Kandy Guira, la voix du Faso électro pop

Kandy Guira sur la scène du Petit Bain à Paris lors de sa release en octobre. © Gaêlle Le Targat

Après Tek la runda, un EP paru en 2019, la voix d’or du Burkina Faso signe un premier LP intitulé Nagtaba. Avec ce disque Kandy Guira est en train de se faire un nom, tout en étant choriste d’Oumou Sangaré et chanteuse des Amazones d’Afrique. Sur fond de sonorités électro nourries de rythmiques traditionnelles de son Afrique natale, elle défend des valeurs de fraternité dans lesquelles les femmes occupent une place de choix. Rencontre.

RFI Musique : vous signez un premier album intitulé Nagtaba, qui veut dire ensemble en langue mooré. Est-ce qu’il y a signification particulière à l'heure où notre monde est divisé, que ce soit sur le plan social, politique, religieux?

Kandy Guira : ce titre est vraiment important pour moi surtout en ce moment. Je veux que ce disque permette aux gens de s'associer, de repartir dans le «vivre ensemble» au lieu d'être dans l'individuel avec ce que nous avons vécu à cause de la pandémie entre autre. Je pense qu’ensemble on peut bâtir un monde meilleur. C'est pour cela que j’ai donné ce nom à l'album pour que l’on soit tous en communion avec beaucoup d’amour.

Vous abordez différents thèmes dans vos chansons. Certains vous sont chers comme la scolarité sur le titre Karango. C'est malheureusement un problème récurrent la scolarisation des enfants et notamment en Afrique?

La situation évolue un petit peu aujourd’hui. Sur cette chanson, je prône l’éducation pour tous les enfants car ils représentent l'avenir et le futur. Ils ont besoin d’être éduqué, d’avoir un bagage intellectuel. Il y a encore des endroits où des jeunes filles quittent l'école pour être mariées ! Nous devons donner la même chance à tous les enfants du monde pour que chacun puisse réussir sa vie, que ce soit une fille mais aussi un garçon.

 

© Jean-Marc Lejeune
Couverture de l'album "Nagtaba"

Sur le morceau Pagbatem, vous mettez en avant le fait que les femmes ont changé. Pourquoi montrer ce nouveau visage des femmes au XXI eme siècle?

Le salut des femmes passera par les femmes. Ce sont les femmes qui défendront des femmes, ce sont les femmes qui vont accompagner des femmes. Je considère que les femmes qui se taisaient, ne disaient pas le fond de leur pensée, qui n’osaient pas sortir seule, demandaient toujours la permission aux uns et aux autres n’ont plus à agir ainsi. Ce sont des comportements d’un autre temps! Aujourd'hui, on a le droit de se plaindre si quelque chose ne va pas. S’il y a des violences envers la gente féminine on les dénonce. C’est fondamental que nous ayons cette liberté. Actuellement nous sommes à côté des hommes et non derrière eux.

Musicalement votre album offre une esthétique pop avec des touches électro. Tout en conservant un ancrage ouest africain. Comment s'est effectué cet équilibre?

Pour moi c’est un pont entre l’Afrique et l’Europe qui me lie en ce moment. Entre mon pays natal, qui est le Burkina Faso et mon pays d'adoption, qui est la France, j’ai voulu créer une passerelle entre ces deux cultures afin qu’elles se retrouvent dans ma musique. C'est une création que nous avons commencé à Ouagadougou avec Jean-Marc Guiébré, dit Petit Jeannot, célèbre arrangeur de la place. Par exemples, coté traditionnel on a mis en avant deux instruments à percussion importants utilisés chez les mossis: le bendré, calebasse couverte de peaux et le tchema, cloches en fer que l’on frappe avec des baguettes. Il était fondamental de s’appuyer sur cette rythmique qui est le socle même de ma musique. Ensuite nous sommes venus à Paris avec cette base que nous avons proposé à Bud et Benoit du Studio de la Fugitive. Ils ont apporté la couleur électronique. D’où mon style mélangé que j’ai appelé le Faso électro pop.

 

Cet album est aussi placé sous le signe des malentendants puisque vous avez créé une structure intitulée Que du bonheur en sons qui a pour vocation d’aider les personnes atteintes de surdité. Cette action est une affaire personnelle?

Ce combat que je mène est parti de la situation de mon petit frère malentendant. J’ai voulu l’accompagner pour qu’il sorte de son isolement puisqu’il n’entend pas les sons. Aujourd'hui, j’aide quatre-vingt-seize personnes, à peu près, au Burkina Faso en leur fournissant des prothèses auditives. Ce volet social fait partie prenante de l’album. Quand on dit qu’on est ensemble, cela veut dire que nous écoutons aussi le handicap.

Nagtaba en CD et vinyles (Que du bonheur en sons/Vlad Production/Inouïe distribution/RFI Talent)

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Prochains concerts:

22/11: Nuits de la voix, Maison de la radio, Paris

04/12: Centre culturel, Ile de Ré

18/12: Le Sonographe, Avignon

15/01: Soko Festival, Burkina Faso