Ils ont connu la gloire, multiplié les tubes FM, vendu des camions entiers d'albums au début des années 2000. Après une absence de dix ans et des projets parallèles qui n'ont pas connu le même écho, les quatre membres de Kyo se sont retrouvés. Et leur nouvel album L'équilibre est placé sous le sceau de l'efficacité. Rencontre.
RFI Musique : Pourquoi avoir mis le groupe entre parenthèses il y a dix ans ?
Benoît Poher : Déjà physiquement, nous étions fatigués. On avait enchaîné les dates sans trop se retourner. Et puis, il y avait une forme d'excitation qui avait un peu disparu. La flamme s'était quelque peu éteinte.
Florian Dubos : Au début, on voulait que cette pause dure deux ans, connaître d'autres expériences comme Empyr, écrire pour d'autres et travailler avec d'autres musiciens. Finalement, on n'a pas vraiment vu les années passer.
Ne faut-il pas un certain courage pour se mettre en danger en pleine gloire ?
Benoît : On peut le voir comme ça. Cela s'est vraiment imposé à nous. Nous ne sommes pas accros au succès et à ce style de vie. C'est peut-être délicat de dire ça, mais nous étions tout aussi bien dans nos baskets durant ces années où nous étions moins médiatisés.
Florian : C'est ce qui nous paraissait le meilleur choix pour préserver Kyo. On avait peur de s'abîmer si on continuait.
Une envie aussi d'aller vers un son plus métallique en montant le groupe Empyr ?
Benoît : C'est la raison pour laquelle on l'a fait à ce moment-là. On avait vraiment besoin de cela. Cela aurait été débile de chanter en anglais avec Kyo ou qu'il devienne un groupe de métal. On voulait quelque chose de plus animal et de plus violent. On avait commencé à creuser ce sillon sur l'album 300 lésions et sur scène.
Quelle est la plus grande fierté de vos projets parallèles ?
Benoît : Quand la chanson d'Empyr
It's gonna be a été choisie pour le teaser d'une saison de la série
Les Experts-Manhattan, on était sur le cul. Après quand tu entends aussi
Johnny Hallyday chanter tes paroles (
Ma religion dans son regard), ça te fait aussi un truc bizarre.
Ce retour était-il programmé de longue date ?
Florian : On attendait une sorte d'atmosphère qui fasse que ce soit le bon moment. La porte a commencé à s'ouvrir il y a trois ans. On a d'abord jonglé avec nos plannings respectifs et on a fini par composer une cinquantaine de chansons en deux ans.
N'avez-vous pas craint que vos fans soient passés à autre chose ?
Benoît : Lorsque tu adores un groupe dans ton adolescence, ça reste en général gravé. Moi si les Smashing Pumpkins sortent un disque, je l'achète tout de suite. Il y a un côté affectif qui s'inscrit dans la durée. Cela rappelle des souvenirs, une époque.
Florian : Je pensais qu'il y aurait moins de gens impatients. En fait, on nous attendait avec beaucoup plus d'intérêt que je ne le croyais.
Que répondez-vous à ceux qui clament qu'il s'agit d'un retour opportuniste ?
Benoît : En toute honnêteté, on n'a pas d'énergie négative par rapport à ça. Le succès était très violent à l'époque. Nous étions très jeunes et nous prenions assez mal les propos néfastes à notre égard. C'était à vif. Aujourd'hui, les critiques ne nous font plus rien.
Florian: Même si ce n'est pas le cas, c'est naturel que certains pensent que c'est un coup. Comme Empyr n'a eu pas une résonance médiatique très forte, il y a des gens qui pensent que nous sommes revenus à Kyo pour cette raison.
Pourquoi avez-vous fait le choix de réaliser votre disque par Mark Plati (Bashung, Bowie, Catherine Ringer, The Cure...)?
Benoît : On ne le connaissait pas. C'est notre éditeur qui nous a parlé de lui. Il lui a envoyé trois titres dont Le Graal et L'équilibre. Mark a été très réactif. Le mélange de son CV et de son engouement nous a convaincus. On a fait un essai de cinq jours au mois de juin et à mi-chemin, on a foncé. C'est un mec qui a la grande classe.
Dans la chanson Poupées russes, vous dites : "300 lésions et les rideaux se ferment... Il y a le point de contact et le point de rupture. Et dans la rue, le manque de tact et il y a les injures". Ce n'est pas innocent de mettre ce titre en ouverture ?
Benoît : Ce n'est pas ce qui a déterminé sa place dans le disque. C'est davantage la façon dont le morceau démarre, sans intro et avec le texte en avant, qui a fait que le titre soit en ouverture. On voulait une entrée directe dans la chanson. Dans la rue, j'ai rencontré un fan pour qui j'étais un demi-dieu et 10 mètres plus loin un homme qui m'insultait en marmonnant dans sa barbe. Dans les deux cas, c'est démesuré. Ce n'est que de la musique !
Peut-on dire que le morceau Le Graal a dérouté une partie de vos fans ?
Florian : Si on prend Le chemin et Contact, c'est assez différent. On a toujours fait de petits écarts. Se renouveler, cela fait partie aussi de l'identité de Kyo.
Benoît : Après cette absence, on avait à cœur de proposer quelque chose qui surprenne. Jusqu'à présent, on n'avait pas fait beaucoup de titres dansants.
Cette chanson, c'est un constat actuel sur la quête de jeunesse éternelle...
Benoît : Je l'ai écrit à un moment où on faisait énormément la fête. Chaque lendemain, je regrettais et je me rendais compte qu'on n'avait plus vingt ans (rires). Trois membres de Kyo sur quatre sont désormais père. C'est difficile de conjuguer esprit jeune et responsabilités.
L'attente sera-t-elle moins longue pour le prochain disque ?
Benoît : Je pense même qu'il arrivera assez rapidement.
Kyo L'équilibre (Jive Epic / Sony Music) 2014
Site officiel de Kyo