Festival Gnaoua d’Essaouira, une histoire africaine
Du 12 au 15 juin, la ville d’Essaouira au Maroc a accueilli la 17e édition du Festival Gnaoua et des musiques du Monde. Nous avons suivi ce rendez-vous qui a amené la tradition musicale marocaine sur scène et lui a permis de fusionner largement avec d’autres musiques.
Le soleil s’efface sur les tours de l’ancienne Mogador et les drapeaux marocains flottent à l’horizon. En ce début de soirée, la place Moulay Hassan est noire de monde et c’est un peu comme si toute la ville d’Essaouira avait afflué là : jeunes et moins jeunes, parents et grands-parents, enfants et très petits enfants… Tous ont pris place pour assister aux derniers moments du Festival Gnaoua et des musiques du Monde dont la 17e édition s’est achevée dimanche 15 juin devant des milliers de personnes. Alors qu’un peu plus tôt dans la journée, la cité semblait vivre au rythme de son activité touristique, ses remparts sont balayés à cette heure par le géant malien Bassekou Kouyaté, le Maâlem gnaoua Hamid El Kasri, et leur vingtaine de musiciens.
"Tout le répertoire traditionnel marocain n’est pas une musique de scène, le concept même de festival au Maroc est quelque chose de très récent. Notre culture est celle des moussems, nos fêtes foraines, c’est-à-dire la rencontre des villageois dans une fête agraire où la musique est produite en plein air", observe le musicologue Ahmed Aydoun, qui a réalisé une anthologie de la musique gnaoua.
______________________________________________________________
Mario Canonge : D’abord, il y a eu cette première partie où j’ai joué mes morceaux, en trio. Quand on est comme ça, en petite formation, c’est vrai que je plus l’habitude des salles plus petites que des grandes scènes d’un festival. Et puis, il y a cette deuxième partie, où nous avons partagé la scène avec le Maâlem Kouyou et les Gnaouas, et avec eux, il y a eu je crois, des instants magiques, de transe, tant cette musique a quelque chose de spirituel. Elle est dans une rythmique hors d’âge qui vient du fond des temps.
De quelle façon arrive-t-on à une alchimie entre le piano de votre jazz caribéen et les crotales ?
Par l’écoute, par le fait d’entrer en communion avec les musiciens. Ensuite, on se laisse aller jusqu’au moment où on arrive tous sur le même bateau et qu’il voyage. Pour moi, ce qui était important, c’était de comprendre comment ça marche, sans imposer notre façon de voir les choses, de me fondre dans la compréhension de cette musique. Même s’il y avait cette notion d’improvisation, c’était le contraire d’un bœuf où chaque musicien se met en avant à moment donné.
C’est la première fois que vous donnez un concert au festival gnaoua. Comment avez-vous découvert cette musique ?
J’avais déjà entendu parler de cette musique grâce à Karim Ziad (l’un des programmateurs du Festival Gnaoua d’Essaouira, NDLR), qui a fait beaucoup pour qu’on la connaisse à Paris. Mais l’entendre sur disque, c’est une chose, et jouer avec les musiciens sur scène, c’en est une autre. C’est une expérience qui nous pénètre, qui nous transporte, qui nous élève. En plus du festival, il y a cette ville, qui est un décor pour les Mille et une nuits, et je remarque aussi qu’il y a tout un mélange de cultures, il y a des gens qui viennent de partout et tout se fait dans un esprit assez ouvert. Essaouira, ça peut être une leçon pour énormément de choses qui pourraient être plus politiques mais je m’arrête là…
Site du Festival Gnaoua et des musiques du Monde