Enrico Macias à New York

Il est environ 19h30 sur le parvis de Lincoln Center à New York ce dimanche 24 octobre. Devant la salle qui accueillera dans une demi-heure "l'enfant de tous pays", c'est l'ébullition. Ici aussi les places se vendent au marché noir. Car ce soir on affiche complet ! Enrico Macias n'en est pas à son premier essai new-yorkais. Son dernier passage il y a trois ans au Beacon Theater lui avait valu une standing ovation qu'il avait avoué ne jamais vouloir oublier.

Un Ambassadeur pour la paix

Il est environ 19h30 sur le parvis de Lincoln Center à New York ce dimanche 24 octobre. Devant la salle qui accueillera dans une demi-heure "l'enfant de tous pays", c'est l'ébullition. Ici aussi les places se vendent au marché noir. Car ce soir on affiche complet ! Enrico Macias n'en est pas à son premier essai new-yorkais. Son dernier passage il y a trois ans au Beacon Theater lui avait valu une standing ovation qu'il avait avoué ne jamais vouloir oublier.

Les portes s'ouvrent et c'est quelques 3000 personnes qui s'installent confortablement prêtes à accueillir celui qui a été nommé par l'organisation des Nations Unies, "Ambassadeur de la paix" à travers le monde. A ma droite on parle hébreux. Un peu plus loin, arabe. Rien d'étonnant lorsque l'on sait que l'artiste de ce soir est né à Constantine en Algérie.

Aux premiers rangs, les invités. Parmi eux, l'Ambassadeur d'Algérie, Abdallah Baali, accompagné de sa femme et Alain Dejammet, Ambassadeur de France. Puis soudain un discret mouvement de foule se crée au milieu de la salle, deux gardes du corps escortent un petit monsieur en complet noir, qui sourit et salue les gens qui l'interpellent sur son passage. Le Secrétaire Général de l'Organisation des Nations Unies lui même, Kofi Annan, est venu écouter son ami, son frère. Les premiers mots du chanteur seront pour lui.

Les lumières se tamisent, la tension monte alors que les musiciens s'installent sur la scène pour laisser place à celui dont l'apparition est alors synonyme d'applaudissements et de cris hystériques. L'ambiance est donnée, la soirée sera ainsi : agréablement mêlée de joie et de larmes d'espoir lorsque qu'il est question de paix, encore de paix et toujours de paix.

J'ai quitté mon pays

"Vous ne pouvez pas savoir à quel point je suis heureux de vous annoncer que le Président Abdelaziz Bouteflika m'a invité personnellement à retourner chanter en Algérie. Heureux de pouvoir retourner fouler le sol de ma terre natale que j'ai dû quitter il y a beaucoup trop d'années."

Les "you-you" se déchaînent alors dans la salle. Sur scène c'est un homme heureux, ému, et touché du geste de son président qui tient à nous faire partager cette joie incommensurable. S'ensuivent- alors le classiques, "Les filles de mon pays", " L'Oriental", "Non je n'ai pas oublié", "Paris tu m'as pris dans tes bras"… tous rythmés par les applaudissements d'une foule cosmopolite. Ces mêmes classiques qui hier emportaient une autre foule, celle qui s'embarquait par centaine sur les bateaux qui traversaient la Méditerranée, laissant derrière elle, un pays, un soleil, une mer bleue… Ce soir les souvenirs se réveillent bien après les adieux.

Ambassadeur d'amour aussi…

D'amour il sera aussi question lorsque il évoquera tendrement sa femme, sa fille et même la femme de son ami. C'est en anglais avec des paroles écrites spécialement pour l'occasion qu'il rendra hommage à celle qui partage sa vie depuis toujours "Pour toutes ces raisons, je t'aime" devient alors "For all of this my love, je t'aime…L'émotion est alors à son comble lorsqu'il dédie "Un berger vient de tomber" au Président Kennedy, à Martin Luther King, Anouar el-Sadate (pour qui cette chanson avait été initialement écrite) et pour finir, à celui récemment assassiné, Yitzhak Rabin. La guitare orientale se fait mélo, les regards sont posés sur celui qui n'a ce soir qu'un désir avant de partir, celui de nous transmettre encore et toujours ce message trop souvent bafoué qui fait de nous tous réunis plus que des amis mais des frères aussi. A son "ami Kofi" il dira même : "Aide nous à pouvoir tous célébrer un jour, Noël à Jérusalem."

A capella, sans micro et devant un parterre de roses jetées là par ses fans, il tentera difficilement d'obtenir le silence pour interpréter la dernière chanson : "Enfants de tous pays, tendez vos mains meurtries, semez l'amour et puis donnez la vie…" en français, en anglais, en hébreu, en arabe et en russe ce soir encore comme le marchand de sable, Enrico à semé un message qu'il nous faut désormais cultiver.

Il est 22h30, 3000 personnes rejoignent maintenant la sortie où les taxis jaunes attendent en rangs serrés. La tête encore pleine des sons des guitares orientales, je regarde s'éloigner une jeune femme, cette même jeune femme que je n'ai cessé d'observer toute la soirée, assise au dernier balcon, fermée, sans expression, sans un mouvement non plus, prenant soin de ne surtout pas laisser dépasser, les mèches de cheveux que dissimule un foulard…De cette femme je n'aurai vu que les yeux !