Alan Stivell
Il fut dans les années 1970 celui qui, par la musique, fit revivre la culture bretonne. Véritable militant, Alan Stivell marqua cette époque où la vague folk déferlait à travers le monde, ce monde qu'il parcourut dans tous les sens avec sa célèbre harpe celtique. Quelques décennies plus tard, le barde aux cheveux longs continue son périple artistique avec le même intérêt. Délibérément tourné vers le futur.
Alan Stivell de son vrai nom Alan Cochevelou, est né le 6 janvier 1944 à Riom en Auvergne. Sa famille originaire du Morbihan en Bretagne s'installe par la suite à Paris. Son père Jord Cochevelou travaille comme traducteur pour le ministère des Finances français. Son véritable rêve est la renaissance d'une harpe d'origine celte. Après une étude de documents anciens, il reconstitue cet instrument oublié et offre le premier prototype en 1953 à son fils Alan, âgé seulement de 9 ans.
Celui-ci a commencé l'étude du piano et de la harpe classique. En mai, Denise Megevand lui donne les premiers cours en collaboration avec son père. En novembre, il se produit pour la première fois en public à la Maison de la Bretagne à Paris lors d'une conférence donnée par son professeur pour faire redécouvrir la harpe celtique. En 1955, il joue trois morceaux en lever de rideaux de Line Renaud à l'Olympia à Paris.
En 1957, le jeune Alan se met à l'apprentissage sérieux de la langue bretonne. Il s'intéresse aussi à l'histoire, la mythologie et l'art celtes, renouant ainsi avec la culture de ses ancêtres. Il se met aussi à la bombarde et à la cornemuse. Il intègre alors le Bagad Bleimor, formation traditionnelle bretonne dans laquelle il tient le premier rang.
De la tradition à la modernité
Sa première expérience discographique date de 1959 avec un premier 45 tours. C'est en fait l'année suivante que sort le premier véritable album intitulé "Telenn Geltiek", consacré évidemment à la harpe celtique.
Son père construit pour lui en 1964 une autre harpe, la harpe bardique aux cordes de bronze. Se lançant de nouveau dans l'aventure, Alan commence à expérimenter une musique plus moderne. Dès 1966, il s'essaie au chant. Il écume les clubs, les festivals et les Maisons des Jeunes et de la Culture.
Deux ans plus tard, il fait la première partie à Londres des Moody Blues, le célèbre groupe anglais. C'est en 1970 que démarre réellement la carrière de celui qui se fait appeler désormais Alan Stivell. En effet, le 45 tours "Brocéliande" qui sort en juillet chez Philips, suivi un peu plus tard par l'album "Reflets" constituent les premiers succès du musicien. Alan Stivell propose une version de la musique bretonne tournée vers l'avenir et la modernité, de quoi séduire un public jeune cherchant à affirmer son identité celte sans pour autant s'y enfermer.
En 1971, Alan Stivell sort un album intitulé "Renaissance de la harpe celtique" entièrement instrumental et contenant des thèmes de tous les pays celtiques ainsi que des compositions comme "Ys", qui préfigurent le "new age". En 1972, le musicien connaît un véritable triomphe lors de son passage à l'Olympia à Paris. On retrouve des musiciens comme Dan Ar Braz à la guitare électrique, Gabriel Yacoub (futur Malicorne) ou Michel Santangeli, batteur venu du rock. L'album live enregistré ce soir-là se vend à près de un million et demi d'exemplaires. Le succès venant, les puristes commencent à reprocher à Alan Stivell le côté commercial de sa musique.
Sur les routes du monde entier
Le musicien représente alors le barde moderne parcourant les routes internationales. En 1973, il part en tournée aux États-Unis, au Canada et en Angleterre où le célèbre magazine de musique Melody Maker couronne son nouvel album "Chemin de terre" du titre de meilleur album de l'année. Dans la même veine que le précédent, ce disque allie musique des pays celtiques et création contemporaine.
Après avoir acheté une maison à Langonnet en Bretagne, il y enregistre en 1974 un album beaucoup plus intimiste que les précédents, "E Langonned". Le musicien a besoin de cette pause et désire démontrer qu'il peut développer un autre style. Pourtant au moment de la parution de cet album, il se lance dans une tournée de concerts très électriques, avec le groupe de musiciens habituels. En 1975, sort un live enregistré en public au National Stadium de Dublin, "E Dulenn".
L'année suivante, Alan Stivell fait paraître "Trema'n inis" ("Vers l'île" en breton), album consacré aux poètes bretons, mis en musique par lui-même et par son père (décédé en 1974). Cette nouvelle expérience présente au grand public un autre aspect de la culture bretonne. En 1977, c'est l'histoire de la région qu'il met en avant avec l'album "Raok Dilestra" (Avant d'accoster). Parmi les seize morceaux plutôt électriques que comporte ce disque, figure une chanson d'amour dédié à son fils Ewan.
Symphonique
Après un album un peu plus intimiste en 1978 "Un dewezh barzh ger" (Une journée à la maison) et un live en 1979 "Tro ar bed - International tour" enregistré principalement en Allemagne, sort la fameuse "Symphonie celtique" en 1979. Une formation rock, un ensemble de bombardes et cornemuses, un orchestre symphonique ainsi que la chanteuse berbère Djourha et le sitar de Narendra Bataju sont les interprètes de cette grande fresque musicale. Cette symphonie est jouée au Festival Interceltique de Lorient devant 10000 spectateurs.
Même si la décennie commence fort pour Alan Stivell, elle va en fait constituer une période un peu moins faste car la déferlante folk passe un peu de mode, laissant la place à une musique plus électronique. Cela ne l'empêche pas de sortir des albums dont "Terre des vivants" en 1981. Du 15 septembre au 11 octobre de la même année, il se produit à Bobino puis part en tournée. En février 1982, c'est aux États-Unis qu'il part faire des concerts, souvent à guichets fermés comme au Beverly Theater à Los Angeles ou au Town Hall à New York.
Après "Légende" en 1983, l'album "Harpe du Nouvel Age" sort en 1985. Il vaut au musicien breton un "Indie Award", récompense américaine attribué par l'association des producteurs et distributeurs indépendants. La carrière internationale qu'il a entrepris très tôt pour faire connaître la culture celtique, a porté ses fruits. Et c'est celle-là même qui va lui permettre de continuer durant les années 1980. En effet, mis à part une série de concerts à Paris en 1987 ainsi que quelques dates ça et là en France, Alan Stivell pendant toute cette époque tourne beaucoup plus en dehors des frontières hexagonales et surtout aux États-Unis et en Australie. En 1989, il participe à l'enregistrement du disque de la chanteuse anglaise Kate Bush, "Sensual World".
Les années 1990
Son retour sur le devant de la scène française s'effectue en 1991 avec la sortie d'un nouvel album intitulé "Mist of Avalon". Ce retour est confirmé deux ans plus tard avec "Again" : Kate Bush, Shane Mac Gowan du groupe irlandais Pogues, le sénégalais Dudu N'diaye Rose et le chanteur français Laurent Voulzy figurent sur ce disque regroupant dix-sept versions réactualisées des plus grands succès d'Alan Stivell depuis le début des années 1970. Le public ne s'y trompe pas et renoue avec le musicien lors de la tournée en France qui passe par Paris les 14 et 15 janvier 1994 au Bataclan.
En 1995, Alan Stivell publie un album "Brian Boru" (du nom d'un grand chef de guerre irlandais qui vainquit les Vikings). La presse est dithyrambique et reconnaît là un des meilleurs disques du musicien breton. Il reprend des standards de la musique celtique avec quelques titres au son plus actuel. Martin Meissonnier, le monsieur "world music" français en est le producteur artistique. Le 30 novembre, il se produit aux Transmusicales de Rennes, festival rock s'il en est. Il enchaîne ensuite une tournée à travers la France avec pour conclure, un concert triomphal à la Fête de l'Huma (grand rassemblement annuel des communistes français en septembre à la Courneuve) devant 60000 personnes. L'année suivante, il retourne aux États-Unis et au Canada pour une nouvelle série de concerts dont un au Lincoln Center à New York devant 4000 spectateurs.
Reprenant un rythme plus soutenu dans la sortie de ses albums, Alan Stivell propose en avril 1998 un nouveau voyage grâce à la musique celtique. En effet, "1 Douar" (Une seule terre), 19e album du barde rassemble Youssou N'Dour, Khaled, Jim Kerr du groupe écossais Simple Minds et Paddy Moloney des Chieftains. Stivell veut depuis toujours démontrer que les différences de genres ou de langues (breton, anglais, wolof, arabe, etc.) sont les composantes essentielles de l'humanité. Il y parvient sans mal avec cette nouvelle production.
Figure de proue
À l'automne, Alan Stivell entame une tournée qui passe deux soirées à Paris les 8 et 9 décembre. On le voit également le 16 mars 1999 sur la scène de Bercy pour une immense soirée celte. Au milieu de noms comme Gilles Servat et Tri Yann, il fait figure de musicien chevronné, du genre qui ouvre la route des plus jeunes tels Armens.
Nouvel album pour le Breton en avril 2000. À 56 ans, il publie "Back to Breizh" qui ouvre son répertoire aux musiques électroniques. Cet apport est peut-être dû à la réalisation de Franck Darcel, ex-Marquis de Sade mais aussi partenaire musical de Pascal Obispo à ses débuts. Le harpiste quelques concerts en France au printemps avant de retrouver les États-Unis au cours de l'été. On le retrouve sur la scène parisienne de la Cigale les 25 et 26 janvier 2001.
En août, Alan Stivell est invité du 31e festival Interceltique de Lorient en Bretagne où il est ovationné par plus de 5000 personnes.
En 2002, sort "Au-delà des mots", son 21e album en plusieurs decennies de carrière. Sur ce disque entièrement instrumental, le musicien joue de six harpes différentes et célèbre les cinquante ans du renouveau de la harpe celtique.
Le 15 mars 2003, Alan Stivell clôture magistralement la seconde Nuit Celtique devant les 68000 spectateurs réunis au Stade de France avec un jubilatoire "Tri martolod" et le grandiose final de la "Symphonie celtique."
En juin, le musicien entame une tournée internationale célébrant le cinquantième anniversaire de la renaissance de la harpe celtique, tournée qui se poursuit en 2004. Il se produit ainsi dans de nombreux festivals comme celui des Celtic Connections de Glasgow, en Écosse (janvier). Du 19 au 21 mars, on le retrouve à Paris à la Cigale. À la fin de l'année, sortent simultanément un livre intitulé "Telenn, la harpe bretonne" que Stivell co-écrit avec Jean-Noël Verdier et un coffret CD/DVD, "Parcours", évoquant la carrière du musicien.
Entre mars et septembre 2005, Alan Stivell donne plusieurs concerts à travers la France et l'Europe.
2006 : "Explore"
Il faut attendre quelques mois pour que le musicien breton sorte un nouvel album. "Explore" est mis dans les bacs le 17 mars 2006. Ici, il renoue avec la chanson et utilise l'anglais, le français et le breton pour exprimer des sentiments et des points de vue personnels. Hormis cela, "Explore" flirte du côté de la musique électro, façon pour Alan Stivell, de donner une autre dimension à ses célèbres harpes celtiques.
Les deux années suivantes sont consacrées à une grande tournée en France et en Europe.
À la veille de l’année 2010, Alan Stivell livre l’album "Emerald", intitulé ainsi pour célébrer ses noces d’émeraude (quarante ans d’union) avec son public. Il y fait une nouvelle fois dialoguer des cornemuses et des harpes acoustiques et électriques, sur des arrangements folk, new wave mais aussi africanisant et indianisant. C’est sa façon à lui de rendre hommage à la mer, véritable "trait d’union" entre les peuples dit-il. Le premier simple s’appelle "Britanny’s".
En janvier 2010, Alan Stivell démarre au Canada une tournée qui se poursuivra essentiellement en France avec un passage par le Festival Interceltique de Lorient en août.