
Blues, Gospel, Negro Spirituals, Jazz, Rhythm & Blues, Soul, Funk, Rap, Reggae, Rock’n’Roll… l’actualité de la musique fait rejaillir des instants d’histoire vécus par la communauté noire au fil des siècles. Des moments cruciaux qui ont déterminé la place du peuple noir dans notre inconscient collectif, une place prépondérante, essentielle, universelle ! Chaque semaine, l’Épopée des musiques noires réhabilite l’une des formes d’expression les plus vibrantes et sincères du XXème siècle : La Black Music ! À partir d’archives sonores, d’interviews d’artistes, de producteurs, de musicologues, Joe Farmer donne des couleurs aux musiques d’hier et d’aujourd’hui.
Réalisation : Nathalie Laporte
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Benny Goodman à Carnegie Hall
Il y a 80 ans, le 16 janvier 1938, un clarinettiste et chef d’orchestre américain, du nom de Benny Goodman, créait l’événement en faisant scintiller le swing des origines, dans un temple de l’académisme new-yorkais : Carnegie Hall. Jusqu’alors, cette prestigieuse salle de spectacle accueillait principalement des compositeurs et interprètes classiques mais, ce jour-là, c’est une autre forme d’expression qui va surprendre un public de mélomanes bourgeois peu habitués à la fougue et à la puissance sonore d’un big band jazz.
Mais ce n’est pas tout… Outre la hardiesse des musiciens de se produire dans un lieu si guindé, la composition de l’orchestre va susciter bien des commentaires. Ce sont, en effet, des virtuoses blancs et noirs qui partagent la même scène, ce soir-là, à New York. Une première dans une telle bâtisse encore très conservatrice. Ce choix plus musical que véritablement politique aura, cependant, un fort impact dans la société américaine, même s’il faudra attendre encore 25 ans pour que le soulèvement et les revendications de la communauté noire trouvent un écho à l’échelle nationale.
En choisissant de réunir sur scène à Carnegie Hall des musiciens de toutes origines, il est pertinent de s’interroger sur l’engagement citoyen de Benny Goodman en 1938. Ce brillant clarinettiste a écrit de belles pages de l’histoire du jazz sans coups d’éclats, mais en suscitant l’attention de l’Amérique toute entière à travers des prestations qui le hissèrent au rang de "Roi du Swing", un titre pompeux décerné par les acclamations d’un public majoritairement blanc, mais qui indisposait l’intéressé lui-même.
Quoi que l’on puisse penser du rôle de Benny Goodman dans l’évolution de la cause noire aux États-Unis, à l’aube des années 40, il est aujourd’hui incontestable que ce concert du 16 janvier 1938 à Carnegie Hall a marqué les esprits et agité les consciences. Une chance que cette prestation fut enregistrée ! Ce que ne savait même pas le chef d’orchestre lui-même comme il le reconnaissait, 12 ans plus tard, en 1950, lors de la publication de ce disque devenu légendaire. 80 ans après les faits, c’est un témoignage vibrant qui nous est restitué, celui d’une époque glorieuse durant laquelle le jazz commençait à irriguer la culture populaire américaine.
Le site de Benny Goodman