Mbongwana Star, vaisseau musical de Kinshasa
Au royaume de la rumba, la musique que défend Mbongwana Star s'inscrit dans cette lutte pour proposer une autre voie que celle des cultures traditionnelles. Ce groupe à la fois jeune et expérimenté, car composé du Franco-Britannique Doctor L et en partie, d'anciens membres de Staff Benda Bilili, ne passe pas inaperçu avec son premier album From Kinshasa où l'électro rock côtoie l'énergie punk. Rencontre avec RFI Musique.
RFI Musique : Comment votre route a-t-elle croisé celle de ces musiciens congolais, dont certains ont appartenu au Staff Benda Bilili ?
Doctor L : Je me suis déjà rendu dans de nombreux pays d'Afrique. Ça faisait un bout de temps que j'étais intéressé d'aller au Congo, car Renaud Barret, qui a fait entre autres, le film sur Staff Benda Bilili, m'en a souvent parlé. Je viens donc de passer une année à Kinshasa. J'ai fait beaucoup d'allers-retours. Je n'ai pas fait qu'un album parce que je suis autant film-maker que photographe et musicien. Donc, je mets ce que je sais faire au service de ce projet. Par exemple, sur la pochette, tout ce que l'on voit vient de Kinshasa. Il n'y a rien de rapporté, rien d'occidental. C'est juste pour faire des liens entre les arts. Et moi, je passe mon temps à ça. L'idée n'était pas de faire un after Staff Benda Bilili avec d'anciens membres du groupe. On n'en a rien à faire de ça, en fait. C'est beaucoup plus intéressant. Ça parle de l'émergence des arts dans un endroit où tu ne t'attends pas à ce qu'il y en ait sous cette forme, parce que c'est plutôt urbain que traditionnel. Le reste est secondaire.
C'était même automatique. Quand je suis arrivé là-bas, j'ai bossé un mois avec eux et rapporté tous les enregistrements à la maison pour travailler deux mois dessus. Ensuite, j'y suis retourné et on a recomposé de nouveaux titres qu'on a ajoutés. Il y a un processus. L'album a été fait en deux fois. Il n'y a pas de préméditation : ni le style, ni le disque. C'est un peu comme le fait d'avoir sorti l'album avec Nick Gold (patron du label World Circuit, connu entre autres pour les Buena Vista Social Club) : un hasard, un accident. Il a eu le CD en boîte de nuit, à Londres, un soir, et il m'a rappelé trois jours après en disant que c'était le meilleur disque qu'il avait écouté depuis dix ans. C'est aussi simple que ça. Ça n'est pas fait "à la française", comme la plupart des projets musicaux en Afrique francophone : on n'a qu'à mettre untel et untel ensemble, comme un montage. Il n'y a rien de tout ça. Les musiciens congolais ne savaient pas qui j'étais. Ils n'avaient jamais entendu parler de moi.
Que ça avance. On a déjà composé la moitié du nouvel album en répétant celui-là. La créativité, c'est comme faire fonctionner sa tête, c'est permanent : il faut être actif pour que ça sorte. J'ai déjà travaillé avec de nombreux artistes puisque j'ai produit déjà une centaine de disques. Et quand il faut se mettre au boulot, beaucoup n'ont plus l'habitude. C’est un effort phénoménal, alors qu'il faut s'entraîner tous les jours, comme un sportif. Je crois aussi qu'une certaine liberté qui existait au Ghana ou au Nigeria dans les années 60 et 70, n'existe plus et on essaie de remettre les choses comme elles devraient être. Quand je suis sur scène avec eux, je peux dire qu'ils sont plus rock que moi. Le live est beaucoup plus énergique que le disque, qui est une synthèse pour que ce soit écoutable à la radio.