Jane Birkin

Tant d'années se sont déjà écoulées, depuis que Jane Birkin a débarqué à Paris pour l'adopter à jamais. Dans l'écho de l'explosion sensuelle du film "Blow Up" d'Antonioni, elle incarne dans "Slogan" avec Serge Gainsbourg, cette adorable "petite briseuse de ménage" qui envoûte la France entière.
Dès lors, Serge, Jane et leurs amours, leurs chansons, leurs provocations, voire leur désunion ont peu à peu composé la bande originale de nos vies hexagonales. Et même la rupture affective, et aussi effective, ne parviendra pas à briser leur extraordinaire union artistique. Jusqu'à son tout dernier souffle en 91, Serge restera son auteur/compositeur/arrangeur exclusif. Et même au delà de sa disparition, il reste omniprésent puisque voici trois ans Jane chantait encore Serge sur son album "Version Jane". Sur des arrangements apocryphes des Négresses Vertes ou d'Eddie Louiss, elle reprenait à son compte des chansons de Gainsbourg... qu'elle n'avait jamais interprétées auparavant telle "La gadoue".

L'album de la délivrance

Tant d'années se sont déjà écoulées, depuis que Jane Birkin a débarqué à Paris pour l'adopter à jamais. Dans l'écho de l'explosion sensuelle du film "Blow Up" d'Antonioni, elle incarne dans "Slogan" avec Serge Gainsbourg, cette adorable "petite briseuse de ménage" qui envoûte la France entière.
Dès lors, Serge, Jane et leurs amours, leurs chansons, leurs provocations, voire leur désunion ont peu à peu composé la bande originale de nos vies hexagonales. Et même la rupture affective, et aussi effective, ne parviendra pas à briser leur extraordinaire union artistique. Jusqu'à son tout dernier souffle en 91, Serge restera son auteur/compositeur/arrangeur exclusif. Et même au delà de sa disparition, il reste omniprésent puisque voici trois ans Jane chantait encore Serge sur son album "Version Jane". Sur des arrangements apocryphes des Négresses Vertes ou d'Eddie Louiss, elle reprenait à son compte des chansons de Gainsbourg... qu'elle n'avait jamais interprétées auparavant telle "La gadoue".

Cette fois pourtant, lorsqu'elle décide d'enregistrer un nouvel album, Jane est aux pieds du mur. Pour inéluctablement tourner la page des années Gainsbarre, il lui faut non seulement se sevrer des mots et des mélodies de Serge, mais surtout plonger dans le no man's land d'une nouvelle collaboration. Alors, elle sera multiple, comme une sorte d'infidélité exacerbée.

Avec Philippe Lerichomme, qui a réalisé tous les disques de Serge depuis L'Homme à la tête de choux comme tous les siens, Jane décide que chaque auteur/compositeur signera une seule chanson. Et au nom de l'éclectisme, Souchon & Voulzy, Hardy, Manset, Solaar, Daho, Chamfort, Lavoine, Art Mengo, Miossec, Zazie et Nilda Fernandez relèvent le défi. Pour contrebalancer ce casting idéal, puisqu'au nom de l'émotion il faut toujours savoir se mettre en danger et pour que ces chansons si diverses puissent s'accorder musicalement entre elles, Jane et Philippe les confient à un musicien aussi unique qu'inconnu.
Franck Eulry repéré par Lerichomme pour ses arrangements à l' imagination débordante, va projeter ces chansons neuves dans un univers bigarré. Et ses séquences prodigieuses, entre trip hop et pop british excentrique, propulseront la voix de Jane sur un tapis volant de violons, alti et autres violoncelles.
A un jet de pavé de Champs-Elysées, en Avril dernier, Jane et Philippe investissent pour trois mois le studio Labomatic de leur vieux complice Dominique Blanc-Francard qui mixait déjà les disques de Jane aux cotés de Serge.
Mais cet album là ne ressemblera en rien à tout ce qu'ils ont connu jusqu'à présent.
Avec Serge, c'était tout simple: il s'occupait de tout avec Philippe. Et Jane n'avait plus qu'à venir poser sa voix dans ce costume taillé sur mesure pour elle.

Cette fois au contraire, Jane s'investit jusqu'au bout, assistant à chaque séance, à chaque prise d'instrument, dialoguant avec tous. De même, sous la direction de Philippe, elle chante et rechante inlassablement ses chansons. Certaines comme A la légère de Souchon/Voulzy seront entonnées presque chaque jour durant plus d'un mois, pour qu'elle devienne une seconde peau comme ces compositions burinées par le vent des tournées. D'autres, au contraire plus fragiles, telle C'est comme ça de Zazie- la seule plage de l'album qui fasse directement référence à Serge- devaient au contraire être préservées, un peu comme une première prise de cinéma. C'est comme ça sera d'ailleurs capturée "live" avec les vingt violons et le regard allumé de Zazie de l'autre coté du bocal dans un rare moment d'émotion.
Trois mois durant, dans une atmosphère totalement zen et incroyablement détendue, Jane, Philippe, Dominique et Franck se retrouvent dans l'univers confiné du studio pour inventer cet album qui n'a pas encore trouvé son titre. Mathieu Chedid et ses guitares énervées, les Cherche Midi qui viennent vocaliser sur la chanson de leurs parents Souchon et Voulzy ou Sinclair qui rallume de ses harmonies soul le Love Slow Motion de MC Solaar et de Zackman sont autant d'instantanés de l'allégresse et de la candeur de ces cessions au Labomatic.

Puis au mixage, chacun des douze auteur et/ou compositeurs débarque au studio pour découvrir sa chanson interprétée par Jane. Du secret Gérard Manset au méridional Art Mengo, du réservé et néanmoins fantasque Miossec au caustique Alain Chamfort, du fan Étienne Daho au monstre sacré Hardy chacun se retrouve face à la console du Labomatic pour lire son titre dans les yeux de Jane Birkin.
Mission accomplie, l'effet de surprise joue sans commune mesure pour inventer un CD hors des sentiers battus, incontestablement saisissant, surprenant et carrément envoûtant.
Et son titre finira par s'imposer de lui même, ce sera " A la légère" comme un leitmotiv qui résume l'extraordinaire insouciance de Lady Jane, qui rayonne aveuglément dans l'optimisme de cet album, comme une ado pour toujours.

Gérard BAR-DAVID