Dakar Music Expo, des ambitions pour les artistes africains
Des artistes bien sûr, des managers, des distributeurs, des directeurs de festival, et bien d'autres encore se sont retrouvés au Sénégal, lors du Dakar Music Expo qui se tenait du 3 au 6 février 2022. Au programme, musique, conférences, discussions et convivialité.
Dans les jardins luxuriants de l'Institut culturel français à Dakar, sa silhouette déambule au gré des rencontres. L'homme ne nous est pas inconnu puisque depuis de nombreuses années, nous suivons sur RFI sa carrière et le développement de ses projets.
Bonnet vissé sur la tête, Blick Bassy, artiste musicien stylé, n'est pas avare de mots et échange avec tous ceux qui sont intéressés par son expérience et ses réflexions sur le métier, l'industrie musicale et la manière de se situer dans un monde où chacun peut trouver sa place, à condition d'être au fait d'un certain nombre de problématiques.
Comme il nous l'explique, pour lui, le DMX est un rendez-vous important "car il vient contribuer à la structuration et à la professionnalisation de l'écosystème de la musique, ici à Dakar. Nous avons de plus en plus besoin d'évènements comme celui-ci pour rappeler que la musique, c'est une économie, un métier, un business aussi." Blick intervient d'ailleurs lors d'une session de formation sur l'édition, dispensée dans le cadre du DMX ou dans des conférences.
Un grand nombre d'entre elles sont données sur de nombreux sujets : comment fonctionnent les plateformes de streaming et comment exister "dans cette jungle", les marques internationales comme sources de revenus pour les artistes, la production technique au Sénégal ou bien comment exporter son projet musical. Des thématiques qui permettent à chaque professionnel de la musique d'accompagner le développement de carrière des artistes. Les auditeurs sont attentifs et nombreux.
Des concerts (comme celui du rappeur Nix samedi soir), des showcases et des séances d'écoute viennent compléter la proposition du DMX. C'est le cas de l'artiste sénégalais Sahad qui vient présenter son nouvel album (Luuma) tout juste sorti sur les plateformes de streaming, mais uniquement accessible sur le continent africain, pour le moment.
L'initiateur et organisateur de ce DMX s'appelle Doudou Sarr, promoteur de musique sénégalaise. Lui non plus n'est pas avare de mots. Malgré le stress de ce type d'organisation, l'homme est désireux d'expliquer le projet et d'en assurer la promotion.
Les objectifs de Doudou Sarr
Attablé devant un café, il répond à nos questions alors que participe aussi à notre entretien Joe Frost, journaliste contributrice au magazine anglais Songlines, spécialiste des musiques du monde. Car, dans les allées du DMX, nombreux sont les étrangers venus prendre part aux conférences et assister aux concerts qui ont lieu sur la scène de l'Institut français.
Pour Doudou Sarr, "c'est une édition très positive, notamment du côté des profils de délégués qu’on a pu toucher et qui ont répondu oui à notre invitation. Juste pour expliquer que le Sénégal n’a pas de 'bureau export'. On n'a pas assez d’argent pour investir, comme la France, l’Italie, l’Autriche, tous les pays du Nord. Du coup, j'essaie de me substituer au bureau export avec mes propres fonds, difficilement d’ailleurs". Entreprise fort peu aisée en ces temps de pandémie, laquelle avait d'ailleurs largement impactée l'édition précédente.
"L’essentiel, c’est de faire venir des directeurs de festival qui donne les débouchés aux jeunes talents. Tout le credo du DMX, c’est de trouver un circuit de festivals, de distribution pour les tout nouveaux talents africains et je lance un appel à tout le monde pour continuer à préciser ça. Il y une quinzaine de représentants de festivals cette année : des États-Unis et du Canada, de France, de la République tchèque. C’est un 'big achievement' pour moi".
En réalité les objectifs sont nombreux, si le DMX rassemble des professionnels, l'idée est aussi d'investir le samedi et le dimanche des endroits plus populaires. Soutenu par l'Institut français, le DMX doit, s'il veut investir des lieux différents, trouver des financements pour cela. "C'est un salon professionnel qu'il faut populariser pour que les Sénégalais puissent en bénéficier. Ce que je dis aussi aux médias locaux, c'est qu'il faut populariser [ce rendez-vous] car c'est un évènement qui va être très important pour la ville de Dakar".
Il espère ainsi pouvoir organiser lors de la prochaine édition, alors que tous espèrent une amélioration des conditions sanitaires, un concert ouvert à tous place de la Nation ou encore à la Maison de la culture Douta-Seck. On se souvient avec enthousiasme du concert donné dans la medina lors de l'édition 2020 avec le groupe d'électro-sabar, Guiss Guiss Bou Bess.
En attendant, les concerts se terminent relativement tôt à l'Institut français, aux alentours de 23h et la vie nocturne dakaroise commence à peine à cette heure-là. Doudou Sarr exhorte les participants à aller ensuite dans différents endroits de Dakar "pour découvrir la ville musicale telle qu'elle est". Cela fait aussi partie du projet du DMX. "Si vous prenez l'exemple de South by South West à Austin au Texas, c'est comme ça".
Dakar pour lui, "doit être la capitale musicale africaine. Le DMX se veut panafricain pour faire que, chaque année, la famille musicale africaine se retrouve à Dakar. (…) Son objectif, c'est de présenter le talent africain in situ".
A l'instar du MAMA à Paris, le DMX pourrait devenir de plus en plus un rendez-vous incontournable de l'industrie musicale africaine.