L’épopée Blankass

L’épopée Blankass
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Plus de 20 ans après le début de Blankass, et 30 après leurs premiers pas dans la formation punk Zéro de Conduite, les deux frères Guillaume et Johan Ledoux, pivots du groupe, livrent une galette haute en couleurs, en riffs rock et en touches électro, le tout mixé par Mark Plati (Catherine Ringer, David Bowie...). Rencontre avec l’aîné de la fratrie, Guillaume, qui à dos de Chevals, nous raconte leur aventure musicale !

RFI Musique : Votre titre, Les Chevals, a-t-il un quelconque rapport avec votre album ? Guillaume Ledoux : Strictement aucun ! Ce choix se passe d’explication logique ou intelligente. Cet album nous a surpris car nous n’avions absolument pas prévu de l’enregistrer. Les morceaux se sont imposés d’eux-mêmes, sans qu’on les cherche : régnait, sur la création, une sorte de folie douce, qui seyait à notre goût de l’absurde, façon Monty Python. On cherchait donc un titre qui n’ait aucun rapport. Et lorsque mon frère Johan nous a proposé Les Chevals, que son gamin avait prononcé quelques jours auparavant, on a trouvé ça tellement débile, qu’on s’est dit "c’est très bien !"...

Vous n’aviez pas prévu d’enregistrer cet album ?
Non ! Sans avoir arrêté l’aventure Blankass, on planchait, Joahn et moi, dans notre studio à Bourges sur nos projets respectifs d’albums solos : je m’orientais vers un univers de chansons intimistes, mon frangin vers des pistes plus pop... Puis Johan m’a proposé spontanément un titre pour Blankass, puis deux, trois, quatre... Et finalement, on a sorti un album qu’on avait plutôt prévu initialement pour 2013/2014.

Cette absence de préméditation a-t-elle modifié votre façon de travailler ?
En fait, c’est le tout premier album qu’on fait vraiment tous les deux avec Johan ! On a présenté au reste du groupe un album quasi terminé. On avait donc une immense marge de liberté. On ne s’interdisait rien : on a essayé tous les sons – rock, électro...– sillonné toutes les directions, exploré toutes les pistes, même les plus éloignées de nos habitudes. Et, au final, on a fait le tri, on a gardé l’efficace, la substance... Et puis, je voulais un album qui danse, qui soit moins dans la narration, plus dans l’énergie !

Pourquoi avez-vous quitté Warner pour un petit label indépendant ?
En réalité, le choix ne portait pas tant sur le désir de travailler avec une petite structure que sur le rêve, qui nous titillait depuis longtemps, de s’autoproduire. Mais on s’est rendu compte qu’on ne pouvait pas tout faire nous-mêmes : on a alors fait appel au label At(H)ome, spécialisé dans l’aide apportée aux groupes qui souhaitent obtenir leur indépendance. L’idéal !

Si l’on compte le groupe Zéro de Conduite, fondé en 1981, cela fait 30 ans que Johan et vous-même êtes musiciens. Comment avez-vous évolué ?
A chaque projet, il s’agit d’un éternel recommencement. Hormis quelques détails techniques que l’on gère désormais, il ne faut jamais se dire qu’on est arrivé : on ne maîtrise jamais rien totalement ! Je pense qu’il faut toujours se voir comme une découverte... Et c’est ce qui rend l’aventure passionnante ! Au fil des expériences que tu crois connaître sur le bout des doigts, tu te rends finalement compte que tu ne sais rien, et qu’il faut toujours rester humble. A 40 balais, des notions que tu jugeais importantes deviennent dérisoires, telles les questions d’égo. Tu te rends alors compte qu’il y’a des réalités plus essentielles que ta petite gueule. Donc tu continues ton métier, ce que tu as à faire et comme tu sais le faire...

Vous considérez la musique comme un simple métier ?
Oui, même si c’est aussi notre passion ! Bien sûr, il y a, dans ce boulot, des événements un peu extraordinaires, comme monter sur scène, enregistrer des disques, passer à la radio... Mais sinon, c’est un job comme un autre, ni plus génial, ni plus exceptionnel, dans lequel nous sommes tombés quand on était ado. Alors, on assure notre métier, comme d’autres exercent le leur, toute leur vie, avec honnêteté et sincérité. Quand tu cours après des chimères, des illusions, que tu veux briller, tu risques de raccrocher les gants rapidement. Nous, on gagne notre croûte, simplement, certes de manière très agréable, mais avec un but quotidien : faire des compositions qui sonnent, et de qualité.

Comment a évolué, selon vous, le monde de la musique depuis vos débuts ?
Je trouve que les labels, le public et les musiciens se prennent plus au sérieux : on se marre moins, il y a moins de spontanéité, de rock’n’roll... Surtout, je déplore qu’aujourd’hui, la musique serve trop souvent à vendre des téléphones portables ou des assurances... Les gamins la considèrent comme de gros paquets de sons téléchargés en vrac dans leur Ipod. Il n’y a plus d’identification ! Nous, on s’identifiait à nos héros, nos idoles... Et puis, je ne trouve pas terrible que l’intégralité de notre album se retrouve trois jours avant sa sortie sur Deezer.

Vous ne ressentez aucune lassitude quant à votre carrière ?
Mais non ! On adore la musique, c’est pour cela qu’on continue, au jour le jour, sans se poser de questions, malgré les galères, les engueulades entre frères, les soucis financiers... C’est un cadeau de la vie ! Et lorsque nous avons fait notre concert de pré-lancement d’album (17 nov. dernier, ndlr) à Issoudun, notre ville natale, celle qui a vu nos débuts lorsque nous étions gamins, c’était vraiment génial ! Un bond dans le temps !

Le site de Blankass

Blankass Les Chevals (At(H)ome/Wagram) 2012
En tournée en France à partir de mars et en concert à Paris le 6 avril à la Cigale à Paris