Marcel Amont, mort d'un fantaisiste
Chanteur, danseur, comédien et bien plus encore, Marcel Amont a fait les beaux jours d’une variété légère inspirée du music-hall. Ce saltimbanque, qui a voué sa vie à la scène, vient de nous quitter à l’âge de 93 ans.
Silhouette svelte, impeccable crinière blanche et yeux rieurs, Marcel Amont portait la joie de vivre en étendard, toujours avec élégance. Vedette dans les années 60 et 70 avec des chansons légères (Tout doux, tout doucement, Bleu blanc blond, Dans le cœur de ma blonde…), il revêtait sans complexes le costume d’amuseur public. "Je ne suis qu’un fantaisiste, mais j’en suis fier ! D’une nature gaie et souriante, je pense que distraire et dérider les gens est ma vocation première", expliquait-il sur les ondes de France Bleu.
Né à Bordeaux le 1er avril 1929, le Béarnais d’origine – Marcel Miramon pour l’état civil – était "monté à la capitale" au début des années 1950. Après quelques années de galère à se produire dans les cabarets, il s’était fait remarquer à l’Olympia en 1956, en première partie d’Édith Piaf. Cette année-là, l’Académie Charles-Cros lui décernait le Grand Prix du Disque, aux côtés de Serge Gainsbourg et de Juliette Gréco.
Interprète de ses propres chansons, il chantait aussi les mots des autres, avec lesquels il aura connu quelques-uns de ses plus grands succès : Le Mexicain, Moi le clown (Charles Aznavour), Le jazz et la java (Claude Nougaro) ou Le Chapeau de Mireille, offerte par Brassens, son grand ami, qui lui disait souvent "tu vaux mieux que ce que tu chantes".
Un homme de scène
Mais son bonheur, c’est sur la scène qu’il le trouvait. Véritable showman, il mettait en scène ses spectacles dans la lignée du grand music-hall. Lui qui, plus jeune, avait longtemps hésité entre le théâtre et la chanson, avait trouvé sa vocation en allant applaudir Yves Montand "Cette présence, les mimiques, les jeux de mains, les pas de danse… C’était la révélation, c’était ça, mon truc !". Il fit ses premiers pas en tête d’affiche en 1962 à Bobino pendant 100 jours. En 1965, il s’entourait de danseuses – une nouveauté à l’époque – pour se produire à l’Olympia, salle qu’il retrouvait en 1970 avec un spectacle réunissant danse, chansons et sketches. Il promènera cette formule durant des années à travers le monde.
Comme pour nombre de vedettes des 60’s, les années 80 furent moins clémentes avec lui et l’artiste se fit discret, même s’il donnait de nombreux concerts en France et à l’étranger, entre autres en Allemagne, en Italie ou dans les pays d’Asie. Il en profita aussi pour explorer des facettes moins connues de sa personnalité, comme son attachement à ses origines béarnaises, avec l’enregistrement de chansons traditionnelles (Que canta en biarnés, 1979, Marcèu Amont canta los poètas gascons, 1987…), et publia plusieurs livres à partir des années 90 (son autobiographie, Il a neigé, est parue en 2012).
Lui qui avouait avoir toujours privilégié la scène au détriment des disques se rattrapait en 2006, avec l’album Décalage horaire. Pour son retour discographique, mêlant reprises et nouveautés, il conviait Agnès Jaoui, Didier Lockwood, Biréli Lagrène et Gérard Darmon à partager des duos. À l’âge où d’autres coulent une retraite paisible, Marcel Amont préférait la vie de saltimbanque et continuait de se produire en concert, participant par exemple durant deux saisons au spectacle Âge tendre, la tournée des idoles ou encore célébrant ses plus de 60 ans de carrière à l’Alhambra à Paris en novembre 2012. La scène aura été son carburant, jusqu’au bout.