Claudio Capéo et Gauvain Sers, à contre-courant

Les chanteurs français Claudio Capéo et Gauvain Sers. © Getty Images/Tony Barson // AFP/Xavier Leoty

Ils ont débarqué en force il y a un peu moins deux ans. Claudio Capéo et Gauvain Sers n'avaient pourtant pas forcément le profil à se frayer un chemin populaire. Les voilà désormais érigés en incontournables des festivals. Nous les avions rencontrés à Pause Guitare à Albi.

Ces deux-là bénéficient d'une véritable aura de sympathie auprès du grand public. Gauvain Sers, le Creusois à la casquette de poulbot. Claudio Capéo, le hipster alsacien dégainant son accordéon. Pour eux, les ventes de disques ont des airs de feux d'artifice (surtout le second, certifié Disque de diamant), les dates de concert pleuvent. Rien d'étonnant donc à ce qu'ils squattent actuellement les festivals d'été. 

Claudio Capéo, sur les routes depuis presque deux ans, joue les prolongations dans des spots qu'il n'a pas encore sillonnés. "On a envie d'être ensemble avec les gars et de parcourir la France. Pendant dix ans, on était des inconnus. Alors on en profite". Il dit "on" parce que Claudio Capéo, c'est un groupe. Il n'adopte pas la posture du chanteur égocentrique et tient à la présence des musiciens durant les interviews. 

Quand il a participé au télé-crochet The Voice, il l'a d'ailleurs fait pour sauver la formation du péril. L'espoir de la dernière chance. "Cela devenait difficile financièrement. On ne se produisait que dans des bistrots et dans la rue. J'ai participé à l'émission pour rendre visible le projet. Les concours, ce n'est pas du tout notre truc à la base. Comme j'étais seul lors de mes deux passages, les gens ont mis du temps à intégrer que je faisais partie d'un vrai collectif". 

Malgré sa sortie précoce du jeu, l'ancien menuisier marque les esprits. Dans la foulée, Sébastien Saussez le patron du label indépendant Jo&Co le prend sous son aile. Pascal Nègre, l'ex-directeur d'Universal, y décèle lui aussi un potentiel populaire et propose de coproduire le troisième album (les deux premiers étant passés totalement inaperçus). 

La chanson Un homme debout inonde les FM. Ça va ça va et Riche connaissent le même sort heureux. "Preuve qu'avec des mots simples, tu peux dire tellement de choses et toucher les gens. On ne cherche pas à faire de la poésie, ce qui signifie que le propos est vide de sens. Quand on se penche de plus près, Un homme debout est un morceau ovni. De l'accordéon et l'évocation d'un SDF, ce n'est pas mainstream sur le papier". 

C'est aussi le cas de Pourvu de Gauvain Sers, la chanson la plus diffusée de son disque qui vient de dépasser la barre des 100 000 exemplaires. "Je ne m'y attendais pas parce que c'est un titre qui, d'une part, n'a pas de refrain et, d'autre part, n'a pas de batterie électronique comme dans la plupart des morceaux aujourd'hui. Il y avait pratiquement tous les critères pour que cela ne rentre pas en radio". 

L'élément accélérateur dans la destinée de ce garçon de 28 ans, on le connaît. Il s'appelle Renaud. En 2016, le chanteur "énervant" le plébiscite pour assurer ses premières parties. Près de 80 dates. Difficile de rêver meilleur rampe de lancement pour celui qui écumait jusqu'alors les petits lieux de chanson. 

Le lien de parenté artistique entre les deux est criant. Marquage à la culotte médiatique. Au cours de chaque entretien, le nom de son aîné est évoqué. Atout et handicap à la fois. "Ce que Renaud a fait est d'une générosité sans nom. En quelque sorte, il m'a prêté son public. La manière dont il parle de moi est extrêmement adorable. Après, on me renvoie à cela constamment et c'est parfois compliqué. Mais je comprends parce que c'est un premier album et on a besoin de coller des étiquettes. Pour que cela s'atténue, c'est à moi de faire mes preuves au fil des albums qui vont suivre". 

En duo acoustique jusqu'en mars dernier, Gauvain Sers est désormais accompagné de quatre musiciens. "Cela n'aurait pas été possible si je n'avais pas rencontré le succès". Une autre bonne étoile veille sur lui en la personne de Jean-Pierre Jeunet. Le réalisateur du Fabuleux destin d'Amélie Poulain s'est emparé du clip de Pourvu. D'abord, un non catégorique. Puis en écoutant ladite chanson, il a fini par se raviser. "Il a aimé mes références dans ce texte. On a un point commun lui et moi, c'est la nostalgie de l'enfance." 

Selon Claudio Capéo, cette exposition est arrivée pile-poil au bon moment. Il concède qu'il n'aurait pas eu les épaules solides pour digérer cela il y a dix ans. "Je pense que j'aurais pété les plombs. Déjà que là, j'ai eu du mal à assimiler certaines choses. Cela peut paraître surprenant de confier cela mais j'ai fait une déprime quand je me suis mis à gagner du fric. Je n'en avais jamais eu de ma vie et d'un coup, j'en reçois plein. À un moment, j'ai réalisé et je me suis dit : c'est quoi cette histoire ?". 

L'un comme l'autre a déjà la tête dans la conception du prochain disque. Pas de pause envisagée. Suivre l'exemple de Vianney qui était revenu de suite aux affaires. Claudio Capéo a quarante-trois morceaux dans sa besace et opte pour une suite discographique en début d'année 2019. Ce sera certainement au printemps prochain pour Gauvain Sers. Même issue au rendez-vous ?

Claudio Capéo (Jo and Co/Sony Music) 2016
Site officiel de Claudio Capéo
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Gauvain Sers (Fontana Records) 2017
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