Blues, Gospel, Negro Spirituals, Jazz, Rhythm & Blues, Soul, Funk, Rap, Reggae, Rock’n’Roll… l’actualité de la musique fait rejaillir des instants d’histoire vécus par la communauté noire au fil des siècles. Des moments cruciaux qui ont déterminé la place du peuple noir dans notre inconscient collectif, une place prépondérante, essentielle, universelle ! Chaque semaine, l’Épopée des musiques noires réhabilite l’une des formes d’expression les plus vibrantes et sincères du XXème siècle : La Black Music ! À partir d’archives sonores, d’interviews d’artistes, de producteurs, de musicologues, Joe Farmer donne des couleurs aux musiques d’hier et d’aujourd’hui.

Réalisation : Nathalie Laporte
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Il y a 10 ans, Etta James nous quittait…

La chanteuse américaine Etta James sur scène, en 1975. © Andrew Putler/Redferns/Getty images

Le 20 janvier 2012, la chanteuse Etta James disparaissait à l’âge de 73 ans. Cette personnalité majeure de la culture populaire afro-américaine était une formidable interprète du répertoire Soul, mais aussi une forte tête qui ne se laissait pas dicter ses choix. Son caractère parfois rude imposait immédiatement le respect. Son franc-parler lui valut quelques inimitiés mais, le plus souvent, la considération de ses contemporains. 

Née à Los Angeles, le 25 janvier 1938, Jamesetta Hawkins connaît une enfance malmenée. Elle n’a pas connu son père et sa mère, seulement âgée de 14 ans lorsqu’elle met sa fille au monde, est bien trop jeune pour assumer son rôle parental. Bringuebalée de nourrices en tuteurs, la petite Jamesetta résiste tant bien que mal aux revers de l’existence. Au fil des années, son tempérament s’affirme et, même si son quotidien est souvent éprouvant, elle affronte les obstacles avec dynamisme et candeur. À 16 ans, elle est une adolescente turbulente qui parvient, tout de même, à séduire le chef d’orchestre Johnny Otis. Depuis 10 ans, Etta James chante dans les chorales gospel des églises baptistes californiennes. Au sein du trio vocal, The Creolettes, sa voix scintille et convainc son premier mentor à l’emmener en tournée. Cette première expérience professionnelle ravit la jeune femme qui se félicite d’enregistrer, dans la foulée, son premier 45T intitulé Roll with me Henry.

© Andrew Putler/Redferns/Getty images
Etta James en concert au Montreux Jazz Festival, le 11 juillet 1975.

 

C’est en 1960 que la destinée d’Etta James semble s’accélérer. Elle vient de rencontrer Léonard Chess, le fondateur du label Chess Records, qui entend bien propulser sa nouvelle égérie au devant de la scène. Il lui suggère alors d’adapter un vieux standard de blues composé en 1941 par Max Gordon et Henry Warren pour le film musical "Orchestra Wives". La chanson At last ! redevient subitement un classique de la culture afro-américaine et hisse Etta James au rang des grandes voix noires américaines. Ce succès inattendu bouscule quelque peu l’équilibre psychologique déjà fragile de la jeune vedette qui se perd dans des excès nocifs pour sa santé. Toujours imprévisible et incontrôlable, Etta James acquiert une réputation de "diva capricieuse" qui nuit à son aura. À la mort de Léonard Chess en 1969, elle pressent que son avenir sera périlleux. Elle fait pourtant paraître en 1973 un album de bonne facture sobrement nommé Etta James qui confirmera sa place indéniable dans "L’Épopée des Musiques Noires".

© Don Paulsen / Michael Ochs Archives/Getty Images
Etta James à New York, en 1974.

 

L’apparition de nouveaux courants musicaux et l’évolution de l’industrie discographique auront cependant raison de son enthousiasme. À l’aube des années 80, Etta James ne peut que constater le désintérêt progressif du public pour ses productions et préfère disparaître momentanément. Cette pause durera finalement… 10 ans ! Son nom restera, malgré tout, dans les esprits et sa légende s’écrira. À 50 ans, Etta James accepte à nouveau les sollicitations et reprend la route des studios. Son image a changé. Son comportement rebelle continue de susciter les inquiétudes de ses interlocuteurs, mais elle est maintenant une grande figure de la Soul historique et du Blues ancestral. Sa notoriété joue pour elle et facilite son retour en grâce. Ainsi, jusqu’à sa disparition, le 20 janvier 2012, elle multipliera les enregistrements et façonnera, avec soin et quelques coups d’éclat, sa stature de pionnière.