Blues, Gospel, Negro Spirituals, Jazz, Rhythm & Blues, Soul, Funk, Rap, Reggae, Rock’n’Roll… l’actualité de la musique fait rejaillir des instants d’histoire vécus par la communauté noire au fil des siècles. Des moments cruciaux qui ont déterminé la place du peuple noir dans notre inconscient collectif, une place prépondérante, essentielle, universelle ! Chaque semaine, l’Épopée des musiques noires réhabilite l’une des formes d’expression les plus vibrantes et sincères du XXe siècle : La Black Music ! À partir d’archives sonores, d’interviews d’artistes, de producteurs, de musicologues, Joe Farmer donne des couleurs aux musiques d’hier et d’aujourd’hui.

Réalisation : Nathalie Laporte
Retrouvez la playlist de l'Épopée des musiques noires sur Deezer

 

 

 

Horaires

Le samedi vers toutes cibles à 14h30, vers Afrique haoussa à 21h30

Le dimanche vers Afrique lusophone à 17h30, vers Prague à 18h30, vers toutes cibles à 22h30. (heures de Paris)

Les Staples Jr Singers revitalisent le gospel originel

Les Staples Jr Singers en concert. © Jelmer De Haas/Le Guess Who?

L’histoire des Staples Jr Singers est incroyable. Créée à la fin des années 60, cette formation gospel composée d’adolescents talentueux originaires d’Aberdeen dans le Mississippi, a retrouvé l’année dernière les faveurs du public grâce à la réédition de leur unique album, When do we get paid ?, enregistré en 1975. Depuis, Annie Caldwell Brown, Edward Brown et ARC Brown découvrent le monde et se produisent dans les plus grands festivals. Le 11 juillet 2023, ils livraient une fervente prestation lors de la 42ème édition de « Jazz à Vienne ». Nous les avons rencontrés…

Ils sont aujourd’hui des sexagénaires candides et s’étonnent de pouvoir jouir d’une notoriété qu’ils n’avaient pas vraiment anticipée. Leur seul guide, dans ce cheminement tortueux, est spirituel. Les membres de la famille Brown sont issus des églises sudistes américaines, et leur foi fut un rempart solide contre les brimades et les humiliations durant les heures sombres de la ségrégation raciale. Leurs indéfectibles louanges religieuses ont atténué la violence sociale d’une Amérique inégalitaire. « ​La musique exprimait le ressenti de la population. Tout ce qui venait du cœur passait par la musique. Quand un événement survenait dans notre quotidien, nous l’évoquions en chansons pour que le public puisse ressentir notre émotion. Il fallait témoigner ! Nous étions très jeunes mais nous avons ressenti cette oppression sociale constante. Par exemple, à Birmingham en Alabama, nous sommes entrés dans un restaurant en espérant pouvoir dîner sur place avant de donner notre concert. Nous avons attendu qu’un serveur daigne nous adresser la parole. Nous avons attendu, attendu… et, finalement, une femme s’est approchée de nous et nous a dit droit dans les yeux : « Vous feriez mieux de quitter les lieux ! ». Ils nous ont donc mis à la porte sans autre explication. Nous nous sommes retrouvés dans une épicerie et nous avons acheté de quoi nous sustenter. Eh bien, croyez-le ou non, nous avons certainement mieux mangé dans cette épicerie que dans le restaurant d’à côté ! ». (Edward Brown au micro de Joe Farmer) 

© Marie Julliard/Omaha Pictures
Edward Brown en concert à Vienne, le 11 juillet 2023.

 

L’admirable résilience de ces artistes n’est pas un cas unique. Nombre de musiciens afro-américains ont dû résister à l’injustice discriminatoire d’un système économique qui ne laissait aucune chance aux plus démunis. Les lieux de culte devenaient un refuge pour tous ceux qui se sentaient en danger. « Quand mes parents m’ont emmené à l’église, ils ont fait naître en moi la personne que je suis aujourd’hui. Je vais donc rester fidèle à l’église car, dès ma prime jeunesse, j’étais convaincu que j’étais à ma place à cet endroit précis. C'est la raison pour laquelle je refuse toujours des propositions qui ne me ressemblent pas. Je sais où je dois être. Je dois être auprès de Dieu. C’est  que je me sens bien. J’ai la conviction que s’il m’arrive quelque chose, Dieu sera à mes côtés. Voilà pourquoi je continuerai à faire ce que j’ai toujours fait : louer le Seigneur. Quand on me propose de chanter du blues, je refuse toujours car j’ai pris la décision, il y a déjà bien longtemps, de rester fidèle à l’église, et donc, au gospel. Et puis, à l’église, je fais de la musique ! ». (ARC Brown sur RFI) 

© Marie Julliard/Omaha Pictures
ARC Brown, lors du festival «Jazz à Vienne» 2023.

 

Les Staples Jr Singers étaient des enfants lorsqu’ils ont enregistré leurs premières chansons. Quelque cinquante ans plus tard, ils ont conservé cette ingénuité qui caractérise leurs œuvres et leur personnalité. La fougue du gospel originel transpire jusque dans leurs accents terreux du Mississippi ancestral. Les spectateurs qui eurent la chance d’assister à leur concert, le 11 juillet 2023 à Vienne, ont certainement perçu l’authenticité culturelle et l’héritage cultuel de ce répertoire enraciné dans l’âme noire.

⇒ Le site des Staples Jr Singers

⇒ Le site de Jazz à Vienne.

© Marie Julliard/Omaha Pictures
Les Staples Jr Singers régalent les spectateurs du Théâtre municipal de Vienne (France).