Blues, Gospel, Negro Spirituals, Jazz, Rhythm & Blues, Soul, Funk, Rap, Reggae, Rock’n’Roll… l’actualité de la musique fait rejaillir des instants d’histoire vécus par la communauté noire au fil des siècles. Des moments cruciaux qui ont déterminé la place du peuple noir dans notre inconscient collectif, une place prépondérante, essentielle, universelle ! Chaque semaine, l’Épopée des musiques noires réhabilite l’une des formes d’expression les plus vibrantes et sincères du XXème siècle : La Black Music ! À partir d’archives sonores, d’interviews d’artistes, de producteurs, de musicologues, Joe Farmer donne des couleurs aux musiques d’hier et d’aujourd’hui.

Réalisation : Nathalie Laporte
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Hommage à Wayne Shorter

Wayne Shorter au North Sea Jazz Festival. © Corbis via Getty Images - Derick Thomas

Le saxophoniste Wayne Shorter a été l’un des plus fabuleux instrumentistes de l’histoire du jazz, un compositeur de grand talent, un improvisateur hors-pair, un aventurier de la musique et un esprit libre. Il fut le partenaire de Miles Davis, le co-fondateur du groupe Weather Report avec Joe Zawinul, l’ami fidèle d’Herbie Hancock, un interlocuteur précieux et un soliste admirable. Wayne Shorter nous a quittés le 2 mars 2023 à l’âge de 89 ans. Nos archives raviveront désormais sa musique, son être, son intelligence et sa spiritualité.

Wayne Shorter tenait à préserver la quiétude de sa bulle créative pour retrouver la sérénité nécessaire à son inspiration. Il se réfugiait dans une forme d’expression que sa pratique du bouddhisme magnifiait sur scène et sur disque. Il y recherchait, la pureté, l’innocence, la naïveté et le calme de la méditation. Son jeu se transformait constamment, devenait aérien. Wayne Shorter atteignait alors la plénitude à laquelle il aspirait. L’expression artistique et le recueillement ne faisaient plus qu’un. Ses propos étaient aussi profonds qu’insondables. La dimension cosmique de sa musique suivait pourtant un raisonnement et une logique irréfutables. 

© Corbis/JazzSign
Miles Davis et Wayne Shorter, 1964.

 

« J’aime cette idée qu’expriment souvent les astronautes ou les scientifiques et qui consiste à dire que notre monde n’est qu’un petit point bleu perdu dans l’immensité du cosmos. Plus on s’en éloigne, plus il devient difficile de distinguer notre planète. Il faut alors l’imaginer… N’est-il pas ridicule de penser que sur cette minuscule planète, au cœur de l’univers, deux types sont en train de se battre pour une place de parking ! Tout ça pour vous dire que, lorsque nous jouons de la musique, nous reflétons l’incongruité de nos petites mesquineries. J’imagine très bien Miles Davis s’inspirer de cela. Il nous aurait dit : « Jouons la petite musique de ces deux types sur le parking ! ». Peu avant sa mort, il avait eu l’idée de composer une œuvre orchestrale pour un opéra, comme pour mettre en musique l’aspect théâtral de nos existences. En d’autres mots, il voulait mettre en valeur nos merveilleuses petites vies qui font la grandeur de l’humanité ». (Wayne Shorter au micro de Joe Farmer)

Ces dernières années, Wayne Shorter avait monté un quartette en compagnie de virtuoses exceptionnels : Danilo Perez au piano, John Patitucci à la basse et Brian Blade à la batterie. Ce fut certainement la formation dans laquelle il s’épanouissait le plus. La musique était exigeante mais à l’image de cet homme dont l’esprit fertile nous dépassait parfois. S’agissait-il d’une nouvelle révolution musicale qu’il tentait de provoquer ? Sa modestie disait le contraire.

© Eric Gaillard/AFP
Joe Zawinul et Wayne Shorter.

 

« Il n’est pas urgent de lancer une nouvelle révolution musicale d’autant que les plus brutales sont souvent infestées par le virus de l’autosatisfaction. Nous avions cette attitude quand nous étions enfants mais elle était spontanée. On s’inventait des aventures merveilleuses, on créait notre propre environnement musical. Écoutez vos gamins… Nous faisions cela aussi et il faut essayer de garder cette innocence mais, rassurez-vous, cette naïveté est toujours là en moi. Comme dans le film Jurassic Park, à la fin, la vie renaît toujours ! ». (Wayne Shorter sur RFI en 2003).

Wayne Shorter était un sage agitateur de l’improvisation. Nous continuerons à l’écouter et à le célébrer sur les ondes. Cet homme était généreux, attentif, et son absence ne sera comblée que par sa musique éternelle et intemporelle.

⇒ Le site de Wayne Shorter.

© P. Etheldrede
Herbie Hancock et Wayne Shorter - Marseille 2014.