Disparition de Wendo Kolosoy

Le musicien Antoine Wendo Kolosoy est décédé lundi 28 juillet à Kinshasa (RDC) à l'âge de 83 ans des suites d'une longue maladie. Considéré comme le père de la rumba congolaise, sa carrière débuta dans les années 40. En 2007, il fut l'objet d'un documentaire de Jacques Sarasin, On the rumba river. Un album accompagnait le film que nous chroniquions en mai dernier sur RFI Musique.

Accoudé au bastingage branlant d’un navire oublié à ses amarres depuis des années, le vieil homme regarde devant lui avec tristesse toutes ces épaves, véritables carcasses métalliques, qui ont sombré dans le fleuve Congo et donnent au port de Kinshasa l’allure d’un cimetière. Ce sont les dernières images de Wendo Kolosoy, marin, boxeur et surtout chanteur. Une séquence pleine de nostalgie, comme le film qu’elle conclue : On The Rumba River, sorti il y a tout juste quelques mois. Le réalisateur Jacques Sarasin avait choisi de consacrer son film à l’artiste octogénaire, souvent qualifié de "monument" de la musique congolaise à tel point que son nom est inscrit dans l’histoire de son pays. Ne parle-t-on pas "du temps de Wendo" pour désigner cette époque d’avant l’indépendance où la rumba s’est mise à faire danser la jeunesse d'alors ?

Né en avril 1925 dans la localité de Mushie, Antoine Kalosoy – son vrai nom – a grandi à Léopoldville, devenue Kinshasa. Orphelin alors qu’il a une dizaine d’années, pris en charge par les religieux européens, le jeune garçon embarque rapidement comme mécanicien à bord des bateaux qui transportent hommes et marchandises sur le fleuve Congo.

Au cours de ces voyages où les paysages défilent lentement, des mélodies et des textes lui viennent à l’esprit. S’il raconte avoir commencé à chanter en 1936, c’est dans les années 40 qu’il enregistre ses premières chansons avec son orchestre Victoria Kin, notamment Mabeley A Mama, "la terre de ma maman". Le souvenir de sa mère, chanteuse traditionnelle qui lui avait confié son instrument avant de mourir, lui inspirera aussi Albertina, l’une de ses chansons les plus célèbres.

C’est un autre prénom féminin qui fait la popularité de Wendo : Marie-Louise. Enregistré en 1948 avec le guitariste Henri Bowane, ce titre paru d’abord en 78 tours, reste sans aucun doute la pièce centrale de son répertoire. Il n’a d’ailleurs pas hésité à en faire de nombreuses versions au cours de sa carrière !

L’assassinat de Patrice Lumumba change tout à coup la donne en 1961. L’artiste va payer au prix fort son amitié avec l’ancien Premier ministre du jeune Congo indépendant renversé par Mobutu. La disgrâce prend fin dans les années 90, lorsque Joseph Kabila accède au pouvoir et veut redonner sa place à ce chanteur qu’il apprécie particulièrement.

En 1999, "Papa Wendo" profite de son invitation au festival Masa à Abidjan pour faire son retour avec l’album Marie-Louise, suivi trois ans plus tard par Amba. Loin d’être amer, il tient à se servir de cette réhabilitation tardive pour transmettre son savoir en participant à de multiples projets. "La meilleure façon de témoigner de son époque, à mon avis, c’est la chanter", écrivait-il en préface de l’ouvrage Terre de la chanson signé par son compatriote Manda Tchebwa. Ses disques sont là pour le prouver.