Festival des fanfares

Cent cinquante trois ans après le premier festival mondial de fanfares militaires — 1846 ! tant d’ans, c’est long — voici enfin le premier festival parisien de fanfares déjantées. Il s’est tenu les 11, 12 et 13 novembre 1999, au New Morning.

Les cuivres ont brillé !

Cent cinquante trois ans après le premier festival mondial de fanfares militaires — 1846 ! tant d’ans, c’est long — voici enfin le premier festival parisien de fanfares déjantées. Il s’est tenu les 11, 12 et 13 novembre 1999, au New Morning.

Le retour de la fanfare dont tout le monde parle depuis une petite décennie, a permis le renouvellement du genre, ses musiques et son esprit. A côté des fanfares classiques (style gardiens de la paix) et potaches (Fanfare des Quat’z’arts), on a vu apparaître les "nouvelles fanfares" et les fanfares exotiques.
Les premières, des ensembles vraiment décalés, ont gardé les principales caractéristiques du genre (grosse caisse, dominance des cuivres, prestations déambulatoires), mais elles jouent une musique qui n’a plus rien de militaire : du funk aux flonflons, fait ce qui te plaît. Les secondes nous viennent d’Europe Orientale (les Macédoniens de Kocani Orkestar), d’Asie (fanfares du Rajasthan, du Népal et de Java Ouest), d’Afrique (les fanfares du Nigéria : celle de la police et celle du Sultan de Sokoto), d’Amérique Latine (bandas mexicaines), etc. Toutes ces belles étrangères n’ont pas encore eu la faveur de nos oreilles, mais, cette première rencontre aidant, ce n’est qu’une question de temps.
Trois soirs de suite, les promoteurs de ce festival organisé à la hâte, ont su réunir une douzaine d’ensembles pris au six coins de l’Hexagone et qui, à défaut de pouvoir déambuler librement, ont joué en statique devant quelques centaines d’amateurs : au New Morning, les fanfares ont fait le plein. Ce sont, entre autres, les Parisiens d’Uranus Bruyant, qui réinventent les musiques de Macéo Parker et James Brown, les Marseillais de Boukovo en route vers les Balkans et les musiciens du Toups Bebey & le Spirit Pan African Brass Band, pour une musique carnavalesque, africaine et caraïbe. Ces orchestres colorés et carrés à la fois, montrent que le milieu de la fanfare se professionnalise beaucoup, mais n’en résument pas tout l’esprit.

Car la fanfare, c'est aussi le plaisir des amateurs et des copains, où la bonne humeur et une bonne dose d’humour compensent les faiblesses de la mise en place. Ici, les Astiaous (prononcer "astiaosse") venus de Pont-Sainte-Marie, petit pays près d'Agen. Chemises à fleurs, bermudas et chaussettes blanches, dédaigneux des micros mais sachant manier le mégaphone et même chanter tout en soufflant. Cela donne quelques titres hilarants, comme On file au Pakistan ou C’est nous les méchants piranhas, qui font rimer Garonne et Amazone ou piranhas et ragnagnas… tout en finesse ! Bref, c'est la fanfare.

Ce premier festival en appelle d'autres, bien sûr, et la prochaine édition devrait avoir lieu dès le printemps 2000. Mais faudra renoncer aux espaces confinés, surbruyants et mal sonorisés, pour rendre les fanfares à leur milieu naturel - la rue, toute nue.

Pour ceux qui en redemandent, Ceux qui marchent debout, fanfare funk et décalaminée les attend au New Morning, les 2, 3 et 4 décembre prochains.

Jérôme Samuel