des ordinateurs a offert aux jeunes des villes africaines une alternative aux instruments de musique, souvent encore trop coûteux. Urbaine, métissée et démocratique, l’afro-électro donne à entendre la bande-son d’une Afrique 2.0.
Compilation Cap Town beats (Jarring Effets) 2007
Site bandcamp de High Life World series
Midnight Ravers (Jarring Effects) 2016
Afrotronix SAOtronix (autoprod) 2015