
Blues, Gospel, Negro Spirituals, Jazz, Rhythm & Blues, Soul, Funk, Rap, Reggae, Rock’n’Roll… l’actualité de la musique fait rejaillir des instants d’histoire vécus par la communauté noire au fil des siècles. Des moments cruciaux qui ont déterminé la place du peuple noir dans notre inconscient collectif, une place prépondérante, essentielle, universelle ! Chaque semaine, l’Épopée des musiques noires réhabilite l’une des formes d’expression les plus vibrantes et sincères du XXème siècle : La Black Music ! À partir d’archives sonores, d’interviews d’artistes, de producteurs, de musicologues, Joe Farmer donne des couleurs aux musiques d’hier et d’aujourd’hui.
Réalisation : Nathalie Laporte
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Un demi-siècle après Jimi Hendrix !
Il y a 50 ans, le 18 septembre 1970, l’illustre Jimi Hendrix nous quittait à l’âge de 27 ans. Les quatre albums qu’il fit paraître de son vivant suffirent à bouleverser l’art de la guitare électrique dans "L’épopée des Musiques Noires". Biberonné au blues ancestral, James Marshall Hendrix n’était pas seulement cette icône du rock que l’on dépeint depuis un demi-siècle. Ses contemporains et disciples sont formels, il fut l’artisan d’une émancipation spirituelle majeure que ses envolées lyriques et frénétiques nourrissaient avec authenticité.
L’un des moments saillants de l’aventure musicale de Jimi Hendrix a lieu en 1969. Le festival de Woodstock s’achève au petit matin du 18 août avec la furie guitaristique d’un personnage flamboyant dont la musique épouse l’air du temps. L’aspiration à la paix et à la sérénité se fracasse contre les velléités guerrières d’une Amérique embourbée au Vietnam. Ce choc émotionnel et générationnel trouve son expression dans l’interprétation incendiaire de l’hymne américain par un Jimi Hendrix bien décidé à faire jaillir sa colère et sa frustration devant les horreurs de son époque. Cette sonorité dérangeante fut l’écho d’un climat social que la jeunesse d’alors ne pouvait plus supporter.
Les notes stridentes de Jimi Hendrix à Woodstock étaient le reflet d’une affirmation politique que sa notoriété lui aurait permis d’exprimer avec des mots tranchés sur les plateaux de télévision ou dans les studios de radio. Il faut croire que la fronde assassine d’un Jimi Hendrix explosif à Woodstock se suffisait à elle-même et ne nécessitait pas davantage d’explications. Comment un artiste réfléchi, sage et philosophe, pouvait-il générer des circonvolutions sonores aussi redoutables ? L’âme du pacifiste n’était-elle pas contrariée par un combat social et racial qu’il devait mener au quotidien ?
Majestueux dans la lumière, discret hors de scène, Jimi Hendrix est devenu un artiste universel que l’on ne peut cependant pas détacher de l’histoire culturelle de l’Amérique noire. Lorsqu’il arrive sur le continent européen en 1966, le blues de ses aînés jouit d’un regain d’intérêt auprès d’un public blanc friand de sonorités authentiques. Les musiciens anglais, eux-mêmes, se plaisent à réinventer le patrimoine noir de leurs cousins d’Amérique. John Mayall, Eric Clapton, Eric Burdon, les Rolling Stones s’inspirent du blues originel et honorent les pionniers du genre. Jimi Hendrix arrive donc à point nommé sur cette terre britannique qui semble soutenir la cause de la communauté afro-américaine.
En l’espace de quatre ans, Jimi Hendrix a transformé "L’épopée des Musiques Noires". Il a participé au réveil identitaire de ses frères africains-américains. De nombreux artistes, tous styles confondus, clament aujourd’hui être les héritiers de cet instrumentiste exceptionnel. Il y a une raison à cela : Jimi Hendrix a ouvert la voie à toutes les expérimentations et son audace a libéré les consciences.
Depuis sa disparition, il y a 50 ans, l’industrie du disque a su tirer profit de son statut d’icône en multipliant les rééditions et sorties d’albums posthumes plus ou moins bien ficelées, souvent concoctées à partir d’archives non-abouties ou incomplètes. Au-delà de cette course effrénée aux dividendes, que nous ne commenterons pas ici, nous préférons nous interroger sur ce que Jimi Hendrix aurait pu produire s’il avait vécu 50 ans de plus. Il aurait aujourd’hui 77 ans et serait sûrement à la pointe de l’innovation sonore.