Tcheka

Tcheka

Dans la famille des artistes capverdiens dont la carrière possède une dimension internationale, Tcheka occupe une place singulière quasi paradoxale, à la fois à l’avant-garde mais aussi un peu en retrait. A 38 ans, avec son album Dor De Mar, l’ancien lauréat du prix Découvertes RFI conforte cette position sans parvenir à effacer parfois ce goût frustrant de potentiel sous-exploité.

Quand on vient d’un archipel posé en pleine mer, à l’image du Cap-Vert, regarder vers la ligne d’horizon et imaginer ce qu’il y a derrière fait presque partie du mode de vie, quelque part entre rêve et méditation. En 2007, Tcheka avait laissé ses envies traverser l’Atlantique, en direction du Brésil où il avait confié les chansons de l’album Lonji aux soins du chanteur guitariste Lenine, investi du rôle de producteur (voir le nom du révolutionnaire soviétique associé à celui de l’ancêtre du KGB avait aussi de quoi faire sourire !). Et la même année, il avait effectué la tournée nord-américaine de Cesaria Evora, jouant en première partie de la Diva aux pieds nus.

Mais après cette montée en puissance régulière soutenue par l’attribution du prix RFI Découvertes fin 2005, l’homme de Santiago s’est fait plus discret. Pour Dor de Mar, il a joué cette fois la carte de la proximité et enregistré sur l’île voisine de Mindelo l’essentiel des douze titres, tous de sa composition à l’exception de Forti Bu Dan Cu Stango ! créé il a plusieurs décennies par son compatriote Norberto Tavares installé aux États-Unis.

Le décor acoustique que plante l’artiste avec sa guitare et son chant permet d’entrer facilement dans cet univers éthéré, pur. Le voir soudain s’électrifier sur Moça de Classe ajoute une pointe d’audace qui fonctionne aussi très bien. Sur Pexera Porto, l’accordéon vif et délicat du Malgache Régis Gizavo – lequel a notamment accompagné Cesaria Evora – apporte une profondeur de champ bienvenue.

Même remarque pour Faka Na Prega, avec la trompette discrète mais si présente, à la façon d’un Miles Davis, jouée par le jazzman français Antoine Illouz. Progressivement, chanson après chanson, on réalise alors que les histoires de Tcheka se terminent trop vite et qu’elles méritaient peut-être un autre traitement, en laissant davantage les musiciens s’exprimer.

Tcheka Dor De Mar (Lusafrica/Sony) 2011
En concert à Paris au Café de la danse le 4 novembre 2011