Dick Annegarn entre ciel et Söl

Le musicien néerlandais Dick Annegarn publie l'album acoustique "Söl". © Romain Rondeau

Deux ans après son album de voyage symphonique 12 villes : 12 chansons, le chanteur néerlandais Dick Annegarn, "10k" comme il l’aime à l’écrire, revient avec Söl. Un album éclectique et acoustique, enregistré dans sa tanière de Laffite-Toupière, en Haute-Garonne.

 

RFI Musique : Qu’est-ce que ça signifie Söl ?
Dick Annegarn : Söl veut dire solitude en allemand. C’est aussi le sol sous nos pieds, la note de musique et puis un peu de soleil…

Qu’est-ce qui vous a donné envie de faire un nouveau disque ?
Je n’étais pas pressé de faire un disque, mais j’avais des chansons et j’avais besoin de faire des concerts. Comme nous étions confinés, mon calendrier s’était clairsemé, j’avais du temps, ce n’est pas toujours le cas.

Le confinement a-t-il influencé la création de ce disque ?
Je suis un chanteur de musique folk. Mais c’est vrai que c’est la première fois que j’ai réellement joué seul. C’est un disque surtout guitare/voix avec un peu d’harmonica.

Dans Né à La Haye, vous dites être né d’une colombe et d’un pigeon bleu…
C’est difficile de tricher avec le récit de sa vie. Je n’aime pas l’art autobiographique. Ce n’est pas l’objet de mon travail de poète. Si j’invite au vol d’oiseau dans cette chanson, c’est que plus jeune, je voulais me dissocier de la famille. Je cherchais une liberté qui s’est transformée en liberté poétique en mettant des images sur des choses intimes.

Une chanson sur Marylin Monroe, une autre sur Modigliani, une sur Saint Thomas. Ces figures très éclectiques vous inspirent ou vous racontez-vous à travers elles ?
Ce sont des personnages christiques. Je suis athée, mais je pense que les mythes, les prophètes et les gourous incarnent des choses qui nous ressemblent. Marylin est devenue une icône qui peut se reproduire à l’infini par Warhol. Mais l’âge va mal avec l’iconographie pop… on ne peut pas être Marylin à soixante ans. Elle s’est suicidée dans l’opulence avant qu’il ne soit trop tard. Il y a un fascisme de la jeunesse. Saint-Thomas s’est lui aussi senti lâché par son père, le Christ. Quant à Modigliani, il a connu la gloire, mais il voulait être sculpteur et on le connaît comme peintre… Il y a chez tous trois des cumuls de réussites et d’échecs qui peuvent être assez autobiographiques pour moi. Mais qui réussit sa vie du début à la fin ? Nous sommes tous ces personnages qui racontent nos âmes, en tout cas la mienne.    

Dans une autre atmosphère, il y a une chanson joyeuse qui évoque une comptine Les oiseaux à 4 pattes. Qui sont-ils ?
C’est quand même une chanson de souffrance ! (Rires) J’étais avec d’autres estropiés dans un centre de rééducation après une opération du genou. Les oiseaux à quatre pattes, c’était nous, qui avions des béquilles. On s’envolait un peu devant la cantine à rigoler même si la nourriture était insipide. On n’allait pas en Enfer ni au Paradis, mais on était un peu au Purgatoire. C’est assez mélancolique, mais vous savez, la mélancolie, c’est toujours la joie et la tristesse mêlées… donc je rigolais aussi de mes béquilles et de celles des autres (Rires).  

Vous paraphrasez Douce France de Charles Trenet en écrivant dans Tox "Brise la loi du silence cher pays de mon enfance". À qui s’adresse cette injonction ?
Le fake news est accaparé par les réseaux sociaux mondiaux, mais la France était déjà un pays de mensonge. Les gauloiseries étaient considérées comme bon-enfant, mais cette bonhomie cache des mensonges, des rumeurs, des faux scientifiques, des gens avec des solutions finales et radicales juste pour le buzz… La France de mon enfance est devenue intoxication médiatique et mentale. Le monde a bien changé.

Votre désir d’écrire et de chanter est-il toujours intact ?
Non. Söl n’est peut-être pas mon dernier disque, mais l’avenir est derrière moi, j’ai quand même 68 ans ! Je m’intéresse autant sinon plus à d’autres occupations comme l’association que j’ai créée : "Les amis du verbe", qui prône l’expression des autres. On a un festival, j’enregistre des amateurs qui chantent. On les met ensuite sur la chaîne YouTube : il y a 300 chansons.

Dick Annegarn Söl (Tôt ou tard) 2020
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