Transmusicales de Rennes, portées par la musique

Transmusicales de Rennes, portées par la musique
3SomeSisters aux Transmusicales de Rennes © B. Brun

La 37e édition des Transmusicales s'est déroulée à Rennes, du 2 au 6 décembre, en dépit d'un contexte général encore tendu. Moins d'un mois après les attentats terroristes qui ont touché Paris, le rendez-vous breton n'a pas failli à sa réputation de grand défricheur de la musique en France.

À l'entrée du Parc des expositions de Rennes, le contrôle est plus serré que d'habitude : des agents de sécurité accueillent le public d'un sonore : "On ouvre les sacs ! Les sacs ! S'il vous plaît... " et procèdent à une palpation de tout le monde. Un mois à peine après les attentats terroristes qui ont touché Paris, les Transmusicales ont renforcé leur dispositif de sécurité et pris des mesures pour que la fête continue. 

"Le soir des attentats, j'étais au concert de Thylacine à l'UBU, raconte Jean-Louis Brossard, le co-directeur et programmateur du festival breton. D'abord, ça a été un gros choc. La première chose à laquelle j'ai pensé, c'est : 'Putain ! Avec un événement comme ça, est-ce que les Trans pourraient ne pas se faire ?' Mais la Mairie et la Préfecture ont dit 'On continue !' et puis, j'ai reçu plein de messages de sympathie de la part des musiciens qui avaient envie de jouer."
 
De mercredi jusqu'à dimanche soir pour un dernier tour de piste, tous les étaient bien là et la 37e édition des Trans a réuni dans la lignée des éditions précédentes quelques 60000 spectateurs – fréquentation en légère baisse, mais qui n'inquiète pas les organisateurs.
 
"Une culture musicale énorme"
 
C'est qu'au creux du mois de décembre, les Trans sont un festival d'irréductibles qui donnent à entendre ce qu'on n'entend pas ailleurs. Créées en 1979 pour mettre en lumière la scène rock rennaise, elles ont vu éclore tous les courants musicaux qui ont marqué la pop ces trois dernières décennies (hip hop, musiques électroniques...) et proposent aujourd'hui, une programmation exigeante qu'on guette fébrilement, tout en sachant qu'au mieux, deux ou trois noms seront déjà passés par nos oreilles.
 
Une soirée type, ici-bas, ici même ? Elle peut commencer par de la pop anglaise funky, s'arrêter devant du blues touareg, du hip hop sud-africain et se terminer en dansant sur les basses d'une électro exotique venue d'on ne sait trop où. Les découvertes du jour sont aussi bien souvent celles de la saison ou des décennies à suivre, puisqu'on se souvient ici des débuts de Björk, de Nirvana, de Noir Désir ou de Stromae.
 
À propos des manières du festival et de son patron, une moitié du duo Paradis, Pierre Rousseau, constate : "L'ambiance est très familiale, très rassurante. On nous a fait nous sentir chez nous. Jean-Louis Brossard a une culture musicale énorme et une capacité à faire des remarques qu'il associe de suite à des anecdotes, à des artistes qu'il connaît intimement. Lors des premiers concerts, il nous a rassurés. Il nous a parlé de Daho, de toutes ces choses-là."
 
Au bout de la nuit
 
Succédant à Jeanne Added, le jeune groupe parisien d'électro-pop a investi pour cinq soirs le théâtre de l'Aire Libre. Encore -très / trop ? - frais émoulu sur scène, il demande encore à s'affirmer, si bien que sa création sera passée au second plan par rapport à celle de Superpoze, Dream Koala et l'orchestre C O D E (voir ci-dessous). Alors que l'an passé, les Transmusicales avaient alterné entre électro et souvent, un côté afro, elles ont été multiples cette année. 
 
Les 3SomeSisters, qui ont accompagné Yael Naïm comme choristes sur sa dernière tournée, ont ainsi joué une électropop tribale pas banale. Ces trois garçons et une fille aux allures de femmes à barbe se jouent des genres musicaux et du masculin/féminin avec des polyphonies manquant peut-être de mélodies fortes, mais pas de singularité. Les Malgaches de Dizzy Brains ont fait du bruit, avec leur punk qui rappelle la fureur d'Iggy Pop and the Stooges. Quant aux Thaïlandais de Khun Narin's Electric Phin Band, c'est une véritable curiosité psychédélique.
 
Le milieu de la nuit nous aura ensuite laissés sur le reggae électronique de City Kay mais à deux heures du matin, la fête commençait juste dans les halls bondés du Parc Expo ; elle ne devait s'achever qu'à l'aube.
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Trois noms, une création
 
L'un des jeunes prodiges de l'électro français, Superpoze, le chanteur Dream Koala et l'ensemble orchestral C O D E, ont présenté jeudi 3 une création exceptionnelle aux Transmusicales. Une aventure au long cours pour un concert d'un soir.
 
Ce jeudi, ils étaient douze sur scène, mais il y avait trois noms à l'affiche : Superpoze, Dream Koala, et C O D E. En fusionnant leur talent respectif, le beatmaker originaire de Caen, le chanteur et DJ franco-brésilien, et le collectif de musiciens d'orchestre venus du classique ont imaginé un concert dans lequel l'électro et la musique orchestrale ont frictionné.
 
"C'est un re-travail. Ça ressemble à un remix, résume Jérémy Arcache, le chef d'orchestre de C O D E. On a mélangé les chansons de Dream Koala, les morceaux de Superpoze, à l'univers de C O D E." L'idée de Gabriel Legeleux, alias Superpoze, et du jeune Yndi Da Silva, alias Dream Koala, a mis du temps à voir le jour : il a fallu une bonne année de travail pour que cette amitié ne se transforme en une heure de musique, grâce notamment à l'ancien membre de Revolver, Jérémy Arcache, et ses comparses.
 
Ils parlent d'un "vocabulaire commun" qui a rassemblé un musicien autodidacte, Dream Koala, à d'autres issus du conservatoire ( C O D E, Superpoze) et qui s'est au retrouvé autour de la musique progressive. "Que ce soit la musique de Philip Glass, la techno allemande, le post-rock, la musique psychédélique, c'est l'idée d'un thème qui progresse, qui prend son temps", explique Superpoze. D'un échange à l'autre, c'est "une histoire" qu'ils ont écrite à toutes ces mains.
 
Originale, imaginative et ô combien audacieuse, cette création planante faite de climats bleutés et d'ambiance évoquant le trip hop, ne devait être jouée que pour ces Transmusicales, on espère pourtant qu'elle aura des suites.
 
Site officiel des Transmusicales de Rennes
Page facebook de Superpoze