Sidiki Diabaté
Descendant de quelques-uns des plus illustres joueurs de kora, le Malien Sidiki Diabaté est devenu au milieu des années 2010 un des artistes les plus populaires de sa génération en Afrique de l’Ouest, capable d’embrasser la tradition comme d’être en phase avec les codes de la jeunesse de son époque, mis en avant autant par son père Toumani Diabaté que le rappeur français Booba ou le chanteur Matthieu Chédid.
Fils de Toumani Diabaté, musicien malien considéré comme le maître de la kora, Sidiki Diabaté est né le 8 février 1992 à Bamako. Il porte le prénom de son grand-père paternel, décédé en 1996 et qui fut lui-même surnommé "le roi de la kora". Cet héritage familial est aussi celui d’une longue lignée de griots : il appartient en effet à la 72e génération de ces musiciens-conteurs, qui font office de gardiens des traditions dans cette partie de l’Afrique de l’Ouest.
Naturellement, c’est avec les instruments de musique qu’il joue au quotidien durant son enfance, tout en s’imprégnant de ce qui fait l’éducation d’un griot. Il apprend notamment l’instrument familial avec son oncle paternel Madou Sidiki Diabaté, jeune frère de son père et koriste reconnu, puis avec le Guinéen Madi Kouyaté, lui aussi issu d’une famille renommée de longue date.
Malgré l’amputation de l’auriculaire de la main droite à la suite d’un accident, le jeune garçon fait montre de qualités qui lui valent de monter sur scène en France en 2006, dès l’âge de 14 ans, à l’occasion d’un hommage à Ali Farka Touré rendu par son fils Vieux. L’année suivante, il est programmé au festival Sous la plage à Paris, et se fait déjà surnommer "le petit prince de la kora".
Il participe aussi au livre-disque "Sidikiba’s Kora lesson" destiné aux enfants, qui sort en 2008. Sur ce projet récompensé à de nombreuses reprises et mené par l’auteur-illustrateur américain Ryan Thomas Skinner, il enregistre ce qui est son premier album.
Lorsque Sidiki découvre l’album "Songhaï" de son père (sorti en 1988) qui allie audacieusement la kora à la musique espagnole, cela lui ouvre l’horizon. Le jeune ado qui regarde les clips de rap américain cherche alors à se familiariser avec les beats, les programmations, toute la technologie qui peut être mise au service de la musique. Son père le soutient dans sa démarche en lui achetant le matériel informatique nécessaire à l’apprentissage de sa démarche.
En s’associant avec son compatriote Iba One, il met en pratique ces connaissances et se fait vite remarquer pour son savoir-faire : en 2010, Il est récompensé aux Mali Hip Hop Awards en tant que meilleur beatmaker, tandis que le collectif GRR, pour "Génération Rap et Respect", qu’il a intégré est élu meilleur groupe de rap de l’année. Leur collaboration se poursuit avec le même succès, permettant au duo de se produire dans le stade Modibo-Keïta de Bamako.
2014 : "Toumani & Sidiki"
Diplômé du prestigieux Institut national des arts de Bamako où il a suivi un cursus académique, inscrit ensuite au Conservatoire Balla Fasséké Kouyaté pour parfaire ses connaissances, le jeune homme se voit proposer par son père une aventure musicale qui les réunirait tous deux – ce que Toumani n’a pas eu la possibilité de faire avec son propre père, à son grand regret.
Enregistré à Londres, "Toumani & Sidiki" paraît en mai 2014 est un duo de koras, sans voix, qui présente Sidiki sous l’angle d’une musique d’inspiration traditionnelle, mais qui évoque aussi l’actualité à travers le titre "Lampedusa". La rencontre se prolonge sur scène, en France, en Grande-Bretagne, en Belgique, au Danemark, aux Pays-Bas, en Espagne et même jusqu’en Australie.
En parallèle, Sidiki développe au Mali sa carrière solo, assumant un style très urbain – y compris en termes d’image –, dans lequel sa kora, tantôt électrique tantôt acoustique, se mêle aux beats et à son chant passé par l’immanquable logiciel Auto-tune. Ses singles successifs renforcent sa popularité locale, mais aussi dans les pays voisins.
Le rappeur français Booba s’inspire de son titre "Inianafi Debena" pour le titre Validée paru sur son album "Nero Nemesis" et l’invite avec son instrument de prédilection sur la scène de l’AccordHotels Arena à Paris, devant près de 20 000 spectateurs, en décembre 2015.
2016 : "Diabateba Music vol. 1"
Dans la foulée, Niska, autre rappeur français à succès, lui propose un featuring sur le titre "Bella Ciao". En avril 2016, il donne son premier concert personnel à Paris au Trianon, quelques semaines avant la commercialisation de son premier album "Diabateba Music vol. 1" qui réunit ses singles déjà disponibles ainsi que trois inédits.
Son concert au Palais de la culture d’Abidjan en mai sert de révélateur : la notoriété de Sidiki a traversé les frontières et atteint un niveau qui fait de lui une des nouvelles stars de la jeunesse de l’Afrique francophone. On le voit aussi sur scène cette année-là à Brazzaville au Congo, ou à Dakar au Sénégal, ainsi qu’à Paris à nouveau en octobre, puis à New York aux États-Unis, signe que le chanteur a acquis un public aussi en Occident.
Le phénomène se confirme : en 2017, il joue au Bénin, au Burkina Faso, au Niger, et bien sûr pour ses compatriotes au Stade omnisports de Bamako, à guichets fermés. Les dates se multiplient aussi en France, notamment à la Fondation Vuitton et au Bataclan. Le Sénégalais Youssou N’Dour l’invite à partager le micro avec lui à l’AccordHotel Arena à Paris, puis à Dakar début 2018. En Gambie, l’engouement se vérifie, tout comme en Guinée où Sidiki joue dans les stades de Conakry et Nzérékoré. Le griot chante aussi les louanges de Kerfalla Person Camara, homme d’affaires guinéen dont la fondation s’est occupée de faire venir le chanteur, sur le titre "KPC".
De façon concomitante, Sidiki est enrôlé par le chanteur français -M- (Matthieu Chédid) dans son projet "Lamomali", un album collectif sur lequel figure aussi Toumani Diabaté qui obtient un Disque de platine en France. Avec ce groupe, le Petit Prince de la kora se produit à 40 reprises en 2017 dans les plus grandes salles de concert de l’Hexagone, ainsi qu’en Suisse, en Espagne et en Belgique.
Pour sa participation à ce disque, il reçoit également une Victoire de la musique en France la même année dans la catégorie des Musiques du monde. Cette récompense vient s’ajouter à d’autres que le Malien a obtenues, pour sa carrière personnelle, en Afrique : Meilleur artiste de l’année 2017 à la cérémonie des Tamani d’or organisée dans son pays, Meilleur artiste d’Afrique de l’Ouest à ’édition 2018 des Kundé organisée au Burkina Faso, meilleur artiste d’Afrique de l’Ouest au Primud (ex-Award du coupé décalé) ivoirien en 2018.
Sa cote se vérifie aussi à travers les multiples featurings qu’il accepte : en France avec les rappeurs Black M, 4Keus et Guizmo ; en Afrique aussi, avec les Guinéens de Degg J Force 3 mais aussi l’Algérien Kader Tarhanin, la sensation de la musique touareg depuis quelques années au Sahel.
De nouvelles prestations live ont lieu sur le continent africain en 2018, au Femua en Côte d'Ivoire et au Togo.
En toute fin d’année, Diabateba Music, le label des Diabaté père et fils, rejoint le giron d’Universal Music Africa, filiale d’Universal basée à Abidjan.
Après un grand concert gratuit organisé en avril 2019 au Palais des Sports de Bamako avec M'Bouillé Koité, lauréat du prix Découvertes RFI 2017, Sidiki se produit le 7 juin au stade de Kayes, grande ville de l’ouest du Mali.
2019 : "Beni"
En attendant l’album qui succédera à "Diabateba Music volume 1" publié en 2016, Sidiki Diabaté sort, en juillet 2019, un mini-album de sept titres baptisé "Béni", en référence à sa réussite. Dans ce mini-album, il a collaboré avec le très populaire beatmaker ivoirien Akatché (Mayra Andrade, Soul Bang’s, Tiken Jah Fakoly…). On l’entend également en duo avec Fally Ipupa ("Ne me quitte pas") et l’étoile montante du coupé-décalé Safarel Obiang ("BKO-ABJ"). Le contrat est rempli.
La pandémie de Covid-19 n’a pas non plus épargné le continent africain. Bon nombre d’artistes, dont Sidiki Diabaté, se sont massivement mobilisés via les réseaux sociaux. Le chanteur-interprète a créé, fin mars 2020, un projet baptisé "Confiné Chimenté". Le concept : un live interactif de création musicale diffusé en direct sur Facebook.
Quelques mois plus tard, on le retrouve aux côtés d’artistes comme Fatoumata Diawara, Coumba Gawlo ou Serge Beynaud. En tout, onze chanteurs africains unissent leurs voix sur la chanson "Le cri du silence", un message contre les violences faites aux filles et aux femmes. Le titre s’inscrit dans le cadre d’une campagne de sensibilisation baptisée #StrongerTogether ("Plus forts ensemble"), lancée par le programme Autonomisation des femmes au Sahel et dividende démographique (SWEDD).
Le 21 septembre, Sidiki Diabaté est arrêté par la police malienne et placé en garde à vue. Il est accusé par son ex-compagne Mariam Sow, avec qui elle dit avoir été en couple pendant 7 ans, de séquestration et violences physiques.
La réaction de sa maison de disques est immédiate. Dans un communiqué publié sur les réseaux sociaux le 23 septembre, Universal Music Africa suspend le contrat de l’artiste "avec prise d’effet immédiat". Il est également disqualifié du prix des musiques urbaines (Primud) en Côte d’Ivoire et des African Muzik Magazine Awards (AFRIMMA) aux États-Unis.
Incarcéré depuis le 25 septembre à la maison centrale d'arrêt de Bamako, il est libéré sous caution de 15 millions de francs CFA (environ 23 000€) le 29 décembre 2020.
Le 1er mai 2021, Sidiki Diabaté retrouve la scène lors de la finale de The Voice Afrique. Aux côtés de son père Toumani, il rend hommage au Premier ministre ivoirien Hamed Bakayoko décédé le 10 mars.
Trois jours plus tard, dans un message adressé à ses fans sur son compte Facebook, Sidiki Diabaté annonce la sortie d’un clip intitulé "Renaissance" dans lequel il évoque ses récents déboires avec la justice. Dans la foulée, il se produit en concert à Abidjan les 14 et 15 mai et à Cotonou le 29.
Mai 2021