Depuis la métropole québécoise de Montréal, au Canada, où réside une importante communauté haïtienne, le groupe Ti Kabzy porte les couleurs d’un kompa affranchi, en phase avec son époque, jouant le rapprochement avec les Petites Antilles. Son nouvel album s’intitule Elektro Konpa.
Quitte à surprendre une partie de son public, comme en attestent les messages postés par quelques fans du groupe sur sa page Facebook, Ti Kabzy aime que création rime avec innovation. Depuis son premier disque il y a quinze ans, la formation montée par Jean-Sébastien Duperval reste fidèle sa vision d’un kompa hybride, modifiable à sa guise comme une "pâte à modeler", selon les termes du chanteur Alain Lanoue.
A commencer par la langue utilisée, et en l’occurrence le français dans de nombreux textes de ce cinquième album studio. Ce n’est pas parce qu’on est haïtien et qu’on fait du kompa qu’on doit nécessairement chanter en créole, disent-ils en substance, citant l’exemple de leurs homologues basés aux Etats-Unis qui se servent de l’anglais.
L’aspect électro qu’ils revendiquent, au point d’en avoir fait un élément du titre de leur nouveau CD, se définit surtout par un usage immodéré des claviers dans certaines séquences, et se traduit par un déferlement frénétique de nappes et autres sons synthétiques, au besoin saturés. Avec parfois des accents baroques plein d’emphase. L’expérience du live, certainement (dans sa carrière, Ti Kabzy a sorti trois DVDs et quatre albums enregistrés en public) s’entend aussi dans les mises en place taillées pour la scène, dans la façon de jouer ensemble.
Pour ce nouveau projet, contrairement à la méthode de travail en commun qu’ils avaient adoptée auparavant, chacun des trois membres a développé ses propres idées sur quatre morceaux. "Dans les albums de kompa, on a parfois l’impression d’écouter le même morceau, les mêmes histoires, alors que cette approche nous a permis d’obtenir un album plus coloré, diversifié", estime Alain Lanoue.
La frontière avec le zouk love semble bien ténue sur quelques titres, dans la musique comme dans le chant et les mots ("Le matin quand je me lève, c’est ton visage que j‘ai envie de voir", sur Tu me manques). Ce rapprochement avec les Antilles françaises ne date pas d’aujourd’hui : en 2004, le groupe canado-haïtien y avait connu un joli succès avec Relax. Cette fois, sur Les Femmes, premier single du nouvel album, ils ont invité le Guadeloupéen Young Chang MC, valeur montante de la scène dancehall locale.
Ti Kabzy Elektro Konpa (Aztec Musique/Rue Stendhal) 2012