Deep Forest
En ce début de XXIe siècle, Deep Forest, dont la musique mêle modernité et ethnicité, est un des groupes français les plus connus de la planète.
À la fin de 1991, deux musiciens originaires de la région de Douai, dans le nord de la France, Michel Sanchez et Éric Mouquet, ont l'idée de transformer de rares mélodies pygmées et mélanésiennes en titres "dance". Habitués des studios d'enregistrement et adeptes des prestigieuses collections de disques ethniques (Ocora ou le Musée de l'Homme), Michel Sanchez a gardé le souvenir entêtant de polyphonies pygmées de Centrafrique, collectées par l'ethnomusicologue Shima Aaron, et de chants réunis aux îles Salomon par des chercheurs du Musée de l'Homme de Paris.
Le travail de Deep Forest consiste alors, non pas simplement à fusionner les genres, mais à recomposer ce qu'ils avaient déjà samplé (échantillonné) autour des voix et des mélodies. Des rythmes dance, ils ne gardent que les ambiances au synthétiseur, les boucles de batterie, mais aussi le mouvement lancinant de la ligne de basse.
Ce jeu de découpages-collages dure six mois pendant lesquels les deux musiciens travaillent à Bruxelles sur du matériel de pointe.
La danse ethnique
En mai 1992, "Sweet Lullaby" sort sur les radios. Quatre mois plus tard, le titre entre dans le Top 50 français, avant d'être nommé aux Grammy Awards américains et de servir de bande-annonce pour de nombreux spots publicitaires dans le monde entier.
L'album, lui-même intitulé "Deep Forest", paraît en juillet 92 et se vend à plus d'un million et demi d'exemplaires. Il est double disque d'or en France et dans de nombreux pays, devient disque d'or (Grande-Bretagne, Norvège) et de platine (USA, Nouvelle-Zélande, Australie).
Dans la foulée, sort l'album "World Remix", qui est surtout une stratégie de la maison de disque. Le simple "Sweet Lullaby" se trouve donc décliné en plusieurs versions, Ambient mix, Appolo Mix, Round the world mix,…
Les clubs new-yorkais en raffolent. C'est ainsi que les mélodies pygmées se retrouvent dans les discothèques du monde entier.
En mai 1995, "Bohême" sort dans trente-cinq pays. Les disques d'or se multiplient. La chanson-titre de ce nouvel album recèle la recette du succès du groupe : mélodies simples, arrangements subtils, voix chargée d'émotion et ici, une influence marquée cette fois par l'Europe de l'Est. En février 1996, le duo reçoit un Grammy Award (récompense américaine) pour le meilleur album dans la catégorie "World music".
La première apparition scénique de Deep Forest a lieu en juin 1996 pour la clôture du sommet des chefs d'État des sept pays les plus industrialisés du monde, le G7 à Lyon. Ce spectacle, animé avec l'Orchestre National de Lyon, précède une tournée qui les mène d'Europe de l'Est à l'Océanie.
En 1997, ils réalisent un album pour un jeune artiste camerounais inconnu, Wes, émigré dans le nord de la France. Mêlant les chants traditionnels du Cameroun aux rythmes dance, le simple extrait de l'album, "Alane", est le tube de l'été en France.
Après avoir vendu près de 3 millions d'albums sur les cinq continents, Deep Forest reprend son vol avec un troisième CD qui sort le 20 janvier 1998. Cette fois, c'est dans les Caraïbes et en particulier à Cuba qu'ils ont puisé l'essentiel de leur inspiration. Le nom de l'album, "La Comparsa", évoque d'ailleurs les fêtes de rues improvisées de la plus grande île des Caraïbes. Sanchez et Mouquet se sont, pour l'occasion, entourés de noms tels que Wes, Ana Toroja ou le Syrien Abed Azrie. Parmi les 13 morceaux, c'est "Madazulu" qui est choisi comme premier extrait. Le 21 septembre, le groupe se produit à l'Olympia à Paris. En 1999, sort un live "Made in Japan" réalisé lors d'un concert à Tokyo en 1998.
Rock'n'roll
Alors que le duo vient de finir la bande originale d'un film d'Alain Corneau, "Le Prince du Pacifique" qui sort en 2000, il se remet à travailler sur un album original. Cette fois-ci, il s'éloigne un peu des ambiances "exotiques" et s'inspire de situations difficiles et dures découvertes au cours de ses nombreux voyages. Il utilise donc beaucoup plus de guitares et de batterie qu'auparavant, donnant à l'ensemble des morceaux une note plus rock. Deep Forest délaisse un peu ses sonorités électroniques teintées de world music qui a fait son succès. En juin 2002, sort donc dans de nombreux pays, "Music detected" sur lequel on retrouve des artistes comme l'Indonésienne Anggun ou l'Américaine Beverly Jo Scott.
En 2003, le duo publie un best of de leurs compositions, "Essence of the Forest". Puis les deux musiciens prennent de la distance pour se consacrer à leurs projets respectifs. Eric Mouquet poursuit seul l’aventure Deep Forest et l’exploration des sonorités autour du monde. En 2008, il conçoit l’album "Deep Brasil" avec le Brésilien Flavio Dell Isola, qui signe les paroles et le chant.
Cinq ans plus tard, Deep Forest retrouve les bacs des disquaires avec les sorties presque simultanées de deux albums, "Deep India" et "Deep Africa". Pour le premier, sorti en février 2013, Eric Mouquet a collaboré avec le musicien indien Rahul Sharma, joueur de santour, un instrument à cordes oriental. À cette occasion, le groupe se produit pour la première fois en Inde, à Bangalore. Sur scène, Eric Mouquet s’entoure du bassiste sénégalais Alun Wade, du batteur David Fall et de la chanteuse Olyza Zamati.
Paru en juin 2013, l’album "Deep Africa" voit la participation de nombreux artistes africains : Lokua Kanza, Wasis Diop, Blick Bassy ou encore les chanteuses ivoirienne Olyza Zamati et sud-africaine Zama Magudulela.
Fruit des constantes expérimentations électroniques d’Eric Mouquet, dans son home studio hyper sophistiqué installé dans le Périgord, l’album "Evo-Devo" parait en 2016. En 2018, suit l’album "Epic Circuits", enregistré avec le Britannique Gaudi et teinté de sonorités dub.
En décembre 2020, l’album "Deep Symphonic" regroupe une dizaine de titres emblématiques du groupe ("Sweet Lullaby", "Bulgarian Melody", "Deep Requiem"...) réarrangés de façon symphonique.
Février 2022