Prix découvertes

Rokia Traoré

Rokia Traoré
© Danny-Willems
Passeport artiste
1974
Mali
Pays:  Mali
Langue:  Bambara Anglais Français
Qualité:  Auteur / Chanteuse / Compositeur
Genre musical:  Musique africaine / Musique mandingue

Entre tradition et modernité, Rokia Traoré trace un chemin particulier dans la création africaine, et malienne en particulier. Si elle ne renie pas du tout ses origines, elle adapte sa musique à son temps et à ses préoccupations sans à priori ni contrainte.  Elle mène sa barque avec maestria et talent, parcourant le monde inlassablement pour présenter sa musique...

Biographie: 

Rokia Traoré est née en 1974 dans la région de Belidougou au Mali, près de la frontière mauritanienne. Mais son enfance se déroule au fil des affectations de son père diplomate. Rokia évolue donc dans un milieu très protégé qui mêle tradition et modernité, en particulier au niveau musical. Son père pratique le saxophone et ses sœurs pratiquent le chant traditionnel dans les cérémonies familiales. Quant à la jeune Rokia, elle écoute du jazz (comme son frère), du blues (comme son père) et tout ce qu'un adolescent du monde occidental écoute dans les années 70 et 80. N'étant pas issue d'une famille de griots, la modernité musicale n'est nullement un tabou dans sa famille.

Ecriture

Cependant, Rokia ne se détourne en aucun cas de l'environnement musical de son pays d'origine. La tradition des griots et les grandes voix maliennes n'ont pas de secrets pour elle. Dotée d'une voix exceptionnelle, Rokia travaille avec un ami de son père, le vieux maître Massamou Welle qui aide la jeune femme à forger sa voix. À l'âge adulte et après de multiples allers et retours avec son pays, Rokia s'installe sur sa terre natale. Elle ne tarde pas à écrire elle-même quelques chansons dont les influences occidentales mêlées aux sonorités traditionnelles séduisent tout un public de gens de sa génération et d'étudiants.

Lorsqu'elle a 20 ans, Rokia est déjà donc une artiste connue dans son pays. Le musicien Ali Farka Touré, star dans son pays, repère Rokia. Il peaufine son apprentissage de la guitare et l'encourage à composer.

En 1995, le titre "Finini" remporte un fort succès. Rokia fait de nombreux concerts. C'est une jeune femme brillante qui préfère étudier la musique dans son pays, plutôt que s'inscrire dans une grande école en Europe. C'est ainsi qu'après quelque temps dans une école en Belgique, elle rentre au Mali pour faire de la chanson son métier. Elle suit des cours à Bamako et travaille avec le musicien Souleymane Kolly. Invitée au MASA (Marché des Arts et des Spectacles en Afrique), elle préfère refuser et continuer à travailler.

Prix Découvertes

Le déclic se situe en 1997 quand Rokia concourt pour le prix Découvertes Afrique de Radio France Internationale. Avec sa guitare sèche et accompagnée de quelques instruments traditionnels, elle présente un titre sur les enfants, "Mouneïssa". Présidé par Papa Wemba, le jury est immédiatement séduit par cette voix haute et cette personnalité musicale exceptionnelle. Elle remporte donc le prix face à des artistes plus connus et plus expérimentés.

À partir de ce jour, sa notoriété dépasse les frontières du Mali. Après deux grands concerts coup sur coup à Bamako en décembre 1997, les deux parrainés par Oumou Sangaré et Habib Koité, Rokia s'envole en Europe pour y enregistrer son album. Mis en boîte à Amiens dans le nord de la France, "Mouneïssa" sort donc fin mars 98. Entièrement signés par la jeune femme, les neuf titres de l'album sont écrits et chantés en bambara. Son talent musical vaut largement ses dons d'auteur. Ses textes sont de longs poèmes tendres et philosophiques fortement teintés de blues.

En mai, c'est à Bruxelles que Rokia démarre une tournée européenne qui la mène en Suisse, en Allemagne, puis à Paris le 25 mai. Mais elle est également invitée de nombreux festivals dont les Musiques Métisses d'Angoulême fin mai ou les Francofolies de La Rochelle en juillet.

Depuis son premier album, Rokia ne cesse de tourner. Elle est invitée du Midem 99 (Marché International du Disque) à Cannes pour un concert aux côtés de Sally Nyolo et de Kadja Nin.

En 2000, la chanteuse sort un deuxième album, "Wanita", qui remporte un vif succès. De nombreux médias, en France (Le Monde), aux États-Unis (Billboard, New York Times) ou en Angleterre (Folk Roots), le qualifient de meilleur album du moment, voire de l'année. Tout naturellement, elle reprend la route. En 2001, elle donne une tournée européenne en juillet (Italie, Suisse, France, Espagne) et américaine au mois d'août.

2003 : "Bowmboï"

La jeune femme revient avec un nouvel album intitulé "Bowmboï" en septembre 2003. Enregistré en grande partie au Mali, il oscille entre sonorités africaines et ambiance folk. La voix de Rokia se pose avec justesse et finesse sur des titres aussi différents que "M'Bifo" qui ouvre l'album, un titre écrit pour l'anniversaire de son mari ou "Mariama" en duo avec le chanteur Ousmane Sacko. Autre invité sur cet album, le prestigieux Kronos Quartet qui ouvre l'univers de l'artiste vers la musique classique contemporaine.

Se distinguant un peu plus de ses paires, Rokia Traoré arbore sur la pochette du disque une coupe de cheveux (crâne rasé) qui peut dérouter certaines personnes attachées à la tradition. Rokia démontre une fois de plus sa modernité et son indépendance d'esprit.

Elle se produit à Paris les 17 et 18 octobre 2003 avant d'entamer une grande tournée internationale.

Le succès de Rokia ne se limite plus seulement aux pays francophones. En décembre, "Bowmboï" est élu meilleur album de l’année dans la catégorie "World Music" par le média britannique BBC Radio 3.

En 2004, elle participe aux grands festivals français, tels que celui des Vieilles Charrues, puis effectue outre Atlantique une longue tournée qui passe par la Jamaïque, le Canada et les États-Unis pour accompagner la distribution internationale de son disque. En octobre sort le DVD "Live" enregistré quelques mois plus tôt lors des concerts donnés dans la salle parisienne de La Cigale. À cette occasion, elle avait invité l’Anglo-Nigerian Keziah Jones.

Au cours du premier trimestre 2005, elle se produit près de 50 fois, essentiellement en France. Cette forte présence permet à "Bowmboï" de dépasser les 100.000 exemplaires vendus et d’être certifié Disque d’or.

En octobre et en novembre, Rokia retourne aux États-Unis pour participer à une tournée en hommage à Billie Holliday en compagnie des chanteuses américaines Fontella Bass, Joan Osborne, Dianne Reeves et Nancy Wilson.

Après cette tournée, qui se termine en 2005, Rokia multiplie les allers-retours entre Amiens et Bamako, puis décide de s'accorder une pause. Pendant ce temps, elle s'occupe de son fils et réalise la musique d'un spectacle, "2147, l'Afrique" (de Jean-Claude Gallotta et Moïse Touré), créé le 19 septembre 2006 à Bamako. Elle profite de ce repos pour réfléchir et préparer son prochain album.

2008 : "Tchamanché"

De peur de décevoir, après l'énorme succès "Bowmboi" (Disque d'or) Rokia prend du temps et du recul pour enregistrer. Elle s'installe donc dans le sud de la France, près de Bordeaux, et investit le studio La Fabrique pendant plusieurs mois. Elle y fait venir d'Angleterre, un producteur et des dizaines de guitares et amplis vintage.

Encore une fois, Rokia Traoré signe ses chansons, à l'exception d'une reprise de Billie Holiday, "The man I love" qu'elle chante en anglais. Cette reprise met en exergue toute l'étendue du talent de Rokia, commençant la chanson en blues, puis évoluant progressivement vers du scat africain. Dans ce nouvel album, "Tchamanché", sorti le 19 mai 2008, Rokia Traoré innove et surprend une fois encore en utilisant le son patiné des guitares Gretsch, fréquemment utilisées pour le rhythm'n'blues.

Le style de cet album est plus moderne, avec des touches de blues et de rock. Mais Rokia reste profondément attachée à sa culture musicale, et n'abandonne ni les paroles en bambara ni le ngoni, présent dans ses précédents albums. Pour se rapprocher encore un peu plus du Mali, elle décide que la sortie de son album se fera à Bamako, le 16 mai. Elle donne pour l'occasion un concert organisé par le CCF au Studio Blonba.

Dès le 20 avril, elle se produit sur la scène du festival du Printemps de Bourges. Le 10 juin, elle passe à la Cigale à Paris et poursuit une tournée française et européenne.

En France, "Tchamanché" est récompensé aux Victoires de la Musique 2009 dans la catégorie "Album de musiques du monde ". La tournée accompagnant le disque amène Rokia Traoré dans le monde entier pour plus de 200 dates jusqu'à la fin de l'année 2010.
Entre-temps, l'artiste a décidé de s'engager en faveur des jeunes de son pays. En 2009, elle crée la fondation Passerelle, à Bamako, en vue d'aider des chanteurs et des techniciens du son débutants à se professionnaliser. Progressiste, elle souhaite ainsi donner un coup de pouce au développement d'une industrie culturelle au Mali.

Fin 2010, le metteur en scène Peter Sellars la sollicite afin de composer la musique de la pièce "Desdemona", sur des textes de l'écrivaine américaine Toni Morrison. Rokia Traoré interprète cette pièce en chanson sur les scènes d'Europe et des États-Unis au printemps et à l'automne 2011. Pour l'accompagner, elle a choisi trois musiciens et trois choristes venus du Mali et issus de sa fondation Passerelle.

Ce spectacle lui donne envie de poursuivre ce travail avec les artistes issus de sa fondation, dans un hommage à la tradition mandingue. Elle crée alors le projet musical "Roots", des concerts acoustiques construits autour de la voix et des cordes, où elle est entourée de choristes féminines et de musiciens jouant du ngoni, de la kora et du bolon, des instruments traditionnels maliens. Les premières représentations sont données les 16 et 17 septembre 2011 à Bamako, puis se poursuivent en France et en Europe.

2013 : "Beautiful Africa"

Au printemps 2013, Rokia Traoré dévoile son cinquième album, "Beautiful Africa". Enregistré à Bristol, elle en a confié la réalisation à l'Anglais John Parish (connu notamment pour son travail avec PJ Harvey ou Dionysos), qui scelle le son rock de l'album, mêlé à des sonorités plus traditionnelles. La chanson titre, interprétée en bambara, français et anglais, et écrite dans l'urgence avant l'enregistrement, au moment de la guerre au Mali, est une ode à son pays et à l'Afrique.

Du 17 au 19 avril, l'artiste se produit au Petit Bain à Paris avant des prestations prévues lors des grands festivals de l'été.

En mai 2015, elle fait partie du jury du prestigieux Festival de Cannes aux côtés des présidents, les cinéastes américains Joël et Ethan Cohen.

2016 : "Né so"

En février 2016 sort le sixième album de l’artiste malienne, "Né so" ("Chez moi", en français), produit une fois encore par John Parish. Ce dernier album est écrit en français et en bambara, à l’exception du titre "Strange Fruit" qui est une reprise de Billie Holiday. Rokia Traoré entend faire de "Né so" une suite logique de "Beautiful Africa", un mélange subtil et dépouillé de sons africains et occidentaux, ballades, blues, groove, un album concocté à Bamako dans les jardins de sa fondation. Quant au titre éponyme "Né so", la chanteuse-guitariste l’a écrit en 2014 après une visite auprès de réfugiés maliens au Burkina Faso, un sujet cher au cœur de Rokia Traoré.

L’artiste donne six concerts en France de février à mars, puis s’envole aux États-Unis pour y donner quelques concerts avant de retrouver sa ville de cœur, Bamako, et inaugurer la scène de sa fondation Passerelle.

En mars, l'artiste est nommée Ambassadrice de bonne volonté régionale pour l'Afrique de l'Ouest et centrale, par le HCR, l'agence des Nations Unies pour les réfugiés. Très sensible au sort des personnes déplacées, elle travaille avec cette organisation depuis 2013.

En avril, une grande scène est inaugurée au sein de la fondation Passerelle. Rokia y travaille d'ailleurs sur son nouveau projet qu'elle mûrit depuis de nombreuses années. Il a été élaboré en collaboration avec la griotte et historienne malienne Bako Dagnon avant sa disparition en 2015. Il s'agit de l'évocation de l'épopée de Soundiata Keïta, fondateur de l'empire mandingue au XIIIe siècle. Rokia confie la mise en scène à l'Américain Peter Sellars et le spectacle s'intitule "Dream Mandé-Djata". Il est présenté au Festival d'Avignon du 21 au 24 juillet. Chants en bambara accompagnés d'une kora et d'un ngoni, alterne avec un récit en français.

Toujours dans le cadre de sa fondation passerelle, elle initie un autre projet autour de la reprise de classiques bambara et d'adaptations de chansons françaises. Ce tour de chant s'intitule "Bamanan Djourou". Elle se produit à différents endroits en Afrique et en France.

En janvier 2018, elle se produit à la Fondation Cartier pour l'art contemporain dans le cadre de l'exposition "Malick Sidibé, Mali Twist" pour Les Soirées Nomades.

On retrouve cette artiste complète au festival d'art lyrique d'Aix-en-Provence en juillet, alors qu'elle interprète le prologue de "Didon et Enée" d'Henry Purcell. Elle signe aussi la musique de "Kirina", "opéra contemporain" de Serge Aimé Coulibaly, un spectacle de neuf danseurs, 3 musiciens et un slameur.

Au cours de l’année suivante, la chanteuse malienne se produit en France, au Luxembourg et au Royaume-Uni, alternant ces différents spectacles qu’elle mène de front.

Imbloglio judiciaire

Alors qu’elle se rend pour l’un d’entre eux à Moscou, elle est arrêtée en novembre 2019 lors de son transit en France en raison d’un mandat d’arrêt émis par la justice belge à la suite d’une plainte déposée par son ancien compagnon concernant ses droits vis-à-vis de leur fille.

C’est le début d’un long feuilleton judiciaire rythmé par de multiples rebondissements médiatisés. Libérée au terme de sa garde à vue, Rokia Traoré donne un concert en janvier 2020 à la maison de l’Unesco à Paris en tant que marraine de la Semaine du son, avant d’être à nouveau visée par la justice belge.

Sa mise en détention en France durant deux semaines en mars suscite de nombreuses réactions destinées à obtenir sa libération. Dans ce contexte marqué par le début de la crise sanitaire mondiale liée au Covid-19, elle recouvre la liberté, placée sous contrôle judiciaire dans l’attente de sa remise aux autorités judiciaires belges.

Mais l’artiste s’affranchit de ces mesures et revient au Mali en mai, s’exposant de ce fait à une nouvelle arrestation sur le sol européen, ce qui est susceptible d’avoir des conséquences sur sa carrière internationale.

Malgré cette situation, Rokia Traoré poursuit à Bamako la préparation d’un nouveau spectacle intitulé "Il était une fois, une rose de fer". Initialement prévues en France et au Danemark en juillet 2020, les premières représentations de cet hommage à la chanteuse sud-africaine Miriam Makeba ont été décalées en raison de la pandémie et reprogrammées en 2022.

Décembre 2021

Discographie
NÉ SO
NÉ SO
Album - 2016 - Parlophone
BEAUTIFUL AFRICA
BEAUTIFUL AFRICA
Album - 2013 - Nonesuch/East West
TCHAMANTCHE
Album - 2008 - Universal jazz
BOWMBOI
Album - 2004 - Indigo
WANITA
Album - 2000 - Indigo
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