Diam's
Diam’s est une perle rare au sein d'un rap français largement masculin. À force d’énergie, la jeune femme a gagné le respect du public et des professionnels.
Mélanie Georgiades naît le 27 juillet 1980 à Nicosie, capitale de Chypre, d’une mère française et d’un père chypriote. Celui-ci délaisse très tôt sa famille et Mélanie, fille unique, est élevée par sa mère, en France, dès ses quatre ans. Son enfance se déroule dans la banlieue pavillonnaire d’Orsay au sud de Paris. Mais la jeune fille s’y ennuie et trouve ses amis dans les cités alentours où le rap est au coeur de la vie des adolescents.
Fan de Francis Cabrel, elle est aussi une grande admiratrice de Suprême NTM et de Public Enemy. Le rap est sa passion et elle ne tarde pas à écrire ses propres titres. Elle prend alors le nom de Diam’s séduite par la définition du dictionnaire : "Objet de luxe et de parure. N'est composé que d'éléments naturels. Le diamant ne peut être brisé que par un autre diamant."
1995 : Diam's en groupe
Dès ses 15 ans, elle rappe au sein de groupes, de "posse", à travers la banlieue parisienne, comme Instances Glauques à Bagneux. Le nom de Diam's s'installe sur la scène rap amateur, en dépit d'un indéniable machisme ambiant.
C’est aussi à Bagneux qu’elle rencontre vers 1997, Yannick du collectif Mafia Trece. Avec eux, elle partage deux titres sur l'album "Cosa Nostra" en 1998. Mais suite à des problèmes de contrat, elle cesse la collaboration et retrouve son indépendance. Cette même année, Diam's participe à la compilation "Le groove prend le maki" avec les Neg Marrons. Elle participe à la tournée anti-raciste "Sachons dire non" et joue au festival rap XXL de Bobigny. Diam's réussit à effecteur une cinquantaine de concerts entre 98 et 99 en dépit de l'absence de structure professionnelle autour d'elle.
Parallèlement, elle fait la rencontre de Black Mozart, compositeur rap et surtout, producteur. C’est grâce à lui qu’elle se lance professionnellement dans la musique même si sa vie est alors faite de galères et de petits boulots. Ensemble, ils mettent au point le premier album de Diam's, "Premier mandat", qui sort en 1999 sur le label indépendant Reel Up. On y entend des guests américains (DV alias Khrist et Heather B) et français (Mr R., Driver et Vibe). Mais le CD est un échec commercial.
Diam's ne lâche pas prise. Elle continue de marquer la scène rap de sa présence qui, d'année en année, se féminise. L'ex-garçon manqué devient une femme qui sait se faire respecter. Par ailleurs, sa rencontre avec son manager, Choukri, lui permet de se professionnaliser.
En 2000, Diam's reprend un titre de son idole Francis Cabrel, "Saïd et Mohamed", sur la compilation "HipHopée". Elle fait aussi un duo remarqué ("Un peu de respect") avec l'autre vedette féminine du rap de cette époque, Lady Laistee, ainsi qu'un duo avec Kanmouze et Jongo Jack, "Promise". La chanteuse ne cesse d'être dans l'actualité via les featurings et les participations aux émissions de radio où les rappeurs improvisent en direct. C'est ainsi que Diam's contribue en 2001 à la compilation "Original Bombattack" du nom d'une émission de la radio Générations 88.2. Elle y interprète "Suzy" qui connaît un certain succès et fait décoller sa carrière.
2003 : "Brut de femme"
La maison de disques EMI propose un contrat à la chanteuse en avril 2002. Avec elle, elle signe un maxi vinyle de deux titres, "Pogo" et "1980". Mais la sortie de l'album est annulée suite à des problèmes internes à EMI. C'est le label Hostile qui sort finalement son second album, "Brut de femme", le 27 mai 2003. Elle le revendique comme autobiographique. On y découvre des sujets inédits dans le rap français comme la violence conjugale, la place des filles en banlieue ou l'absence d'un père.
Le CD est un succès et s'écoule à 250000 exemplaires. Mais ce qui fait de Diam's une vedette est le simple "DJ", tube de l'été 2003, qui part à plus de 700000 exemplaires.
Au même moment, Diam's participe à la bande originale du film "Taxi 3", signe d'une solide popularité chez les jeunes Français.
Le 20 octobre 2003, Diam's passe à l'Elysée-Montmartre à Paris, sa première grande scène parisienne. Quelques semaines plus tard, le 20 janvier 2004, elle remet ça au Bataclan. Enfin, le 28 février 2004, Diam's reçoit la Victoire de la musique du meilleur album rap/hip hop de l'année.
En avril, Diam's participe au projet de Kery James, "Savoir et vivre ensemble". On l'entend aussi sur l'album de Layone et sur "Algérie solidarité", un CD au profit des victimes des tremblements de terre de 2003. Elle chante d'ailleurs à Alger le 13 mai. Dans la foulée du succès, Diam's participe à de nombreux festivals dont les Rencontres Méditerranéennes de Béziers en mai 2004, le festival Ebony à Dakar en juin, aux Francofolies de la Rochelle et au Paléo festival de Nyon (Suisse) en juillet. Enfin, le 3 novembre 2004, une grande soirée est organisée pour lancer le DVD live de l'artiste.
En février 2005, Diam's apparaît aux côtés de la crème du rap français (113, le Ministère Amer, Disiz la Peste…) sur la compilation "Illicite projet". Puis, elle se consacre à l'écriture d'un troisième album, qu'elle enregistre dans la foulée. En décembre, DJ Dimé sort "Les 10 ans d'une Diam's", un CD en forme de rétrospective dans lequel il remixe les titres emblématiques de la chanteuse, mais aussi quelques inédits et raretés.
2006 : " Dans ma bulle"
Alors que son troisième album n'est pas encore dans les bacs, Diam's repart, en janvier 2006, sur les routes pour un avant-tour de huit dates. Le 6 février, sort "Dans ma bulle", qui se classe immédiatement en tête des ventes. Dans la droite ligne de son album précédent, ce troisième opus semble être celui de la confirmation. Comme dans "Brut de femme", Diam's n'hésite pas à se dévoiler, ni à revendiquer son appartenance à une France des banlieues, comme dans le titre "Ma France à moi" ("Ma France à moi, elle parle fort/ elle vit à bout de rêves/Elle vit en groupe, parle du bled et déteste les règles"). Elle évoque aussi le suicide dans "TS".
Avec "Jeune demoiselle", un texte plus léger, Diam's retrouve les aspirations des jeunes femmes de son âge : "Jeune demoiselle cherche un mec mortel/ un mec qui pourra me donner des ailes…. "Dans ma bulle" est donc un album varié, témoin des préoccupations d'une rappeuse consciente. Le premier simple extrait de cet album s'intitule "La boulette".
L'album est un succès dès sa sortie : dès la première semaine, "Dans ma bulle" est n°1 des ventes, avec 50000 albums vendus. Fin février, l'album est à la première place des 200 albums les plus vendus en France. Non contente d'être diffusée à longueur de journée sur les ondes, Diam's s'attaque à la télévision en présentant, dès le 14 mai, l'émission "Télé Diam's" sur MCM. Tous les dimanche à 20h55, Mélanie, rédactrice en chef et présentatrice, propose son actualité et sa propre hiérarchie de l'information musicale.
Quelques jours plus tard, le 26 mai précisément, Diam's remplit l'Olympia de Paris. Le 22 juin, la sortie de "Jeune Demoiselle", le deuxième simple, ne fait que confirmer le succès de la jeune femme. Avant de continuer sa tournée, qui la mène aux quatre coins de la France mais également en Suisse et en Belgique, Diam's se voit proposer le poste de directrice artistique de la division française de Motown. Au sein du légendaire label de musique noire américaine, Diam's est chargée de dénicher les nouveaux talents français.
Les festivals de l'été voient un public déchaîné reprendre son tube "La Boulette" en chœur. A Solidays, comme aux Francofolies de La Rochelle, au Festival des Vieilles Charrues de Carhaix ou au Paléofestival de Nyon, en Suisse, le succès est au rendez-vous pour Diam's.
Le public en redemande et la tournée se poursuit en 2007. Les 29, 30 et 31 mars, Diam’s remplit trois Zénith parisiens avant de s’envoler vers l’Afrique pour une série de concerts au Gabon, en Côte d’Ivoire et au Cameroun. En juin, elle sort un imposant DVD "Autour de ma bulle", composé de quatre disques audio et vidéo qui résument sa folle année et demi de concerts.
L’année 2008 est bien plus sombre. Diam’s supporte de plus en plus mal les mises à nue que la presse people fait de sa vie et le décalage entre son énorme succès public et sa solitude personnelle. C’est la dégringolade, la dépression. La chanteuse séjourne trois mois en hôpital psychiatrique et n’arrive plus à écrire.
2009 : "S.O.S."
Ce n’est qu’en juin 2009 qu’elle refait surface et annonce la préparation d’un nouvel album. En septembre, Diam’s se marie et un mois plus tard, le magazine Paris Match publie des photos volées d’elle et de son mari sortant d’une mosquée, sur lesquelles la rappeuse apparaît voilée. Des images qui font couler beaucoup d’encre quelques semaines avant la sortie de son quatrième disque "S.O.S", le 16 novembre.
La chanteuse refuse toute interview, arguant que les réponses aux questions que se posent ses fans et les journalistes se trouvent dans "S.O.S", un album confession dans lequel Diam’s confirme notamment sa conversion à l’Islam. Elle y retrace de manière bouleversante sa descente aux enfers après le succès de "Dans ma bulle" (1 million d'exemplaires vendus), racontant en détail ses peines de cœur, ses séjours à l’hôpital ou les effets des antidépresseurs qui lui ont "grillé les neurones".
Elle y donne aussi sa vision des rapports hommes / femmes, y défend une nouvelle fois une France métissée dans "l’Honneur d’un peuple" et prend pour la première fois position contre la loi qui interdit le port de signes religieux ostentatoires à l’école publique, en défendant clairement le port du voile dans la chanson "Lili".
Souvent polémiques, toujours rageurs, les textes de ce nouvel opus ne laissent pas indifférents. "S.O.S" se classe en tête des ventes d'albums en France dès sa sortie. La rappeuse reverse l’intégralité de ses royalties à la fondation Big up Project, qu’elle préside, et qui œuvre pour la protection de l’enfance défavorisée en Afrique.
La tournée de "S.O.S" est également amorcée en novembre, avec quatre concerts donnés à guichets fermés fin décembre à la Cigale (le 20), à l’Olympia (le 21 et le 22) et à l’Elysée-Montmartre (le 23).
Le 12 décembre 2010, la rappeuse se produit à Dakar au Sénégal, la dernière date de la tournée S.O.S.. Une dernière date avant l'arrêt de sa carrière.
L’écriture, un exutoire
Après trois ans de silence "nécessaire pour réfléchir", la chanteuse, également mère d’une petite fille prénommée Maryam, revient en 2012 avec une biographie intitulée "Autobiographie". À 32 ans, Diam’s évoque sa conversion à l’islam et sa décision de porter le voile, ainsi que son long parcours pour sortir de la dépression.
À l’occasion de son interview dans l’émission "Sept à huit" diffusée sur TF1 le 30 septembre 2012, elle annonce la fin de sa carrière de rappeuse et apparaît voilée pour la première fois.
Un deuxième livre et des confessions intimes
Suite à l'attentat perpétré contre le journal Charlie Hebdo en janvier 2015, la rappeuse appelle sur son compte Facebook à ne pas se laisser "prendre au jeu diabolique de l’escalade des haines", ajoutant : "Je suis française, je suis musulmane et je suis affligée". Elle précise : "Je m’indigne de toutes les barbaries perpétrées ici et là au nom de l’islam."
En mai 2015, Mélanie Georgiades revient avec un deuxième livre très personnel "Mélanie, Française et musulmane", dans lequel elle veut démontrer qu’il n’y a pas de "contradiction entre ces termes". Pas de prise de position dans cet ouvrage, mais un besoin de partager sa nouvelle vie, loin du succès qui l’a propulsée au début des années 2000. On y apprend qu’elle a donné naissance à un deuxième enfant, un petit garçon, après un divorce et un remariage.
Décembre 2016