Blues, Gospel, Negro Spirituals, Jazz, Rhythm & Blues, Soul, Funk, Rap, Reggae, Rock’n’Roll… l’actualité de la musique fait rejaillir des instants d’histoire vécus par la communauté noire au fil des siècles. Des moments cruciaux qui ont déterminé la place du peuple noir dans notre inconscient collectif, une place prépondérante, essentielle, universelle ! Chaque semaine, l’Épopée des musiques noires réhabilite l’une des formes d’expression les plus vibrantes et sincères du XXe siècle : La Black Music ! À partir d’archives sonores, d’interviews d’artistes, de producteurs, de musicologues, Joe Farmer donne des couleurs aux musiques d’hier et d’aujourd’hui.

Réalisation : Nathalie Laporte
Retrouvez la playlist de l'Épopée des musiques noires sur Deezer

 

 

 

Horaires

Le samedi vers toutes cibles à 14h30, vers Afrique haoussa à 21h30

Le dimanche vers Afrique lusophone à 17h30, vers Prague à 18h30, vers toutes cibles à 22h30. (heures de Paris)

Lady in Satin

© Sony/Legacy

Les 18, 19, 20 février 1958, la chanteuse Billie Holiday est en studio pour la dernière fois ! Elle enregistre alors ce qui sera son ultime album, «Lady in Satin». Ce disque incroyablement émouvant fut une épreuve pour cette femme à bout de souffle qu'une destinée tumultueuse avait affaiblie, éreintée. Elle mit toute son énergie dans cet enregistrement devenu légendaire mais les excès, les humiliations, les brimades quotidiennes avaient flétri sa voix ensorcelante. C'est justement ce chaos intérieur qui révéla la sensibilité à fleur de peau d'une artiste unique...

© Don Hunstein
Billie Holiday, 1958.

Le label Columbia avait vu grand pour ces sessions historiques. Un orchestre à cordes dirigé par un jeune arrangeur américain de 35 ans, Ray Ellis, devait accompagner avec délicatesse les harmonies vocales de Lady Day... Tout avait été organisé, conçu, planifié pour écrire une page essentielle de «L'épopée des Musiques Noires». La conception de ce chef d'œuvre fut cependant particulièrement laborieuse. Confrontée à des ornementations sonores réservées habituellement à des crooners blancs en vogue, incapable de retenir les paroles des chansons qu'elle n'avait pas répétées, Billie Holiday dévoilait au grand jour son mal-être et sa solitude.

Les producteurs et orchestrateurs de ce projet ambitieux eurent d'abord le sentiment d'avoir commis l'irréparable, mais progressivement le frisson l'emporta sur les approximations et les hésitations. Billie Holiday parvînt à glisser sa voix meurtrie dans ce maelström de violons mélodieux. Ce contraste inattendu fut saisissant et suscita simultanément l'approbation et le rejet des critiques musicaux de l'époque. 

© Don Hunstein
Billie Holiday en studio.

A l'occasion du centenaire de Billie Holiday, Sony/Legacy fait paraître un coffret 3 CDs qui ressuscite ces 72 heures de doute, de ténacité artistique, de revers, de sublime révélation. 72 heures durant lesquelles la voix ombrageuse de Lady Day a scintillé et illuminé sa propre légende.

Notre invité, Sébastian Danchin, historien et auteur de nombreux ouvrages consacrés à la culture noire dont «Billie Holiday, le roman d'une rebelle» (Actes Sud/Sony Music) écrit : «La vie mouvementée de Billie Holiday, tout comme l'innocuité apparente de son répertoire, ont contribué à brouiller les pistes de 'Lady in Satin'. En effleurant de sa voix l'universalité des sentiments humains, elle affichait un génie créatif ouvert sur l'espoir, aux antipodes de la posture du poète maudit chère à Verlaine. Contrairement à Chatterton ou Gérard de Nerval, Billie Holiday n'était pas tournée vers la mort et le néant, mais vers la vie ! Et quand bien même, elle savait vouée à l'échec sa quête d'absolu, elle lui a donné un sens à travers ce chant du cygne, en apportant la preuve que le seul moyen de surmonter ses maux consistait à reconnaître leur existence».

http://billieholiday.sonymusic.fr/