Blues, Gospel, Negro Spirituals, Jazz, Rhythm & Blues, Soul, Funk, Rap, Reggae, Rock’n’Roll… l’actualité de la musique fait rejaillir des instants d’histoire vécus par la communauté noire au fil des siècles. Des moments cruciaux qui ont déterminé la place du peuple noir dans notre inconscient collectif, une place prépondérante, essentielle, universelle ! Chaque semaine, l’Épopée des musiques noires réhabilite l’une des formes d’expression les plus vibrantes et sincères du XXème siècle : La Black Music ! À partir d’archives sonores, d’interviews d’artistes, de producteurs, de musicologues, Joe Farmer donne des couleurs aux musiques d’hier et d’aujourd’hui.

Réalisation : Nathalie Laporte
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Dans les coulisses de Motown

Berry Gordy à l'écoute de Stevie Wonder. © Archives Motown Records

Si l’on connaît les minois des jeunes artistes qui firent la gloire du label Motown dans les années 60, il est plus périlleux de citer tous ceux qui, dans l’ombre, contribuèrent au succès de cette maison de disques légendaire. Certes, le nom de Berry Gordy, chef d’orchestre historique de cette joyeuse troupe d’intrépides saltimbanques, parvient toujours à identifier une période et une musicalité Soul ancestrale. Mais qui connaît aujourd'hui Barney Ales, acteur essentiel de cette aventure commerciale et artistique inédite ?

 

Adam White, auteur de «Motown», éditions Textuel. © RFI/Joe Farmer

 

 
En faisant paraître le livre Motown (Editions Textuel), Adam White, ancien journaliste musical pour le magazine Billboard et vice-président du département communication d’Universal, a voulu conter une destinée moins scintillante que celle si souvent présentée aux amateurs de musique afro-américaine. Derrière les paillettes et la ferveur des Jackson 5, des Temptations ou des Supremes, il y avait une équipe totalement dédiée au bon fonctionnement de cette entreprise florissante, dont l’impact socio-culturel au cœur du bouillonnement racial aux États-Unis fut déterminant.
 
En choisissant de s’adjoindre les services de Barney Ales, talentueux homme d’affaires blanc, Berry Gordy prenait position dans le combat que menait la population noire de Detroit. Il ne devait pas y avoir de discrimination dans une firme discographique en devenir. Pour le patron de Motown, seul le sérieux de ses partenaires devait entrer en compte dans l’engagement collégial de chacun. La couleur de peau des différents collaborateurs ne devait pas avoir d’importance. Visionnaire, Berry Gordy comprit également que négocier des contrats d’artistes noirs auprès de distributeurs, stations de radio, et promoteurs influents, dans une société encore très ségrégationniste, nécessitait le concours de porte-paroles qui ne froisseraient pas les susceptibilités conservatrices. Barney Ales fut donc l’interlocuteur idéal pour amadouer les décideurs économiques de l’Amérique blanche.
 

Les Jackson 5 pendant l'enregistrement de Goin' back to Indiana, émission spéciale sur la chaîne ABC, à Los Angeles, en juillet 1971. © Archives Motown Records

 
Le tandem Berry Gordy/Barney Ales parvint ainsi à imposer aux consommateurs américains une nouvelle lecture de patrimoine noir. Désormais, les musiciens et chanteurs estampillés Motown ne s’adressaient plus seulement à leur communauté. L’enjeu était de rendre attractives des personnalités, dont on finirait par oublier les racines. Diana Ross, Smokey Robinson, les Four Tops, Stevie Wonder ou Marvin Gaye devaient être adulés par la jeunesse américaine dans son ensemble. Ce pari audacieux à une époque où l’examen de conscience semblait toujours impossible outre-atlantique fut le point d’ancrage d’une révolution sociétale majeure.
 
Chaque fois que nous écoutons un disque Motown à la radio, peut-être soutenons-nous indirectement l’élan de générosité, d’ouverture et de tolérance envisagé jadis par les différents protagonistes de cette lumineuse épopée...
 
http://classic.motown.com