Bigflo et Oli, rappeurs sympas à mille lieues des gangstas
À mille lieues des postures du gangsta rap, bling-bling et vulgarité en bandoulière, Bigflo et Oli, tous deux passés par le conservatoire, redonnent un nouveau souffle au rap français. Depuis leur premier album La cour des grands certifié Disque d’or en septembre 2015, les deux frères Florian et Olivio originaires de Toulouse, sont sur les routes et enchaînent les festivals de l’été : Solidays, Francofolies de La Rochelle, Paléo Festival de Nyons, ou encore Arènes de Nîmes.
RFI Musique : Votre album a été sacré Disque d’or. Vous avez joué deux fois à l’Olympia et vous vous produisez dans les grands festivals de l’été. Vous avez intégré très rapidement cette "cour des grands" ?
Bigflo et Oli : On ne se considère pas encore dans la cour des grands. Entre nous, on se dit qu’on y a glissé un pied. On a encore beaucoup de choses à prouver même si on est un peu dépassé par le succès du premier album. On vit une belle aventure entre frérots.
C’est celle de nos idoles, de ceux qui nous ont poussés à écrire. Ce sont tous ces concerts qu’on a vus à la télé, tous ces festivals qu’on rêvait de faire, et qu’on est en train de faire petit à petit. Lorsque nous étions jeunes, nous écoutions beaucoup de rap. On s’était même créé une sorte de mythologie, dans laquelle les rappeurs sont des demi-dieux sur leur mont Olympe. C’est pour cette raison qu’on a intitulé l’album La cour des grands. On peut citer des artistes comme IAM, Orelsan qu’on a beaucoup écouté, Youssoupha, Oxmo Puccino...
Le rap, c’est toute notre vie, on a tout misé dessus. On ne s’est jamais dit entre frères "Vas-y, on fait un peu de rap et on verra bien si ça marche". On s’est toujours dit qu’on vivrait de la musique, que ça serait notre métier. À l'école primaire, et plus tard, les copains marquaient les métiers qu’ils exerceraient un jour et nous on mettait "rappeur". Les gens nous disaient que ce ne serait pas facile.
En ce moment, il y a la vague d’un rap un peu plus festif, un peu plus dans la démonstration, dans les gros sons, dans celui qui sera le plus méchant. Nous, on arrive avec nos chansons et on essaye d’apporter du neuf dans les productions. On prend ce qui se faisait le mieux avant : le fait de raconter des histoires et de jouer avec un MC qui scratche sur scène. Mais on rajoute aussi ce qu’on est, tout en essayant d'imaginer l’avenir.
C'est étranger, car on l’a écrit avant les événements du 13 novembre. Lorsqu'il y a eu ces attentats, on s’est dit qu’il résonnait encore plus, mais on a décidé d’attendre un peu avant de le sortir.
On parle des musulmans dans la chanson, mais pas que ! On veut parler de tout le monde. On a des amis qui viennent de tous les milieux : musulmans, chrétiens, juifs… On ne veut pas délivrer une morale, parce qu’on ne l’a pas, parce qu’on est jeunes. On veut juste poser des questions.
On se met dans la peau de personnages et toutes les quatre phrases, le personnage change. Ici, on décrit un Français qui a peur pour son identité, mais on n’est pas forcément d’accord avec ce qu’il dit. On a voulu présenter des points de vue différents. Notre père est argentin, notre grand-mère paternelle est chrétienne à fond, elle nous faisait d'ailleurs des chansons sur les anges gardiens. Notre grand-mère maternelle est musulmane et nos parents sont athées ! On pense qu’il y a de la place pour les racines, et il y a même de la place pour les fruits !
En tout cas, c’était original d’être rappeur au conservatoire. Les autres nous regardaient un peu bizarrement. Mais on a eu la chance de jouer dans un orchestre. On a pris des cours de solfège. Une grande partie de nos amis joue du violon, du violoncelle, ils se produisent dans des quatuors classiques. On n’a pas la prétention de dire qu’on est de grands musiciens, mais sur scène on a embarqué un pote violoncelliste qu’on a rencontré au conservatoire. Oli est à notre connaissance le seul rappeur qui passe du rap à la trompette en France. On n’a jamais eu de complexes, on a toujours mélangé.
On joue avec la posture qu’il y a dans le rap. Même nos potes, qui se mettent à rapper, prennent un air méchant et disent qu’ils ont des grosses voitures alors qu’on les connaît et qu’ils roulent en Twingo ! On a voulu jouer avec ça plutôt que se moquer. On n’a pas de complexes ! On arrive dans le rap avec nos deux têtes un peu bizarres. On fait du rap tantôt marrant, tantôt sérieux. Même si tu ne viens pas de tel milieu ou tu n’as pas eu tel vécu, tu peux rapper, ce sera toujours intéressant. C’est plus une affirmation qu’une dénonciation.
D'ailleurs, merci pour le soutien et gros big up à ceux qui nous écoutent hors de France, on espère venir les voir. On reçoit pas mal de messages sur notre page Facebook d’Afrique, du Gabon, du Niger, du Sénégal, on sait que les Africains adorent le rap français et nous aussi, on aime l’Afrique !
Page Facebook de Bigflo et Oli