Patrick Juvet
Il a marqué les années 70 avec des ballades fleur bleue mais aussi avec de vrais tubes disco. Il a joué les stars en limousine, avec les accessoires de la gloire que sont pour certains la drogue et l'alcool. En tentant de montrer une autre facette de lui-même, il n'a pas rencontré le succès escompté, même si au milieu des années 90 il fut rattrapé par le retour du disco.
Patrick Juvet est né le 21 août 1950 à Montreux en Suisse. Il devient très vite passionné de musique profitant du fait que son père vend des radios et des télévisions. Vers l'âge de ses sept ans, il commence l'apprentissage du piano. Entre conservatoire et leçons à domicile, Patrick travaille beaucoup son instrument. Pourtant, au moment de l'adolescence, découvrant les Beatles, il envisage de laisser tomber la musique classique et donc le piano. Ses parents le persuadent de continuer.
A dix-huit ans, il rêve de monter à Paris, mais n'a pas d'argent. Un de ses amis propose à ce jeune homme grand, mince et de belle allure de faire du mannequinat en Allemagne. Il va rester deux ans à Düsseldorf, lui permettant ainsi de mettre un peu d'argent de côté. En 70, il arrive enfin à Paris.
Vrai départ
Il va lui falloir quelques mois avant de réellement mettre le pied dans le milieu. C'est en rencontrant à Saint-Tropez Eddy Barclay que celui ci va lui donner l'opportunité d'enregistrer un premier 45 tours "Romantiques pas Morts" durant l'automne 71. En écrivant "le Lundi au soleil" pour Claude François, Patrick Juvet connaît son premier succès d'auteur, avant de connaître celui d'interprète avec "la Musica", 45 tours qu'il vend à 1 million d'exemplaires. Plusieurs autres simples vont suivre et vont confirmer ce succès grandissant : "Ecoute-Moi", "Au même endroit, à la même heure" et "Sonia". En 73, il participe au concours de l'Eurovision avec une chanson "Je vais me marier, Marie" dont les paroles sont écrites par Pierre Delanoé.
Ses cheveux longs et blonds, son look de romantique et ses mélodies populaires font de lui un chanteur "à midinettes". Mais cette image ne colle pas vraiment à sa personnalité. Lui-même ne se retrouve pas dans le personnage médiatisé. Il décide de prendre sa carrière en main. Après avoir rencontré Jean-Michel Jarre, alors jeune parolier, Patrick décide de travailler avec lui. En 1973, sort donc un premier album intitulé "Love". Avec des titres comme "Unisex", il révèle un peu de sa personnalité véritable.
Vrai succès
En novembre 73, il affronte pour la première fois l'Olympia lors de la célèbre émission Musicorama retransmise par la radio Europe 1. Maquillé tel David Bowie (période Ziggy), Patrick Juvet est acclamé par les 3.000 personnes présentes. Sa métamorphose de chanteur à minettes en vrai musicien novateur commence à se matérialiser. Pourtant, le 45 tours qui sort quelque temps après vient contredire ces nouvelles orientations : c'est donc la chanson "Rappelle-toi Minette", qui grimpent en haut des hit parades début 74 avant que ne sorte en fin d'année le nouvel album "Chrisalyde" dans la veine de l'inspiration de l'Olympia. Sur un des morceaux de cette nouvelle production, figure un choriste de choix alors inconnu qui se nomme Daniel Balavoine et qui grâce à sa participation, signe rapidement chez Barclay.
Patrick continue ses recherches musicales et retrouve auprès de Jean-Michel Jarre, le même type de préoccupations. C'est avec lui qu'il commence à écrire de nouveaux titres. En 76, sort "Mort ou vif" sur lequel on trouve la chanson phare "Faut pas rêver".
Cette époque est celle de toutes les folies. Patrick Juvet est en pleine gloire et mène une vie entre strass et paillettes. Il boit aussi beaucoup et est difficile à cerner. Le stéréotype du chanteur à succès. Le milieu des années 70 voit aussi la fièvre disco s'emparer de l'Europe. L'esprit de fête, allié à la danse et aux boîtes de nuit prévaut. De quoi séduire Patrick Juvet qui surfe alors sur cette vague en compagnie de Jean-Michel Jarre. En 77, sort le 45 tours "Où sont les femmes", en 78 "I love America" (n°1 dans 15 pays dont les États-Unis) et en 79, "Lady night". De lui-même Patrick Juvet avoue que ces années furent celles des limousines, de la vie nocturne et de l'argent qui coule à flot. Il effectue en 80 une première tournée européenne précédée fin 79 par un show mémorable à l'Olympia (Un live sera enregistré à cette occasion).
Une époque révolue
Mais la vague retombe et le disco laisse la place à d'autres styles musicaux plus en phase avec l'époque. Patrick Juvet s'en rend compte et remet en cause ses orientations artistiques. En 82, il fait paraître un nouvel album "Rêves immoraux" plutôt hétéroclite du côté musical avec des textes signés Jean-Loup Dabadie ou Nicolas Peyrac. Loin des scores de ventes dont il a l'habitude depuis quelques années, Juvet réussit à en vendre quelques 200.000 copies.
Commence alors une période plus sombre pendant laquelle Patrick Juvet souffre notamment d'alcoolisme. Ces revenus ont considérablement diminué même s'il vit sur ses droits d'auteurs. Dès 82, il s'exile à Londres puis deux ans plus tard à Los Angeles. Entre 85 et 90, il n'a plus de moyens financiers et vit en Suisse auprès de sa famille. Au début des années 90, il fait quelques galas dans des boîtes nuit afin de gagner sa vie.
1991 : "Solitudes"
Mais en 91, alors que tout le monde l'a un peu oublié, Patrick revient à Paris avec un nouvel album "Solitudes" bien loin des strass du disco. En effet, il effectue un vrai retour d'auteur-compositeur qui veut exprimer des sentiments importants qui sont les siens, un peu comme une thérapie publique. Françoise Hardy, Luc Plamondon et Marc Lavoine viennent apporter leur contribution. Malheureusement, ce disque ne rencontre pas le succès escompté, car il est difficile de se défaire d'une image d'idole disco.
En 1995, il se produit au Zénith à Paris devant 8.000 personnes à l'invitation des organisateurs d'un concert organisé par Aides, association de lutte contre le sida. Pendant vingt minutes, il chante ses anciens succès disco et est véritablement ovationné. Dans la foulée sort un "Best of" qui le relance sur les pistes de danse et les plateaux de télévision, sans pour autant relancer véritablement sa carrière.
Il bénéficie allégrement du retour en grâce du disco. Patrick Juvet sort même un remix de "I love America" en 1999. Dans un autre registre, il écrit un titre pour Hélène Segara en 2002, "Je rêve". Et c'est au début des années 2000 que le chanteur s'installe dans la capitale catalane, Barcelone, à la recherche d'un certain anonymat.
Marqué par la mort en 2002 de la productrice Florence Aboulker qui fut celle qui le présenta à Eddy Barclay au début de sa carrière, il publie son autobiographie "Les Bleus au cœur" (du nom d'un de ses titres des années 70) en 2003. Il s'y livre avec sincérité sur sa vie personnelle et sa carrière.
En 2007, il fait sa première apparition dans la tournée "Âge tendre et tête de bois". Durant les années qui suivent, on le verra régulièrement dans ce spectacle qui rassemble des chanteurs des années 60 et 70 qui viennent interpréter leur plus grands succès devant un public conquis.
Le décès de sa mère, Janine, en décembre 2017 affecte beaucoup le chanteur, celui-ci entretenant une relation très forte avec elle.
Patrick Juvet continue à se produire sur scène régulièrement, retrouvant toujours son enthousiasme face à un public fidèle.
Souffrant d'une dépendance à l'alcool, très esseulé, Patrick Juvet tente tout de même de faire aboutir ses projets artistiques, notamment un album en tant que compositeur. Mais il meurt subitement le 1er avril 2021 d'un arrêt cardiaque, chez lui, à Barcelone, l'âge de 70 ans.
Il est incinéré en Espagne, dans l'intimité familiale. Un hommage lui est rendu par sa famille à La Tour-de-Peilz (Suisse), hommage auquel ses amis et admirateurs sont appelés à se joindre "par la pensée" pour cause de pandémie à l'échelle mondiale.
Avril 2021