Majid Bekkas édifie des ponts

Majid Bekkas édifie des ponts
Majid Bekkas © DR

Marqué à l’origine par l’univers rituel de la musique gnawa, évoluant souvent dans le monde du jazz, le Marocain Majid Bekkas ajoute sa pierre au village global avec Al qantara, un album en trio qui entend relier des civilisations voisines.

Après avoir dialogué avec le joueur de kora sénégalais Ablaye Cissoko pour l’album Mabrouk, il y a deux ans, cette fois c’est une discussion à trois que Majid Bekkas a voulu enregistrer, restant fidèle à ses intentions multiculturelles. La démarche est reflétée par le nom de ce nouveau projet : Al qantara, en arabe, signifie “le pont”.

L’édifice musical relie à la fois l’Afrique, l’Orient et l’Occident. Au-delà du concept, il y a surtout une envie née en 2011, lors d’un concert au club Porgy & Bess, à Vienne, en Autriche. Ce soir-là, le Marocain quinquagénaire avait invité son complice et compatriote percussionniste Khalid Kouhen, à ses côtés depuis African Gnaoua Blues en 2001, et le souffleur belge Manuel Hermia, appelé parfois à remplacer Louis Sclavis pour l’album Makemba en 2010.

La formule d’un soir s’est avérée si prometteuse que Majid Bekkas a voulu aller plus loin. Le temps d’une résidence d’une semaine à Rabat afin de "sentir la musique", préparer les morceaux, lisser aussi les inévitables obstacles apparus en raison de leurs influences respectives au cours, et ils ont pris la direction du studio.

"Je suis toujours pour qu’il y ait une partie écrite et une partie libre, d’improvisation", explique le natif de Salé. S’il a appris comment utiliser le guembri auprès d’un maâlem, un maître, et faire sonner les cordes de cet instrument entendu dans son enfance au cours de tant de soirées de transe gnawa, il a aussi satisfait par la suite son penchant pour le rhythm'n'blues et la soul en apprenant la guitare. Pour mieux mettre les connaissances acquises au service de la tradition, assure-t-il. Et la faire connaitre par les échanges, comme l’ont fait Ravi Shankar ou Paco de Lucia.

Emprunté au répertoire patrimonial, Bania sert donc à monter sur le pont dessiné par les dix autres morceaux d’Al qantara, dont une reprise de Guinea du trompettiste Don Cherry. La traversée, au total, dure une bonne heure et s’achève sans que l’on soit pressé d’ouvrir les yeux.

Majid Bekkas Al qantara (Igloo records/RFI Talent) 2014
Site officiel de Majid Bekkas
Page Facebook de Majid Bekkas

A lire aussi : Abdelmajid Bekkas, inspiration gnaoua (13/06/2002)