
Blues, Gospel, Negro Spirituals, Jazz, Rhythm & Blues, Soul, Funk, Rap, Reggae, Rock’n’Roll… l’actualité de la musique fait rejaillir des instants d’histoire vécus par la communauté noire au fil des siècles. Des moments cruciaux qui ont déterminé la place du peuple noir dans notre inconscient collectif, une place prépondérante, essentielle, universelle ! Chaque semaine, l’Épopée des musiques noires réhabilite l’une des formes d’expression les plus vibrantes et sincères du XXème siècle : La Black Music ! À partir d’archives sonores, d’interviews d’artistes, de producteurs, de musicologues, Joe Farmer donne des couleurs aux musiques d’hier et d’aujourd’hui.
Réalisation : Nathalie Laporte
Retrouvez la playlist de l'Épopée des musiques noires sur Deezer
Le folklore de Pilani Bubu
C’est un ambitieux projet que la chanteuse sud-africaine, Pilani Bubu, a initié ces derniers mois pour défendre ses convictions. "Folklore – Chapter 1" est, comme son nom l’indique, le premier volet d’une série d’albums que la jeune femme envisage d’éditer au fil des années. Son disque introductif insiste sur la force des traditions et la place des femmes dans son pays natal. Cette société multiculturelle malmenée par une histoire ségrégationniste douloureuse mérite mieux que le souvenir des dissensions entre communautés. Revendiquer un folklore est peut-être le premier pas vers la réconciliation et l’apaisement.
Le poids psychologique d’une existence rythmée par les brimades altère forcément les comportements et attitudes individuelles. Pilani Bubu est convaincue que le statut des femmes doit être consolidé et protégé. Pour autant, elle n’élude pas l’impact des discriminations sur l’ensemble de la population. Elle reconnaît volontiers que l’oppression exercée durant des décennies par le pouvoir sud-africain sur les hommes noirs a fragilisé leur force mentale. Comment conserver un peu d’amour propre quand on dénie tout simplement votre existence ? La conséquence palpable de ce renoncement identitaire imposé est une recrudescence d’actes violents au sein de la sphère privée. Quand les humiliations sont votre quotidien, le besoin de se rebeller est inévitable. Les relations amoureuses pâtissent alors de ces accès de colère larvée trop longtemps réprimée. Pilani Bubu a d’ailleurs remarqué que les femmes sud-africaines ont développé une force de caractère capable de résister aux orages conjugaux, mais elle ne minimise pas la dureté de leur rôle familial.
Chaque fois qu’elle interprète une chanson extraite de son album, elle pense à ces aînées qui ont bataillé pour obtenir la justice et l’égalité. Il n’est pas anodin qu’elle ait adapté un classique immortalisé par l’illustre et regrettée Miriam Makeba. En reprenant Qongqothwane, elle s’inscrit dans le combat social de Mama Afrika et défend, à son tour, l’engagement de sa génération. Le but n’est plus d’obtenir la liberté mais de la conserver, semble-t-elle marteler. Depuis la libération de Nelson Mandela, l’Afrique du Sud a changé et les enjeux ne sont plus tout à fait les mêmes. Pilani Bubu en est parfaitement consciente et sa verve mâtinée d’activisme artistique exprime les préoccupations d’une jeune femme dynamique dont les convictions nourrissent la créativité.
Boom Che et Baile sont les premiers titres phares de son album Folklore – Chapter 1. Nul doute que d’autres mélodies aussi accrocheuses sauront captiver les oreilles d’auditeurs curieux et attentifs aux propos réfléchis de cette personnalité multidisciplinaire qui ne se contente pas de chanter. Elle s’épanouit aussi dans l’univers de l’audiovisuel en animant des émissions de radio et de télévision. Elle est une styliste reconnue et brille en tant que "designer". Toutes ces casquettes lui donnent l’opportunité de parler haut et fort. Déjà plébiscitée en Afrique australe, elle devrait donc conquérir l’hémisphère nord sans effort tant son élan est irrésistible. Après tout, nous n’en sommes qu’au premier chapitre de son épopée ascensionnelle…
⇒ Le site de Pilani Bubu.