Blues, Gospel, Negro Spirituals, Jazz, Rhythm & Blues, Soul, Funk, Rap, Reggae, Rock’n’Roll… l’actualité de la musique fait rejaillir des instants d’histoire vécus par la communauté noire au fil des siècles. Des moments cruciaux qui ont déterminé la place du peuple noir dans notre inconscient collectif, une place prépondérante, essentielle, universelle ! Chaque semaine, l’Épopée des musiques noires réhabilite l’une des formes d’expression les plus vibrantes et sincères du XXe siècle : La Black Music ! À partir d’archives sonores, d’interviews d’artistes, de producteurs, de musicologues, Joe Farmer donne des couleurs aux musiques d’hier et d’aujourd’hui.

Réalisation : Nathalie Laporte
Retrouvez la playlist de l'Épopée des musiques noires sur Deezer

 

 

 

Horaires

Le samedi vers toutes cibles à 14h30, vers Afrique haoussa à 21h30

Le dimanche vers Afrique lusophone à 17h30, vers Prague à 18h30, vers toutes cibles à 22h30. (heures de Paris)

Harry Sweets Edison

Harry Edison, 1988. © Wikicommons

Le trompettiste Harry Sweets Edison a traversé le XXème siècle aux côtés des plus grandes figures du jazz, Duke Ellington, Nat King Cole, Billie Holiday, Frank Sinatra et Count Basie, entre autres… Né le 10 octobre 1915 à Columbus (Ohio), il aurait donc aujourd'hui 100 ans ! Pour bien comprendre la destinée de ce musicien discret, il faut se replacer dans le contexte de l'époque.

© Library of Congress
Ségrégation, 1938.

L'Amérique du début du XXème siècle est une société raciste qui considère que les Noirs sont des citoyens de seconde classe, et ne méritent aucun traitement de faveur. Ils sont souvent brimés, humiliés, voire torturés dans les Etats du sud les plus ségrégationnistes. Pour un jeune Afro-Américain, il est alors difficile d'envisager une vie paisible et épanouissante. En 1930, Harry Sweets Edison est un adolescent qui rêve de devenir musicien, un statut particulier, épargné par l'administration blanche. Les artistes noirs sont perçus comme des amuseurs publics, et ne représentent pas une menace pour les autorités. Harry Sweets Edison s'imagine donc jazzman.

© Library of Congress
Louis Armstrong.

Impressionné par le légendaire Louis Armstrong, Harry Sweets Edison se met en tête d'intégrer une grande formation. Nous sommes alors en plein âge d'or du jazz américain. Les chefs d'orchestre recrutent les meilleurs musiciens du moment pour donner du volume et du corps à leurs compositions. Duke Ellington, Cab Calloway, Harry James, Tommy Dorsey, Benny Goodman, sont des leaders respectés et admirés. Mais, c'est Count Basie qui fera basculer la vie du jeune Harry Sweets Edison. Pendant 12 ans, il participera à l'aventure du swing aux côtés du célèbre pianiste. Cette opportunité le fera subitement entrer dans la cour des grands.

Cependant, derrière la simple évocation de cette destinée étonnante, il y a le quotidien plus sombre et douloureux des Noirs d'Amérique au cœur du XXème siècle. Harry Sweets Edison dût batailler pour trouver son rang et sa dignité. À la fin de sa vie, il regrettait amèrement que la jeunesse américaine ne s'intéresse pas aux tourments éprouvés par ses aînés. Seule une personnalité éminente de la nouvelle génération semblait trouver grâce à ses yeux. Wynton Marsalis était alors un trompettiste en vogue dont le patriarche, Harry Sweets Edison, observait l'ascension avec bienveillance.

Peut-être voyait-il en Wynton Marsalis ce leader qu'il n'avait jamais été ? Avait-il laissé passer sa chance ? Était-il trop modeste pour s'imposer comme chef d'orchestre ? Toujours est-il qu'à l'issue d'une épopée palpitante, Harry Sweets Edison laissait finalement poindre une touche d'amertume. Né trop tôt, dans une société encore trop conservatrice et oppressante, il ne trouva jamais l'élan et l'énergie pour sortir définitivement de l'ombre… Il aura tout de même accompagné Harry Belafonte, Ella Fitzgerald, Sarah Vaughan, Quincy Jones, B.B King, pour ne citer qu'eux… Toute une vie au service de la culture noire malgré les obstacles et les revers.

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