Kavinsky, zombie electro

Le musicien Kavinsky. © André Chemetoff

Le musicien français Kavinsky, révélé par le titre Nightcall en 2011 dans le film Drive, revient après 9 années d’absence avec Reborn. Détails sur ce proche des Daft Punk et autres artistes étiquetés French touch. 

Ce sont quelques notes de musique, glissées en ouverture d’un film, qui ont changé sa vie. Le titre Nightcall de Kavinsky accompagnait la virée nocturne d’un conducteur (Ryan Gosling) au volant de sa voiture en ouverture du film Drive du Danois Nicolas Winding. Très vite, ce titre est devenu indissociable de ce film sorti en 2011 et a récolté un vrai succès : à ce jour, plus de 230 millions de streamings sur Spotify, un peu plus sur YouTube, le titre a été pendant un temps la dixième meilleure vente en France. 

Ce morceau a été composé un peu plus tôt avec un des deux Daft Punk, Guy-Manuel de Homem Christo ; SebastiAn et Sébastien Tellier y ont aussi collaboré. Car à cette époque, Kavinsky, de son vrai nom Vincent Belorgey, faisait partie de l’entourage du duo masqué. En 2007, il avait assuré la première partie de leur mythique tournée mondiale Alive avec sa pyramide et son show lumière. Kavinsky a, lui aussi, créé un personnage, habillé d’une veste Teddy rouge. Dans la rue, des fans le reconnaissaient et demandaient, sans le savoir, à l’un des Daft Punk de les prendre en photo. 

 Cinéma 

En 2010, les parrains de la French touch, les Daft Punk, publiaient la bande originale d’un film de science-fiction, Tron Legacy, tandis qu’une seconde génération s’imposait avec Justice, DJ Mehdi, SebastiAn ou Breakbot, tous signés sur le label Ed Banger de Pedro Winter. Leur son était plus dur, la musique plus décomplexée, nourrie de multiples influences. Musicalement, Kavinsky semblait se situer entre ces deux générations, entre B.O. et musique de club. 

Kavinsky aurait pu être acteur, on l’a d’ailleurs vu dans le film Steack de Quentin Dupieux, que l'on connait aussi sous le pseudo, Mr Oizo, quand celui-ci poursuit sa carrière musicale. C’est par son entremise que Kavinsky se met à la musique, lorsqu'il lui donne un ordinateur avec un logiciel de création musicale, au milieu des années 90. Vincent se passionne pour les musiques de films : de l’électro minimaliste de John Carpenter pour Assault aux hard rock d’Iron Maiden sur Phenomena de Dario Argento.

Voiture américaine

Deux ans après le succès de Nightcall, l’album qui suit reprend les codes visuels (la voiture) et musicaux du titre à succès. Publié sur le label du groupe Air, Outrun célèbre l’univers de la voiture américaine. Tel un film, l’album raconte une histoire, celle d’un jeune homme qui s'est tué en Ferrari Testarossa en 1986 et qui réapparaît en zombie producteur de musique en 2006. Preuve des liens entre sa musique et l’automobile, deux de ses titres sont utilisés pour des publicités pour une marque de voiture et il est sollicité pour participer à la bande son du jeu vidéo Grand Theft Auto V. 

Que s’est-il passé entre ce premier album paru en 2013 et le second publié en 2022 ? Kavinsky avoue avoir été un peu à court d’idées, avoir pris du bon temps et s’être acheté… des voitures. Il aimerait qu’on lui parle d’autre chose que de ce titre Nightcall. Discret, il fuit les interviews. La pandémie de Covid et le confinement ont été un déclic pour lui.

Parti se mettre au vert dans une vieille maison de famille au milieu des champs en 2020, il y reste finalement plus longtemps que prévu et y entame son second album. Ensuite, direction le Motorbass Studio de feu Philippe Zdar, où il découvre de vieux et rares synthétiseurs. Gaspard Augé (moitié du duo Justice) lui a présenté Victor Le Masne (lui-même moitié de Housse de Racket). Le second a produit l’album du premier, il produit celui de Kavinsky.  

 Zombie 

Ce deuxième album, Reborn, est la suite de l’histoire contée par Outrun. Il est aussi sombre, mais moins dansant, toujours bloqué sur les sonorités des années 80, avec synthés entêtants et lourdes rythmiques. Justice et Kavinsky ont sans doute des goûts musicaux communs.

Cet opus ne comporte quasi aucun sample, hormis ceux d’un défibrillateur et d’un rythme cardiaque (sur Pulsar), qui illustrent la résurrection du zombie que nous avions laissé pour mort à la fin de l’album Outrun. Les invités sont nombreux, comme si Kavinsky cherchait avec eux la formule magique d’un tube radio : Cautious Clay, Morgan Phalen, Sébastien Tellier, et même Phoenix quasi-incognito pour clôturer cet album. Espérons que le zombie électro ne disparaîtra pas à nouveau. 

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Kavinsky Reborn (Record Makers/Virgin) 2022