Les tambours Sabar résonnent avec Guiss Guiss Bou Bess

Guiss Guiss Bou Bess en concert au centre pénitentiaire de Rennes-Vezin © V.Passelegue/ RFI

Les musiciens du groupe franco-sénégalais, Guiss Guiss Bou Bess se produisent deux fois dans le cadre des Transmusicales de Rennes qui se poursuivent jusqu’au 8 décembre. Hormis leur passage au Parc Expo le 6 décembre, ils se sont vu inviter à faire un concert devant les détenus du centre pénitentiaire de Rennes-Vezin la veille. Une expérience pour tous.

Drôle d’endroit pour une rencontre et pourtant, c’est au centre pénitentiaire de Rennes-Vezin, que nous avons établi un premier contact avec le groupe franco-sénégalais Guiss Guiss Bou Bess. Dans le cadre des Transmusicales de Rennes, des actions culturelles sont menées sur différents fronts grâce à diverses associations rennaises, dont la Ligue de l’Enseignement qui s’est associé au festival pour proposer un concert en prison.

Rassemblés dans le gymnase de la prison de Vezin-la-Coquette à quelques kilomètres de Rennes, 75 détenus sont venus assister à ce concert particulier. "On va danser, aujourd’hui, c’est la fête" clame Mara Seck, percussionniste et chanteur, accompagné d’Aba Diop, percussionniste et du beatmaker Stéphane Costantini.

Dans le froid quasi polaire de l’endroit, les 3 musiciens accompagnés de deux danseurs, balancent avec une énergie folle, l’électro-sabar qui est leur marque de fabrique. Décidé à aborder ce concert comme un autre, le groupe électrise assez vite l’atmosphère de ce lieu si particulier. Percussions et sonorités electro viennent porter la voix du chanteur et les danseurs rendent le show spectaculaire.

Même si les détenus ne manifestent pas leur enthousiasme de la même manière qu’un public lambda, on sent une certaine animation dans les rangs, confirmée par le fait que deux ou trois danseurs finissent par se manifester au son des tambours et des beats électro.

Sabar plutôt que mbalax

Guiss Guiss Bou Bess en a fait du chemin depuis la première rencontre entre les deux principaux protagonistes, jusqu’à ce jour de décembre 2019 où le groupe se produit sur une scène occasionnelle, sans éclairage adéquat. Mara Seck sort en 2016 un EP de mbalax, musique populaire et incontournable du Sénégal, quand il rencontre Stéphane Costantini à Dakar, à qui il demande de remixer ses titres. Désireux d’aller plus loin dans le mariage du mbalax et de la musique électro, les deux musiciens se lance finalement dans une version modernisée du sabar, un genre musical à l’origine du ce même mbalax.

"Le sabar se joue en groupe et c’est difficile de jouer cela tout seul" d’où l’idée de recruter un deuxième percussionniste pour compléter le dispositif musical et se rapprocher au plus près de l’esprit du sabar. Mais Mara Seck insiste bien sur l’intention du trio : "Guiss Guiss Bou Bess veut dire ‘nouvelle vision’ une nouvelle vision de la musique, une musique du monde".  

Stéphane Costantini a lui aussi une approche tout aussi ouverte "Ce projet, c’est aussi faire aller les musiques électroniques vers ces percussions traditionnelles plutôt que l’inverse. Souvent les musiques électroniques se nourrissent de samples. L’idée était aussi de montrer aussi que le sabar se joue avec des différences de tempo et d’essayer de voir ce qui dans la famille des musiques électroniques peut fonctionner avec lui. Je suis très influencé par la Bass Music, le dub jamaïcain, la house sud-africaine, etc. Au Sénégal, l’électro est un genre minoritaire, cela vient essentiellement du Nigeria, d’Afrique du Sud et du Ghana" Cette interpénétration des genres et des cultures permet à GGBB de construire un répertoire qui lui est propre.

Premier album, Set Sela

Auteur d’un premier opus qui vient de sortir, Set Sela, le trio martèle son envie d’aller à la rencontre de l’autre. "Rendre visite" telle est la signification du titre en wolof. Les valeurs de partage, de fraternité, de dialogue et de respect semblent infuser les 12 morceaux de Set Sela. Mara Seck qui est le fils du musicien Alla Seck disparu en 1987, et qui travailla notamment avec Youssou N’Dour, revendique cet héritage. Un morceau Barcke Baye, est d’ailleurs dédié à ce parent trop tôt disparu. "Mon père est parti mais il a laissé un héritage" confirme Mara. Un héritage artistique inestimable pour ce dernier.

Entre passé, présent et futur, GGBB se veut porteur de messages et propose une musique puissante, emplie d’une énergie très communicative. C’est sans doute cela que les détenus de la prison de Rennes ont ressenti  alors même que les trois musiciens donnaient sur scène le meilleur d’eux-mêmes.

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