
Blues, Gospel, Negro Spirituals, Jazz, Rhythm & Blues, Soul, Funk, Rap, Reggae, Rock’n’Roll… l’actualité de la musique fait rejaillir des instants d’histoire vécus par la communauté noire au fil des siècles. Des moments cruciaux qui ont déterminé la place du peuple noir dans notre inconscient collectif, une place prépondérante, essentielle, universelle ! Chaque semaine, l’Épopée des musiques noires réhabilite l’une des formes d’expression les plus vibrantes et sincères du XXème siècle : La Black Music ! À partir d’archives sonores, d’interviews d’artistes, de producteurs, de musicologues, Joe Farmer donne des couleurs aux musiques d’hier et d’aujourd’hui.
Réalisation : Nathalie Laporte
Retrouvez la playlist de l'Épopée des musiques noires sur Deezer
Nat King Cole
Il y a 50 ans, le 15 février 1965, le chanteur et pianiste américain Nat King Cole nous quittait à l'âge de 45 ans. Longtemps considéré comme un crooner lisse et sans grande saveur, son aura de charmeur consensuel s'est progressivement transformée au profit d'une image plus frondeuse. S'il connut le succès grâce à de jolies mélodies devenues intemporelles comme «Unforgettable», «L-O-V-E» ou «Nature Boy», il serait injuste de réduire sa destinée à celle du précieux chanteur de jazz pour jeunes filles en fleur.
Nat King Cole fut d'abord un excellent pianiste qui s'illustra avec son propre trio sur les scènes américaines, dès les années 40, et inspira nombre d'instrumentistes de renom dont un certain Ray Charles Robinson, futur «Genius of Soul». C'est finalement à contrecœur que Nathaniel Cole s'empara d'un micro et deviendra l'une des voix essentielles du XXe siècle. Surpris par l'impact de son répertoire chanté sur le grand public, il apprendra très rapidement à briller dans le feu des projecteurs. Mais, derrière ce halo de lumière artificielle, il y a le citoyen afro-américain qui ne se satisfera jamais des injustices sociales auxquelles seront confrontés ses contemporains.
Alors qu'on lui propose, en 1956, de présenter sa propre émission de télévision sur NBC à heure de grande écoute, il perçoit instinctivement l'intérêt d'une telle exposition. Il pourra enfin s'adresser au plus grand nombre, et faire scintiller la culture noire chaque semaine sur le petit écran. Mais, la société américaine n'est pas encore prête à accepter la présence d'un noir, si talentueux soit-il, sur une chaîne nationale... le 17 décembre 1957, malgré les soutiens de Sammy Davis Jr, Ella Fitzgerald, Harry Belafonte, Mahalia Jackson, Tony Bennett, Dean Martin ou Peggy Lee, et seulement un an après ses premiers pas télévisuels, Nat King Cole est contraint de quitter l'antenne, faute de sponsors trop frileux à l'idée de subventionner un spectacle cathodique animé par un «homme de couleur» !
Ce revers insupportable renforcera la détermination du chanteur à s'engager dans le mouvement pour les droits civiques. Il soutiendra l'élection de John Fitzgerald Kennedy, et applaudira les efforts de Martin Luther King. Nat King Cole fut donc un pionnier dans le combat racial des années 50 et 60 aux Etats-Unis. Il est regrettable que cette facette de sa personnalité n'ait pas toujours sa place dans les livres d'histoire.
C'est sûrement la raison pour laquelle le trompettiste et chanteur Ronald Baker a choisi de consacrer son dernier album à cette figure majeure de «L'épopée des Musiques Noires». En conviant China Moses (fille de Dee Dee Bridgewater), Michele Hendricks (fille de Jon Hendricks), Jesse Davis (immense saxophoniste), à le rejoindre en studio, en composant une «Suite for Nat» accompagné par un orchestre à cordes, Ronald Baker a redonné de l'allure à un personnage légendaire et a revitalisé un patrimoine flétri par l'érosion du temps.
Il suffira de vous rendre au Duc des Lombards, le 14 février 2015 ; au Caveau de la Huchette les 20 et 21 février 2015 pour vous en convaincre. Ces prestations parisiennes commémoreront dignement Nat King Cole, un demi-siècle après sa disparition...
http://www.ronaldbakerquintet.net/fr/