Malavoi

Malavoi
© RALPH GATTI / AFP
Passeport artiste
Date de création:  1972
Pays:  France
Langue:  Créole
Qualité:  Auteur / Chanteur / Compositeur
Genre musical:  Chanson / Musique antillaise

Deux groupes ont marqué la scène antillaise de ces vingt dernières années : Kassav', et Malavoi. Si le premier a clairement créé un nouveau genre, le zouk, Malavoi est pour sa part plus indéfinissable. Car sa force est d'avoir su moderniser les vieux rythmes des Antilles françaises (époque foulards et madras), en leur insufflant des accents de salsa. Unique dans la Caraïbe.

Biographie: 

Au début des années 1970, on constate que la musique martiniquaise est en perte de vitesse au profit de la salsa cubaine ou du compa haïtien qui font un malheur auprès de la jeunesse, laquelle se détourne des rythmes traditionnels, considérés comme trop désuets et trop peu dansants. Issus du quartier des Terres-Sainvilles à Fort-de-France, capitale du département français de la Martinique, quelques amis musiciens, emmenés par le violoniste Emmanuel "Mano" Césaire, prennent alors l'initiative de créer un ensemble musical qui mêlerait ces vieilles danses antillaises (mazurka, biguine, quadrille…) à de nouvelles influences dont la salsa et même le jazz.

A cette même époque, l'identité politique antillaise est en plein renouveau et le patrimoine culturel, dont la musique fait partie, est un vecteur essentiel pour sensibiliser la population à ce problème.

Canne à sucre

Initialement formé de quatre violonistes dont Mano Césaire, Jean-Paul Soïme, et Christian de Negri, d'une section rythmique avec Denis Dantin à la batterie, et Marcel Rémion à la basse, le groupe naît en 1972 sous le nom de Malavoi. Variété de canne à sucre, Malavoi fut aussi le nom d'une rue sur l'île de Gorée au large du Sénégal, d'où les esclaves partaient pour les Amériques. À la fin des années 1960, certains des membres avaient déjà joué dans un groupe d'écoliers du lycée Schoelcher de Fort-de-France, les Merry Lads. La plupart avaient fréquenté l'école de musique de Colette Franz dans les années 1950.

Dès ses débuts, Malavoi reprend donc de vieux airs antillais remontant parfois aux années 1930 et 1940, et leur insuffle une nouvelle énergie. Afrique, Brésil, Caraïbes, jazz, toutes les influences sont utilisées et savamment mêlées. Le succès est immédiat auprès du public. Au son des violons, qui sont la caractéristique du groupe, la population martiniquaise redécouvre toute une tradition musicale.

Malavoi enregistre quelque 45 tours ("Albè", "En lè mon là") et enflamme les bals antillais. Assez vite, la formation s'enrichit de cuivres : deux trombones et un saxophone (Bib Monville). Le pianiste Paulo Rosine rejoint aussi le groupe dont il va devenir un des piliers.

Quant aux chanteurs, ils changent souvent et durant ces premières années, se relaient : Pierre Pastel, Maurice Marie-Louise, Raymond Mazarin, Pierre Jabert ou Julien Constance. Tous ou presque, travaillent parallèlement à leur activité musicale, mais leur succès augmentant, ils passent vite d'un statut d'amateur à celui de professionnel.

En 1978, sort leur tout premier album, "Malavoi". La voix sensuelle qu'on y découvre et qui demeure encore aujourd'hui une des plus belles des Antilles est celle de Ralph Thamar. Cependant cette année-là, le groupe s'essouffle un peu. Leur succès et leur notoriété sont énormes en Martinique, où plus un bal n'a lieu sans eux !

Leur répertoire est essentiellement constitué de reprises, et les musiciens sont un peu las de jouer toujours la même chose. Ils ont l'impression de délaisser leurs propres compositions et de ne plus vraiment se consacrer à ce qui leur plaît. Un dernier bal a donc lieu en 1978 au Lamentin, ville de la côte est de la Martinique. Puis Malavoi cesse toute activité pendant trois ans.

Renaissance

C'est par un grand concert à Fort-de-France que Malavoi renaît en 1981. Cette fois, Paul Rosine est devenu le chef d'orchestre du groupe. Il a, à cette époque, l'idée d'une formation d'une dizaine de violons. Finalement subsistent les quatre violons d'origine à l'exception de Denis Dantin remplacé par Philippe Porry. La nouveauté, c'est le violoncelle tenu par Jean-José Lagier. Avec des congas, bongos, une basse, une batterie et un piano, Malavoi reprend donc le chemin des concerts face à un auditoire qui ne l'a pas oublié. Entre temps est né un autre groupe antillais, Kassav', qui devient le chef de file du zouk, nouveau style musical extrêmement dansant né aux Antilles en ce début des années 1980. Complémentaires, ces deux groupes deviennent les ambassadeurs de la culture musicale antillaise.

Case-nègres

Dès sa reformation, Malavoi voit sa notoriété dépasser le cadre des Antilles. La France métropolitaine devient vite sensible à ces rythmes chaleureux, festifs et tendres à la fois. De plus, la communauté antillaise en France est très importante. Un nouvel album sort en 1983, "Zouel", avec toujours Ralph Thamar au chant. Sur ce disque, on trouve aussi "Caressé moin" chantée et signée par la chanteuse et journaliste, Marie-Josée Alié. Ce titre est désormais un des classiques de la chanson antillaise.

En 1983, Malavoi est présent au festival du Printemps de Bourges en France. Leurs tournées les mènent aussi au Brésil et en Colombie pour le festival caribéen de Carthagène. Ils se voient également décerner le Maracas d'Or, prix remis à Paris à un artiste africain ou antillais. Enfin, la réalisatrice haïtienne Euzhan Palcy leur commande la musique de son film "Rue Case Nègres".

Désormais lancés dans de nombreuses tournées, ils font une de leurs premières scènes parisiennes en 1984 au Théâtre de la Ville où ils restent huit jours. Par la suite, ils joueront presque chaque année dans la capitale française. Du 29 avril au 4 mai 1985, ils montent sur la scène de l'Olympia, la plus prestigieuse des salles parisiennes.

Vers 1985, ils quittent leur maison de disques spécialisée dans la musique antillaise, Georges Debs, pour intégrer un label international, WEA. En 1986, sort leur troisième album, "Case à Lucie". En dépit de leur imposant succès et de la percée impressionnante du courant zouk, ce disque prouve que Malavoi ne perd rien de son âme et des choix culturels qu'il défend depuis quinze ans déjà.

En avril 1987, le groupe monte sur la scène du Zénith face à un public enthousiaste de 4000 personnes. Un album est tiré de ce concert. Toujours en avril, ils sont de retour au festival du Printemps de Bourges, puis s'envolent pour une tournée qui traverse le Brésil, l'Équateur et le Canada. En juillet, c'est au Centre des Arts de Point-à-Pitre en Guadeloupe que le groupe retrouve le public antillais.

Le chanteur Ralph Thamar quitte Malavoi en 1988 pour entamer une carrière en solo. Il est remplacé par Pierre-Michel "Pipo" Gertrude qui très vite s'adapte à un répertoire écrit pour son prédécesseur. Les tournées en 1988 mènent le groupe à La Nouvelle-Orléans, au Québec, mais aussi en Europe, et particulièrement en France, où ils visitent une vingtaine de villes. Ils retrouvent la scène de l'Olympia du 5 au 8 mai, et du 13 au 15. Un quatrième album paraît en 1988, "Jou Ouve". C'est leur dernière production chez WEA qu'ils quittent l'année suivante pour CBS, futur Sony Music. Ce nouveau contrat leur ouvre les portes du Japon pour quatre dates lors desquelles ils font un malheur fin 1989. Dans la foulée, c'est au Parc Gorki de Moscou qu'ils reçoivent un excellent accueil.

Élysée

Dès janvier 1990, ils sont à nouveau de retour à Paris au Zénith avant de revenir en novembre au Bataclan du 2 au 10 pour fêter leurs vingt ans de carrière. À cette occasion, ils sont quatorze sur scène et parmi les choristes, on note la présence du Martiniquais Tony Chasseur. Autour d'un noyau initial, qui lui-même connaît de nombreux mouvements internes, les invités ne cessent de se croiser sur les scènes où se produit Malavoi ; la plupart des grands artistes antillais ont au moins une fois travaillé avec eux.

Cet échange permanent entre les chanteurs et musiciens antillais et Malavoi fait l'objet d'un album en 1992, "Matebis", qui signifie en créole "école buissonnière". Les titres sont signés par des membres du groupe, mais aussi par des auteurs traditionnels tel Loulou Boislaville. Parmi les nombreux invités, on trouve Tanya Saint-Val, Édith Lefel, Jocelyne Beroard (chanteuse de Kassav'), Kali et le Haïtien Beethova Obas. Cet album est suivi de nouvelles tournées dont un passage à New York avant l'été.

Puis au cours du mois de juillet, Malavoi est convié à l'Élysée, résidence du président de la République française, pour jouer devant François Mitterrand et son invité, Abdou Diouf, président du Sénégal. Fin juillet, ils font quelques concerts sous le grand carbet du Parc Floral de Fort-de-France. Kali et le pianiste Mario Canonge font partie de la fête. Puis du 23 au 25 octobre, c'est à nouveau au Bataclan que Malavoi recrée l'ambiance d'un vrai bal antillais. Durant les semaines suivantes, le groupe s'installe quelque temps sur l'île de la Réunion.

Au milieu des tournées internationales, le groupe trouve le temps de jouer pendant quelques semaines tous les vendredis soirs dans un club de Rivière-Salée, chez eux, en Martinique.

Rosine

Début 1993, Malavoi perd un de ses piliers en la personne de Paulo Rosine qui meurt le 31 janvier d'un cancer à l'âge de 45 ans. Compositeur, arrangeur, musicien exceptionnel, Paul Rosine n'avait jamais quitté son poste de fonctionnaire à la préfecture de Fort-de-France. De 1986 à 1989, il avait été vice-président de la commission d'identification des œuvres à la SACEM (Société des Auteurs et Compositeurs), organisme qui lui avait décerné un prix à l'examen d'arrangeur en 1988. Sa disparition représente une perte énorme pour la musique antillaise et pour le groupe au sein duquel il avait imprimé son style et son talent d'une façon inoubliable. Ce deuil est vécu par tous les Martiniquais qui le 30 avril se pressent à l'hommage que lui rendent Malavoi et de nombreux artistes antillais au Palais des Sports de Paris. Quelques jours plus tard, c'est sous le grand carbet du Parc Floral de Fort-de-France qu'a lieu un nouveau concert en son souvenir.

Paul Rosine est remplacé par José Privat qui prenait déjà parfois sa place lorsque la maladie l'empêchait de monter sur scène. Deux nouveaux violonistes originaires de France métropolitaine intègrent également la formation : Jean-Luc Pino et Daniel Dato. Tous deux remplacent Patrick Hartwick qui quitte la Martinique, et Mano Césaire qui quitte le groupe. Malavoi reprend alors les tournées autour de l'album "Matebis". Après les Antilles et la Guyane française, le groupe est de retour à l'Olympia les 10 et 11 septembre, point final de sa tournée.

Après la disparition de Paul Rosine, le violoniste Jean-Paul Soïme prend la direction de l'ensemble. Le nouvel album qui paraît en 1994, "An Manniman" ("le monument") est la réunion de titres composés entre 1987 et 1993 dont la plupart sont composés par Jean-Paul Soïme. Le chanteur est toujours Pipo Gertrude accompagné cette fois de Patsy Geremy issue du groupe Souskay.

Souskay

La tournée les mène plusieurs fois à Paris puisqu'ils s'installent au Bataclan en février. Le percussionniste Dédé Saint-Prix et Marie-Josée Alie sont de la fête. Puis le 20 mars, c'est au New Morning, club de jazz, qu'on les retrouve. L'été 95 est consacré à une nouvelle tournée américaine, plutôt sur la côte ouest du pays.

Travailleurs acharnés et réguliers, le groupe sort un nouvel album en 1996, "She She", entièrement construit autour des souvenirs d'une vieille Antillaise. Trois nouvelles voix enrichissent le son du disque, Lindsay Charnier (originaire de la Réunion), Valérie Odina et Joëlle Vielet, toutes deux de la Martinique.

En parallèle aux commémorations du 150e anniversaire de l'abolition de l'esclavage en France organisées en 1998, Malavoi revient avec "Marronage" suivi l'année d'après par "Flech Kann".

En 2000, la Sacem lui décerne le Grand Prix de la musique traditionnelle. Cette année-là, Ralph Thamar rejoint le groupe pour une petite série de concerts.

S'ils semblent avoir laissé de côté le travail en studio, les musiciens continuent à se réunir pour jouer en public. En 2005 paraît "Live au Club Med World". Aux inévitables compilations dont leur répertoire fait régulièrement l'objet vient s'ajouter "Les Instrumentaux". Quelques mois plus tard, en mars 2007, le groupe retrouve en Guadeloupe son ancien chanteur Ralph Thamar pour deux concerts exceptionnels. Le 9 août 2007, la formation antillaise est à nouveau endeuillée par la disparition de Jean-Paul Soïme, l'un de ses violonistes fondateurs.
 
Le 10 mai 2008, Malavoi retrouve la scène de l'Olympia à Paris.

2009 : "Pèp la"

Dix ans après l'album précédent, Malavoi retrouve le chemin des studios, emmené par le chanteur Ralph Thamar. Ensemble, ils enregistrent le disque "Pèp la", qui regroupe aussi de nouveaux musiciens et des membres historiques tels que Nicol Bernard.

On retrouve le groupe à Paris au New Morning pour une série de 3 concerts du 4 au 6 décembre 2009.

L'année 2012 marque une étape importante pour le groupe martiniquais puisqu'il célèbre cette année-là, ses 40 ans de carrière. C'est d'abord sur son île que Malavoi lance les festivités avec un concert le 3 mai à L'Atrium à Fort-de-France. Une dizaine d'invités viennent partager la scène, dont Jocelyne Béroard, Tanya Saint Val, Kali, Dédé Saint-Prix ou Philippe Lavil.

Le 1er décembre, c'est la métropole qui est à la fête : Malavoi s'entoure d'un orchestre symphonique pour un grand concert anniversaire au Zénith de Paris. Ce soir-là, Ralph Thamar, Pipo Gertrude et Tony Chasseur, les chanteurs de la formation, réunis pour la première fois, entonnent quatre décennies de tubes antillais, magnifiés par les cordes d'un ensemble de 49 musiciens dirigés par la violoniste Anne Gravoin. L'enregistrement de cette soirée paraît en CD et DVD à l'été 2013, sous le titre "Malavoi symphonique".

Le 20 juillet 2013, le groupe perd à nouveau un de ses fondateurs, le violoniste Christian de Négri, qui décède à l'âge de 67 ans en Martinique. Il avait accompagné Malavoi pendant 30 ans.

C’est avec une mise en lumière des talents de la Martinique que l’on retrouve Malavoi en janvier 2016, à travers la parution de leur album "Oliwon". Sous la direction musicale de Nicol Bernard, la formation invite des artistes de la nouvelle génération à interpréter des titres de leur choix. On retrouve ainsi Valérie Louri, Loriane Zacharie, Emeline Michel ou encore Kolo Bart au chant. Ralph Thamar fait bien sûr toujours partie de l’aventure.

En 2017, avec la compilation "Partaj", Malavoi propose les meilleures collaborations de sa longue histoire avec de grandes voix des Antilles et d’ailleurs : Jocelyne Béroard, Édith Lefel, Tanya Saint-Val, Dédé St Prix, Jean-Jacques Goldman ou Philippe Lavil, entre autres.

2020 : "Masibol"

Après ces échanges et métissages, Malavoi revient sur le devant de la scène en décembre 2020 avec un nouvel album original, "Masibol". À travers les 10 titres de l’album, notamment composés par Nicol Bernard et arrangés par Jacky Bernard, on retrouve toute l’authenticité du groupe caribéen. L’emblématique Ralph Tamar assure le chant dans cet opus, hommage aux femmes puissantes et à la terre nourricière de Martinique.

En mai 2022, le groupe célèbre ses 50 ans de carrière à travers trois concerts en métropole, à Bordeaux, Marseille et Paris (La Cigale le 21 mai), avant une grande fête prévue en décembre chez eux, en Martinique.

Juillet 2022

Discographie
MASIBOL
Album - 2020 - Aztec musique
PARTAJ
Compilation - 2017 - Aztec musique
OLIWON
OLIWON
Album - 2015 - Aztec musique
SYMPHONIQUE LES 40 ANS AU ZENITH
SYMPHONIQUE LES 40 ANS AU ZENITH
Live - 2013 - Aztec musique
L'ESSENTIEL 1981 - 2012
Compilation - 2012 - Aztec musique
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