EN DIRECT DU MASA (5)
A l'instar d'un salon comme le Midem, le Masa se veut un lieu de rencontres des professionnels du spectacle du monde entier.
Une manifestation de ce genre, tous les 2 ans, est certes nécessaire, mais les impondérables liés à l'Afrique (transports déficients, manque de moyen financier) et un meilleur professionnalisme de l'organisation devraient permettre à cette manifestation de prendre son envol.
MASA 99 : un bilan en demi-teinte.
A l'instar d'un salon comme le Midem, le Masa se veut un lieu de rencontres des professionnels du spectacle du monde entier.
Une manifestation de ce genre, tous les 2 ans, est certes nécessaire, mais les impondérables liés à l'Afrique (transports déficients, manque de moyen financier) et un meilleur professionnalisme de l'organisation devraient permettre à cette manifestation de prendre son envol.
V enus d'une vingtaine de pays européens, asiatiques, américains et africains, quelques cinq cents organisateurs de spectacles et de festivals sont venus à Abidjan dans l'espoir de découvrir les nouveaux talents qui enrichiront leur programmation.
Malheureusement, parmi la cinquantaine d'artistes présents, seul une dizaine présente un véritable potentiel international et on les connaissaient souvent déjà (Rokya Traoré, Cheick Lô, Chiwoniso, Anne Marie Nzie ou le vétéran Wendo Kolosoy, créateur de la rumba congolaise).
D'autres ont un potentiel intéressant, mais s'adressent pour le moment à un public encore plus pointu. Et il ne faut pas négliger que faire venir des artistes africains en Europe ou Etats-Unis est onéreux. Les organisateurs de festivals attendent trop souvent des subventions de l'ACCT, créateur et aujourd'hui partenaire du Masa, pour inviter des groupes composés souvent d'une dizaine de musiciens !
Faire passer ces artistes venus de l'Afrique profonde dans une salle comme celle de l'hôtel Ivoire, réfrigérée à 16°, n'est pas une bonne solution. Certes, techniquement, tout est en place, sono, éclairage et enchaînements entre les groupes. Mais un tel cadre tue l'âme de ces musiques et les professionnels ne s'y sont pas trompés, désertant petit à petit ce lieu pour tenter l'aventure dans les quartiers d'Abidjan à la recherche des artistes de la programmation décentralisée. Mais là, si le tempo de l'Afrique battait, la désorganisation était au rendez-vous. La programmation aléatoire, ainsi que les problèmes techniques ont découragé les plus vaillants.
La meilleure surprise du Masa aura été la journée organisée par le label ivoirien Show Bizz qui a présenté dans le cadre du " Masa Festival " toutes les facettes de la musique ivoirienne.
De 9 heures à 5 heures du matin (soit pendant 20 heures), une soixantaine de groupes se sont succédés dans une ambiance de fête.
Dans la chaleur tropicale des maquis, entre poulet braisé et agouti, les festivaliers ont pu découvrir toutes les tendances des musiques ivoiriennes, de la fanfare au zouglou en passant par la variété, le rap, les musiques mandingues, le reggae et le mapouka, une danse traditionnelle ivoirienne galvaudée par une jeunesse en mal de déhanchements de postérieur.
D'ailleurs les organisateurs du Masa en ont vite tiré les leçons, et dès le lendemain, les artistes que l'on voyait dans la salle réfrigérée de l'hôtel Ivoire, passaient dans le cadre chaleureux de la scène du " Village ".
Là, les diffuseurs ont pu apprécier à leur juste valeur ces artistes dans une ambiance chaleureuse qu'ils auront bien du mal à recréer chez eux.
Ce n'est donc que 48 heures avant l'extinction des lampions que ce Masa a trouvé son âme.
Au Masa, il n'y a pas que la scène. Le spectacle est une chose, mais l'essentiel pour les artistes est d'y trouver des contrats.
Et là, c'est un peu au petit bonheur la chance. Beaucoup de contacts, les organisateurs de spectacles promettent, certains tiennent parole, d'autres pas. Certains décrochent le gros lot.
Tel est le cas du groupe congolais Saintrick et les Thielly.
Totalement inconnu avant d'arriver à Abidjan, ces congolais exilés à Bangui en Centrafique, vont découvrir du pays après ce Masa.
Ils pensaient prendre des contacts qu'ils concrétiseraient pour l'an 2000.
Cela s'est passé au-delà de toutes leurs espérances.
Leur prestation dans la salle glaciale de l'hôtel Ivoire a été une bouffée de chaleur pour les festivaliers qui découvraient leur " Yeketi ", un mélange de rythmes mandingues mariés aux sonorités de l'Afrique centrale.
Leur chorégraphie et leurs textes engagés ont conquis le public et ces inconnus vont partir à la découverte de l'Europe dès le printemps prochain.
Un périple qui les mènera tout d'abord en Suisse, puis au Festival des musiques métisses d'Angoulême fin mai, avant l'Allemagne , la Belgique, le Danemark et la Hollande.
Un tel résultat prouve bien tout l'intérêt d'une telle manifestation.
Espérons que la prochaine édition qui se déroulera en février 2001 dans le nouveau Palais de la Culture tire les leçons des lacunes de ce 4ème Masa.
Pierre RENE-WORMS