Bénin : six jours d’effervescence musicale au Finab
Le Festival international des arts du Bénin (Finab) a pris fin, dimanche 19 février, après six jours d’intenses manifestations. Cotonou et Ouidah ont grouillé du monde autour des artistes musiciens en herbe et des talents confirmés.
La plage de Fidjrossè, célèbre quartier en bordure de mer de la ville de Cotonou, a abrité, une semaine durant, un grand marché des arts et des spectacles. Pour la toute première édition du Festival international des arts du Bénin (Finab), il n’a fallu que neuf mois à son délégué général, Ulrich Adjovi, patron du groupe Empire, une des plus grosses boites d’événementiel et de production du pays, pour penser et concrétiser ce projet.
Ce nouveau rendez-vous dans l’agenda culturel africain a drainé tout le gratin du secteur : acheteurs de spectacle, managers africains et européens, directeurs de festivals, agents d’artistes..., à l’image du Marché des arts du spectacle (Masa) d’Abidjan. Tous y défilent de jour comme de nuit pour discuter, rencontrer, échanger, suivre des masters class, des panels. L’événement, en plus de réunir tous les arts (musique, théâtre, arts plastiques, cinéma, danse, littérature), accueille l’exposition des œuvres d’art du célèbre styliste nigérien Alphadi.
À Ouidah, ville historique et touristique, plusieurs dizaines d’artistes se sont succédé dans une belle parade aux mille couleurs, entre démonstration, déambulation et performance dans les rues et sur le podium installé sur le site de l’ancien fort français.
100 % Live
À Cotonou, au coucher du soleil, tous les soirs, le festival accueille des prestations musicales. En live ! Des artistes béninois connus et moins connus embrasent la scène. Le public exulte. "Pas de place pour le play-back," explique Auguste Amoussou, un des responsables à l’organisation. "Cette option du Finab plait bien aux artistes. Ils y voient une opportunité."
Tonton Victor, la trentaine, a eu droit à son premier spectacle live grand public sur le festival du Béninois, Ulrich Adjovi, devant plus de trois mille spectateurs. Le jeune rappeur qui puise son inspiration du vaudou a du mal à contenir son émotion. Ses quinze minutes de prestation ont été un délice. Le public en voulait encore.
Plus connue sous son nom d’artiste Faty, Fatima Kouchékého, l’une des musiciennes en pleine ascension au Bénin, est montée sur scène, quelques minutes avant le célèbre DJ ivoirien Kerozen, tête d’affiche du festival. "Le meilleur musicien est celui qui peut communiquer son art à travers le live. C’est une école, mais en même temps une opportunité pour moi de me faire connaître par ceux qui ne m’avaient pas vue sur scène ou que l’on me découvre davantage", nous confie-t-elle après son concert.
Après son live, Faty a rencontré des managers étrangers qui ne sont pas restés indifférents, semble-t-il, au talent de la jeune artiste. "Des choses se mettent en place petit à petit", se réjouit-elle.
Michel Joubert, l’ancien directeur du Festival en Othe, organisé au sud de Paris, a fait le déplacement au Bénin pour la toute première édition du Finab. "Ce qui m’a marqué sur ce festival, c’est la diversité au plan musical. Je m’aperçois ici avec les artistes que le mélange des genres existe par la volonté des artistes".
Créer des labels
Le Finab a aussi permis de lancer officiellement le label musical du groupe Empire du jeune prodige de l’événementiel, Ulrich Adjovi. Le nouveau label "Black Music Industry" est le fruit d’un partenariat avec Universal Music Africa. En marge des concerts, son directeur, Franck Kacou, a pris part aux débats sur la musique, la digitalisation, la promotion des artistes, la détection des talents et la protection des œuvres musicales lors d’une conférence.
"L’écosystème africain doit avoir son industrie. L’artiste ne peut pas vivre de son art s’il n’y a pas une industrie derrière. Nous avons voulu créer une industrie de la musique africaine pour faire briller le Bénin parce que ce seront des artistes béninois dans un premier temps", indique Ulrich Adjovi. "Pour moi, aujourd’hui, l’écosystème de la musique est devenu un écosystème de réseaux et, quel que soit le talent, il est difficile de percer si l’on n’en fait pas partie, assure M. Adjovi. Dans un pays comme le Bénin, soutient-il, il est important qu’il y ait beaucoup de labels. Je pense qu’il nous faut au moins dix labels qui prennent chacun au moins trois artistes".
Le label, Black Music Industry, sera spécialisé dans la production audiovisuelle, l’édition musicale, la diffusion, la promotion, le management artistique, les spectacles. À ses rênes, Auguste Amoussou, alias Super Manager, membre du Réseau des managers d’Afrique. Ce quadra qui a managé une cinquantaine d’artistes au Bénin et dans la sous-région donne déjà le ton. "Chez nous, l’artiste vient se positionner sur le dispositif existant afin de démontrer ce qu’il sait faire. Aucun artiste ne viendra s’il ne sait jouer au moins un instrument. Nous voulons faire vendre autrement le Bénin, nous voulons faire tourner nos artistes à l’international".
Monsedé Tadagbé avec Emmanuelle Sodji.